Ça y est, il est enfin sorti. Chèque débité en avril, livre livré début juillet, on l'aura attendu. Que nous réserve ce volume deux quand on pouvait avoir l'impression que le premier volume couvrait déjà largement le genre? Disons le tout net, ce livre est réservé aux vrais fanatiques du genre, pas aux simples curieux pour qui le premier tome sera largement suffisant. Il explore plus en détail des pans entiers du western européen qui ne sont pas forcément les plus porteurs, à savoir le western français, le western allemand, et le western espagnol. C'est justement sur les périodes les moins connues que Jean-François Giré se révèle le plus captivant: les richesses insoupçonnées par beaucoup du western français au temps du muet, et tout le pan du western espagnol pré-Leone, où les réalisateurs s'attachaient à concocter des petits westerns honnêtes d'influence américaine. On est là en plein dans l'intérêt didactique premier de ce genre d'ouvrage: certes, tout peut se dénicher sur Internet, mais sans fil directeur, sans guide, comment s'y retrouver?
Malheureusement, cela ne suffit pas à faire un livre. Le reste des pages est constitué d'articles d'auteurs invités qui s'expriment sur tel ou tel thème du genre: une analyse des noms des héros du western spaghetti (on est étonné de la récurrence du prénom Gary dans le genre) et une rétrospective du western fayot. Malgré la bonne tenue de ces feuillets, l'ensemble n'apporte pas grand chose de neuf au lecteur et le mot remplissage vient immédiatement à l'esprit. A part un bon chapitre sur la musique, vibrant de passion, le lecteur est également submergé d'index en tout genre, qui se croisent les uns les autres, renvoient à d'autres pages de ce volume ou du volume 1, et poussent très loin le recensement de tout ce qui s'apparente de près ou de loin au western avec une composante européenne quelconque. Je ne sais pas exactement pourquoi Bouba le petit ourson est référencé dans un livre sur le western européen, mais il y est...
En résumé, si vous aimez le western européen, mais pas au point de devenir super-calés sur les westerns espagnols, allemands, ou les comédies western françaises avec Fernandel, ce livre n'est pas pour vous. Si au contraire, vous êtes curieux de tout ce qui a trait au western européen au sens large, du western Turc aux "festerns" en passant par les téléfilms oubliés, vous pouvez foncer.
A noter: je n'ai pas repris ici les polémiques sur le nouveau style, parfois acerbe de l'auteur, les histoires de plagiat ou le manque de sérieux dénoncé par les plus fins connaisseurs du genre. Les auteurs y ont répondu, c'est à lire sur Western-maniac.
Des westerns partagés par un amateur, sans prétention journalistique, sans rigueur historique et sans faux col. N'utilisez pas ces articles pour votre thèse sur le western.
dimanche 15 juillet 2012
vendredi 13 juillet 2012
Tuez les tous et revenez seul
1968
Enzo G. Castellari
Avec: Chuck Connors, Frank Wolff.
"Tuez les tous, Dieu reconnaîtra les siens". Arnaud Amaury ne savait certes pas que sa célèbre phrase évoquerait pour certains le titre d'un western spaghetti plus de huit-cents ans plus tard. "Tuez les tous et revenez seul", donc, un titre comme seul le genre peut nous offrir, et que Enzo G. Castellari s'applique à respecter à la lettre. Non seulement tout le casting y passe, mais également une proportion non négligeable de l'armée nordiste. Sorte de mix entre Les douze salopards et Quand les aigles attaquent (sortis tous les deux à la même période à peu de choses près), ce western débute par un classique jeu du chat et de la souris, une répétition bon enfant sans conséquences qui laisse augurer d'un simple film pour enfant sans haine ni violence. Que nenni, quand les choses sérieuses commencent, nos professionnels anéantissent une garnison entière après avoir pourtant tout fait pour ne pas trop se faire remarquer. La troupe hétéroclite est menée par Chuck Connors, une star du petit écran aux USA dans la série The Rifleman. Son visage reptilien, marqué de cicatrices est parfait pour le genre, tout autant que son sourire fraîcheur de vivre si typique des héros du western italien. Athlète confirmé, Chuck Connors saute, bondit, cogne, tire et cogne encore et encore. Ses acolytes ne sont pas en reste, Leo Anchoriz en premier lieu, avec son étonnant banjo bazooka, et l'imposant Hércules Cortés capable de castagner 12 nordistes à la fois. Alberto Dell'Acqua impressionne par ses voltiges (plus que les galipettes numériques de tous les Spider-man de ces 10 dernières années) et surtout, Giovanni Cianfriglia impose sa magnifique stature et ses lancers de couteaux. Tous apportent quelque chose de plus que de la simple figuration. Ils sont vivants, crédibles, ils existent par leurs jeux de regards, leurs postures, leurs gueules. Franco Citti, avec sa gueule d'ange abimée, se démarque par de simples regards soupconneux, et même Hércules Cortés qui joue pourtant le rôle d'une grosse brute, parvient à faire passer plus de choses dans sa moue dubitative que bien des acteurs de premier plan. Quand à Frank Wolff, et bien c'est du Frank Wolff pur jus comme on l'aime...
Enzo G. Castellari soigne sa mise en scène et travaille ses plans et ses cadrages comme à son habitude. On note par exemple un plan d'un Nordiste qui plonge les mains dans une citerne, filmé du fond de la citerne où se cachent deux des salopards. Ça n'est pas nécessaire à l'intrigue, mais c'est beau. Le budget est relativement confortable au niveau de la figuration, la musique fait son job tout à fait correctement, et le tout se suit sans déplaisir aucun. Les nordistes, une fois de plus, sont d'ignobles tortionnaires, les coups tordus se suivent et se ressemblent et à la fin, la morale n'est pas sauve. Bref, tout va pour le mieux dans la petite géographie formatée du western italien.
Où le voir: disponible par exemple en VOD sur CanalPlay Infinity.
Captures: Jo et El Puro sur Western-maniac
Enzo G. Castellari
Avec: Chuck Connors, Frank Wolff.
"Tuez les tous, Dieu reconnaîtra les siens". Arnaud Amaury ne savait certes pas que sa célèbre phrase évoquerait pour certains le titre d'un western spaghetti plus de huit-cents ans plus tard. "Tuez les tous et revenez seul", donc, un titre comme seul le genre peut nous offrir, et que Enzo G. Castellari s'applique à respecter à la lettre. Non seulement tout le casting y passe, mais également une proportion non négligeable de l'armée nordiste. Sorte de mix entre Les douze salopards et Quand les aigles attaquent (sortis tous les deux à la même période à peu de choses près), ce western débute par un classique jeu du chat et de la souris, une répétition bon enfant sans conséquences qui laisse augurer d'un simple film pour enfant sans haine ni violence. Que nenni, quand les choses sérieuses commencent, nos professionnels anéantissent une garnison entière après avoir pourtant tout fait pour ne pas trop se faire remarquer. La troupe hétéroclite est menée par Chuck Connors, une star du petit écran aux USA dans la série The Rifleman. Son visage reptilien, marqué de cicatrices est parfait pour le genre, tout autant que son sourire fraîcheur de vivre si typique des héros du western italien. Athlète confirmé, Chuck Connors saute, bondit, cogne, tire et cogne encore et encore. Ses acolytes ne sont pas en reste, Leo Anchoriz en premier lieu, avec son étonnant banjo bazooka, et l'imposant Hércules Cortés capable de castagner 12 nordistes à la fois. Alberto Dell'Acqua impressionne par ses voltiges (plus que les galipettes numériques de tous les Spider-man de ces 10 dernières années) et surtout, Giovanni Cianfriglia impose sa magnifique stature et ses lancers de couteaux. Tous apportent quelque chose de plus que de la simple figuration. Ils sont vivants, crédibles, ils existent par leurs jeux de regards, leurs postures, leurs gueules. Franco Citti, avec sa gueule d'ange abimée, se démarque par de simples regards soupconneux, et même Hércules Cortés qui joue pourtant le rôle d'une grosse brute, parvient à faire passer plus de choses dans sa moue dubitative que bien des acteurs de premier plan. Quand à Frank Wolff, et bien c'est du Frank Wolff pur jus comme on l'aime...
Enzo G. Castellari soigne sa mise en scène et travaille ses plans et ses cadrages comme à son habitude. On note par exemple un plan d'un Nordiste qui plonge les mains dans une citerne, filmé du fond de la citerne où se cachent deux des salopards. Ça n'est pas nécessaire à l'intrigue, mais c'est beau. Le budget est relativement confortable au niveau de la figuration, la musique fait son job tout à fait correctement, et le tout se suit sans déplaisir aucun. Les nordistes, une fois de plus, sont d'ignobles tortionnaires, les coups tordus se suivent et se ressemblent et à la fin, la morale n'est pas sauve. Bref, tout va pour le mieux dans la petite géographie formatée du western italien.
Où le voir: disponible par exemple en VOD sur CanalPlay Infinity.
Captures: Jo et El Puro sur Western-maniac
mercredi 11 juillet 2012
Le colt du révérend
Reverendo Colt
1970
Leon Klimovsky
Avec: Guy Madison, Richard Harrison
Plusieurs petites choses sont à porter au crédit de ce petit western de série. Guy Madison joue le rôle d'un ancien chasseur de prime devenu révérend par un sens éthique assez peu commun dans le western spaghetti. Ce n'est pas, comme l'on pourrait s'y attendre, un déguisement destiné à tromper l'ennemi, ce n'est pas un prêtre exubérant et haut en couleur qui joue de la grenade. Bien qu'il joue souvent du revolver, ce révérend là est un vrai révérend, qui refuse les avances des putes qu'il fréquentait jadis et qui rachète ses propres crimes en s'acquittant d'une mission évangélique. On est, de ce point de vue, assez proche d'un western américain. Cela se confirme lors de la séquence du fort où le révérend soutient un siège accompagné d'une troupe hétéroclite: femmes, vieux colonel, joueur de poker, bandit repenti par amour dans la plus pure lignée de William S. Hart. Le chef des bandits, métis, avec son bandana et sa boucle d'oreille est plutôt symptomatique des rebelles de l'époque qui s'invitaient régulièrement dans le western, et les flashbacks récurrents nous recadrent bien vite dans le petit monde du western italien, même si les ralentis sont ici directement empruntés à Sam Peckinpah.
Tout cela est mené sans fioriture mais avec métier. Leon Klimovsky n'a pas de chance avec sa postérité, à chaque fois qu'il sort un film potable, on se demande si ce n'est pas Castellari qui l'a realisé (voir Quelques dollars pour Django), parce qu'en effet la famille Girolami est fortement impliquée dans l'entreprise. Quoi qu'il en soit, le film est réalisé avec soin, le budget n'est pas trop riquiqui et on ne s'ennuie pas. La musique de Gianni Ferrio (qui a composé entre autres, la musique du Dollar troué) vous reste dans la tête au moins jusqu'au lendemain, ce qui est plutôt bon signe. Le thème principal, s'accompagne tantôt de guitare, tantôt de sifflements, tantôt de trompette pour le meilleur effet. Les aficionados pourront comme d'habitude s'amuser a reconnaître les seconds rôles (dont Richard Harrison curieusement sous-employé), les allergiques à la poussière d'Almeria passeront leur chemin comme d'habitude.
Où le voir: DVD seven 7 de bonne facture. Les images sont très bonnes et rendent service au soleil accablant qui est un véritable protagoniste du film. Une scène coupée nous montre une femme se dénudant, chose assez rare dans le western italien (mais à force de répertorier toutes ces scènes on va finir par ne plus me croire). La scène est présentée sans paroles, mais avec le thème principal en accompagnement, ce qui lui donne une certaine tenue (jeu de mot involontaire). On a également droit à une classique présentation du film par Jean-Francois Giré (heureusement qu'ils n'ont pas demandé à Brion) et surtout à un formidable récapitulatif de la carrière de Guy Madison par Christophe Champclaux qui aligne les films, les dates, les anecdotes et les digressions avec fluidité, sans être barbant, en restant simple et sans porter de jugement de valeur sur telle ou telle partie le la carrière de l'acteur. Du bon boulot, on en viendrait presque à regretter les coupes effectuées au montage, alors que d'habitude on est plutôt contents que ce genre d'exercice ne dure pas trop longtemps.
Capture: Rex Lee sur Western-Maniac.
1970
Leon Klimovsky
Avec: Guy Madison, Richard Harrison
Plusieurs petites choses sont à porter au crédit de ce petit western de série. Guy Madison joue le rôle d'un ancien chasseur de prime devenu révérend par un sens éthique assez peu commun dans le western spaghetti. Ce n'est pas, comme l'on pourrait s'y attendre, un déguisement destiné à tromper l'ennemi, ce n'est pas un prêtre exubérant et haut en couleur qui joue de la grenade. Bien qu'il joue souvent du revolver, ce révérend là est un vrai révérend, qui refuse les avances des putes qu'il fréquentait jadis et qui rachète ses propres crimes en s'acquittant d'une mission évangélique. On est, de ce point de vue, assez proche d'un western américain. Cela se confirme lors de la séquence du fort où le révérend soutient un siège accompagné d'une troupe hétéroclite: femmes, vieux colonel, joueur de poker, bandit repenti par amour dans la plus pure lignée de William S. Hart. Le chef des bandits, métis, avec son bandana et sa boucle d'oreille est plutôt symptomatique des rebelles de l'époque qui s'invitaient régulièrement dans le western, et les flashbacks récurrents nous recadrent bien vite dans le petit monde du western italien, même si les ralentis sont ici directement empruntés à Sam Peckinpah.
Tout cela est mené sans fioriture mais avec métier. Leon Klimovsky n'a pas de chance avec sa postérité, à chaque fois qu'il sort un film potable, on se demande si ce n'est pas Castellari qui l'a realisé (voir Quelques dollars pour Django), parce qu'en effet la famille Girolami est fortement impliquée dans l'entreprise. Quoi qu'il en soit, le film est réalisé avec soin, le budget n'est pas trop riquiqui et on ne s'ennuie pas. La musique de Gianni Ferrio (qui a composé entre autres, la musique du Dollar troué) vous reste dans la tête au moins jusqu'au lendemain, ce qui est plutôt bon signe. Le thème principal, s'accompagne tantôt de guitare, tantôt de sifflements, tantôt de trompette pour le meilleur effet. Les aficionados pourront comme d'habitude s'amuser a reconnaître les seconds rôles (dont Richard Harrison curieusement sous-employé), les allergiques à la poussière d'Almeria passeront leur chemin comme d'habitude.
Où le voir: DVD seven 7 de bonne facture. Les images sont très bonnes et rendent service au soleil accablant qui est un véritable protagoniste du film. Une scène coupée nous montre une femme se dénudant, chose assez rare dans le western italien (mais à force de répertorier toutes ces scènes on va finir par ne plus me croire). La scène est présentée sans paroles, mais avec le thème principal en accompagnement, ce qui lui donne une certaine tenue (jeu de mot involontaire). On a également droit à une classique présentation du film par Jean-Francois Giré (heureusement qu'ils n'ont pas demandé à Brion) et surtout à un formidable récapitulatif de la carrière de Guy Madison par Christophe Champclaux qui aligne les films, les dates, les anecdotes et les digressions avec fluidité, sans être barbant, en restant simple et sans porter de jugement de valeur sur telle ou telle partie le la carrière de l'acteur. Du bon boulot, on en viendrait presque à regretter les coupes effectuées au montage, alors que d'habitude on est plutôt contents que ce genre d'exercice ne dure pas trop longtemps.
Capture: Rex Lee sur Western-Maniac.
vendredi 6 juillet 2012
Cinq gâchettes d'or
Oggi a me... domani a te!
1968
Tonino Cervi
Avec: Montgomery Ford, Bud Spencer, William Berger, Tatsuya Nakadai
Le héros de ce sympathique western sans prétention est affublé d'une vareuse type Django, agrémentée d'une grande écharpe sombre. Comme Tuco, il choisit ses armes avec soin chez l'armurier et comme Duncan, il est métis. Comme l'Homme sans nom, il tue avec dexterité ceux qui se mettent en travers de son chemin. Comme le Hollandais, il se cherche des hommes de main, experts aux armes et complémentaires les uns des autres. Comme dans La poursuite sauvage, le héros n'a que sa vengeance en tête. Comme dans Et pour quelques dollars de plus, la géographie de l'Ouest est schématisée par ses quatre points cardinaux, si tout le monde pense que vous êtes partis à l'Est ou au Nord, c'est que vous êtes au Sud. Comme Mendoza, le méchant (Tastsuya Nakadai) a un regard de dément, et il est dément pour de bon. Comme dans Wanted, le héros a été victime d'une sombre machination, et comme dans Dieu pardonne, moi pas, Bud Spencer a l'occasion de démontrer sa puissance. Finalement comme dans n'importe quel western italien, la confrontation finale est une interminable partie de cache cache servie par une musique Morriconesque à souhait. Le western italien finit par former un tout cohérent, comme une mémoire collective que l'on se ressasse sans cesse, sans chronologie ni ordre pré-défini dans les motifs qui le composent. Et c'est bien comme ça.
1968
Tonino Cervi
Avec: Montgomery Ford, Bud Spencer, William Berger, Tatsuya Nakadai
Le héros de ce sympathique western sans prétention est affublé d'une vareuse type Django, agrémentée d'une grande écharpe sombre. Comme Tuco, il choisit ses armes avec soin chez l'armurier et comme Duncan, il est métis. Comme l'Homme sans nom, il tue avec dexterité ceux qui se mettent en travers de son chemin. Comme le Hollandais, il se cherche des hommes de main, experts aux armes et complémentaires les uns des autres. Comme dans La poursuite sauvage, le héros n'a que sa vengeance en tête. Comme dans Et pour quelques dollars de plus, la géographie de l'Ouest est schématisée par ses quatre points cardinaux, si tout le monde pense que vous êtes partis à l'Est ou au Nord, c'est que vous êtes au Sud. Comme Mendoza, le méchant (Tastsuya Nakadai) a un regard de dément, et il est dément pour de bon. Comme dans Wanted, le héros a été victime d'une sombre machination, et comme dans Dieu pardonne, moi pas, Bud Spencer a l'occasion de démontrer sa puissance. Finalement comme dans n'importe quel western italien, la confrontation finale est une interminable partie de cache cache servie par une musique Morriconesque à souhait. Le western italien finit par former un tout cohérent, comme une mémoire collective que l'on se ressasse sans cesse, sans chronologie ni ordre pré-défini dans les motifs qui le composent. Et c'est bien comme ça.