Mario Caiano
1967
Avec: Craig Hill, Eduardo Fajardo, Piero Lulli
Il y a bien longtemps que je n’avais mis une galette spaghetti dans la machine, et ma foi j’avais un peu perdu mes repères. Grand dieux ! Qu’est ce que c’est que ces décors minables au possible ? Une ville tout sauf crédible (le fronton de la banque qui fait toc, au secours!), vide, au ciel bas et froid ! Pas d’Almeria, pas de chaleur, pas de mobilier, le néant. Mario Caiano a beau soigner ses plans et ses perspectives, on se retrouve brutalement plongé dans la misère spaghettienne la plus nue. Lorsque Craig Hill (en bonne place dans le palmarès des acteurs de western spaghetti sans charisme) rentre dans le saloon, il y a un peu plus de monde, on pourrait y croire, on se dit même que cela ressemble à un effet recherché mais on est alors frappés par l’indigence de la vestimentation. Où sont les tenues baroques et étudiées, où est le choc esthétique procuré par les accessoires, où est le soin apporté au détail ? Eduardo Fajardo a rarement été aussi peu inquiétant, tant il est mal sapé et même Piero Lulli ne fait guère d’effet engoncé dans son costume simili-cuir mal ajusté.
Heureusement, peu à peu, le charme ineffable du western italien agit. Après deux ou trois chtouig à la guitare de la partition de Francesco de Masi, après deux ou trois coups de feu à l’écho ultra exagéré, après l’apparition de têtes aimées comme celle de Nello Pazzafini, on reprend plaisir au truc, la machine se remet en marche, le cerveau se remet sur les rails, et youpi, on n’a plus qu’à cataloguer la ribambelle de points positifs de l’entreprise. En premier lieu, un scénario solide, bien ficelé, bien mené et que l’on suit avec plaisir jusqu’au bout. Bon, étant donné le pitch – à savoir une bande de bandits qui tient une ville en otage – on se serait attendu, de la part d’un western italien, à plus de démesure dans les sévices, brimades et autres violences diverses à l’encontre de la population locale, mais comme le dit en introduction Jean-François Giré dans un argumentaire un peu bancal, Caiano fait partie de ces réalisateurs qui ont affirmé leur personnalité en copiant le classicisme américain plutôt que le style Leonien (bon je caricature un brin, mais ça revient à ça). Donc, de la violence oui, ma non troppo. Quoi qu’il en soit, le huis-clos étouffant est bien mené, bien rythmé, avec en filigrane des histoires de trahison et de vengeance qui tiennent la route. Les femmes ne font pas que de la figuration, on apprécie l’implication de Giulia Rubini, l’importance des dialogues qui lui sont accordés, le temps consacré à son personnage. Spartaco Conversi apparaît à la fin pour notre plus grand bonheur, et même si l’on sait avant même que la diligence n’arrive qu’elle sera remplie d’hommes de loi, et bien ma foi le film a rempli son office, il a permis de passer une bonne petite soirée spaghetti sans prise de tête, tout en rêvant, comme d’habitude, de ce qu’aurait pu être le film avec plus de moyens, plus de tripes et plus de cran. Malgré tout, un spagh honnête quoi, ni plus, ni moins.
Le DVD Seven 7: image pas tip top, manquant de netteté, couleurs légèrement délavées par moment, un peu vives à d'autres moment, il manque les tons ocres du genre. Introduction factuelle de Jean-François Giré qui dit tout ce qu'il peut sur un film somme toute assez mineur malgré ses qualités de mise en scène.