dimanche 29 mars 2015

Valdez arrive !



Valdez is Coming!
1970
Elmore Leonard


D'Elmore Leonard, je n'ai pas lu grand chose, mais il faut dire que le peu que j'ai lu ne m'a pas incité à approfondir son oeuvre. Maximum Bob m'avait laissé un goût d'inachevé, un polar principalement basé sur l'ambiance, le glauque et le morbide, mais qui ne paraissait jamais aller au bout de ses personnages et de son intrigue. Out of Sight quant à lui, est l'un des rares bouquins que j'ai lu qui soit moins riche que le film qui en a été tiré. Valdez arrive m'a plus ou moins réconcilié avec l'auteur culte, les défauts que je lui prête devenant le principal intérêt de ce petit roman sec et nerveux. Leonard ne bâtit pas une intrigue incroyable, et c'est tant mieux! Leonard n'approfondit pas beaucoup la psyché de ses personnages, mais pour un western, c'est ça qu'il faut. Valdez, le personnage principal, est un de ces entêtés admirables du western qui va au bout de ses convictions, de son attachement à la justice telle qu'il la conçoit, la cause fut elle futile, sans gloire et perdue d'avance. Engagé à dédommager une squaw dont le négro de mari s'est fait descendre par erreur, Valdez - lui-même métèque - va aller de vexations en vexations quand il réclame de l'argent au très puissant Tanner, le petit tyran local. On le voit rien qu'à l'énoncé de l'histoire, Valdez arrive est une quête pour la reconnaissance des déclassés, des laissés pour compte, des victimes de racisme de tout genre, un livre au sous-texte politique fort qui donne la parole à ceux qu'on ne voit jamais. Valdez, humilié par les hommes de Tanner, fait ce que tout héros de western fait d'habitude, il finit par ouvrir un tiroir et sortir ses armes qui dormaient là depuis une éternité. Pas de pot, c'est à un ancien éclaireur de l'armée que Tanner s'en est pris, un dur de dur, impossible à pister, et très bon au tir. Il y a bien El Segundo, le bras droit de Tanner, qui a remarqué que Valdez avait du cran, mais il l'a remarqué trop tard. Maintenant, Valdez a récupéré ses armes, et il arrive!
Le caractère obtus et buté de Valdez va provoquer un déchaînement de violence déconnecté du but initial, une bonne dizaine de morts, sans compter les chevaux, et la destruction de la maison d'un ami de Valdez. Tout ça pour une ou deux centaine de dollars, pour une squaw qui s'en fout et qui est déjà retourné chez les siens, pour un principe! En même temps, ce principe commence à se diluer un peu, quand Valdez ayant kidnappé la femme de Tanner, se verrait bien vivre avec elle le restant de ses jours. Tanner, enragé, part à la poursuite de Valdez et de sa femme. El Segundo lui, compte les hommes que Valdez lui a descendu, et commence à se demander si cela en vaut bien la peine. Si on reste calé sur le premier degré, c'est à dire sur cette chasse à l'homme si classique du western, on appréciera la description précise des techniques de Valdez, de son instinct et de son habileté aux armes. Les péripéties s’enchaînent, et le livre sait ménager son suspense. Le dénouement, renouant avec l'humain, avec le raisonnable, déjouant les pronostics qu'on s'est inscrit dans la cervelle après des centaines de westerns qui finissent tous pareil, la fin abrupte et sans épilogue, signent une grande oeuvre qui laisse une étrange satisfaction au lecteur. La satisfaction que le pire n'est pas certain, et que tout ne suit pas des schémas préconçus. A lire avant de voir le film qui en a été tiré avec Burt Lancaster.

A noter, la traduction d'Elie Robert-Nicoud, qui a le bon goût de traduire sans chercher à utiliser systématiquement le lexique archi-rabâché du western, et donc de ré-ancrer le livre dans une forme de d'authenticité et non pas dans le terrain de jeu habituel du western.

vendredi 6 mars 2015

Petit Papa Baston



Botte di natale
Terence Hill
1994
Avec Bud Spencer et Terence Hill

Bud Spencer et Terence Hill ont pris un sacré coup de vieux, mais ils n'en sont pas devenus plus raisonnables pour autant. Toujours amateurs d'haricots au lard, toujours très gênés aux entournures quand il s'agit de prendre le thé avec les dames, toujours prompts à faire la sieste n'importe où, toujours assez négligés dans le choix de leurs tenues vestimentaires, toujours détestés par les critiques de Télérama, et surtout, toujours adeptes de baffes tonitruantes pour régler les problèmes en cours. La mécanique du duo est toujours la même, Bud Spencer échafaude des plans que Terence Hill fait rater plus ou moins dans le sens qui l'arrange. Bud Spencer retrouve sa veste en peau de mouton, Terence Hill son cache poussière qui ne le quitte plus depuis Mon Nom est Personne. Il semble que rien n'ait changé dans le petit monde du western fayot, si ce n'est le poids des ans qui ici se fait douloureusement sentir. Terence Hill, si athlétique naguère, semble ici ratatiné, et Bud Spencer, qui imposait alors sa formidable puissance, semble avoir du mal à se mouvoir. La cruauté de dame nature fait mal, décidément, encore plus pour le casting des second rôles comme Neil Summers, qui continue en plus à se prendre des baffes toutes les dix minutes. Autre changement notable, le personnage de Terence Hill n'est plus le super-héros tout puissant qu'il était naguère. Il gaffe, il se plante, son personnage s'est enrichi d'une petite dose de Pierre Richard qui rééquilibre un peu les forces au sein du duo. Enfin, changement d'époque oblige, l'heure n'est plus à l'ironie mordante du western spaghetti. Les années 90 imposent leur sentimentalisme, leur politiquement correct et font de Petit Papa Baston un film pour enfants, consensuel, fréquentable pour tout le monde, avec l'esprit de Noël, le sens de la famille et tout le toutim. A la limite, même si je trouve que ça ne fait pas très Trinita, ça passe assez bien. Quelques séquences sont hilarantes, à l'image de la pendaison de Bud Spencer qui ne se passe pas du tout comme prévu. D'autres sont beaucoup plus poussives, comme la baston finale qui manque de rythme. Vous l'aurez compris par vous-même, Petit Papa Baston est un petit film rigolo pour les nostalgiques d'un cinéma populaire simple et efficace. J'aurais aimé que Terence Hill et Bud Spencer jouent de leur âge dans ce film, style "trop vieux pour ces conneries, mais on va leur montrer aux jeunots que les vieux papys savent encore y faire", mais non, ils font comme s'ils avaient encore vingt ans. Dans leur tête, oui c'est un peu le cas, et dans la notre, grâce à eux, encore dix de moins le temps d'un film...