jeudi 27 août 2009

Appaloosa


Appaloosa
2008
Ed Harris

Avec: Ed Harris, Viggo Mortensen, Jeremy Irons, Renée Zellweger

Ça commence comme dans L’homme aux colts d’or, deux hommes de loi, Virgil Cole (Ed Harris) et Everett Hitch (Viggo Mortensen) avec son énorme calibre prennent le contrôle d’une ville pour mettre une raclée au tout puissant Randall Bragg (Jeremy Irons) qui terrorise la région. On anticipe les problèmes que vont poser cette domination dans la tradition séculaire du remède qui se trouve pire que le mal. On anticipe mal, le sujet est abordé, mais à peine. Voyant une nana débarquer (Renée Zellweger, la Bridget Jones un peu boulotte) on s’attend alors à une lente progression dramatique jusqu’au carnage final, entrecoupé de scènes chiantes à mourir avec ladite nana. On se trompe encore, ce n’est pas une énième mouture de Rio Bravo, car nos deux hommes vont vite se retrouver confrontés à quelque chose qui les dépasse un poil.


Malgré cette propension à déjouer certaines de nos attentes, il ne faut pas s’attendre à une relecture pastiche à la Tarantino, ni à un nouveau détournement blabla du mythe. Ed Harris veut juste faire un western classique, et il le fait bien : pas de coups de feu qui pètent dans les oreilles, pas de scènes d’action survoltées et de montage à la serpe, pas de ralentis cristallins où chaque goutte de sueur brille de milles feux, pas de musique moderne technoïde. A l’image de ce qui se fait dans un certain nombre de westerns récents, la violence est à caractère réaliste, c’est rapide, c’est sec, on se rate, on se blesse. Le réalisateur enchaîne successivement les scènes classiques (gunfight au saloon, enlèvement, procès, intimidation virile un contre cent, convoyage, otage, indiens, duels etc) et les scènes intimistes entre les trois protagonistes (non, je ne veux pas dire les scènes de sexe fougueuses en trio sur musique de Bon Jovi) dans une belle luminosité ocre. Le personnage féminin, dont on se demande comme d’habitude ce qu’il fout là au début, permet de révéler la personnalité des deux héros, les failles dans la puissance monolithique de Virgil Cole, auquel Ed Harris confère une énigmatique fragilité, une espèce d’agréable antipathie. Viggo Mortensen est le narrateur de l’histoire, il est donc plus proche de nous, il observe, et paraît plus humain, mais c’est bien lui qui aura le dernier mot, lui qui agira comme on doit agir dans un western lorsqu’il n’y a plus d’autre solution.
Par son épatant refus de céder aux facilités actuelles de la mise en scène, par son tout aussi épatant refus de nous livrer un western qui serait « intellectuel » (Un film qui rassemble Ed Harris et Jeremy Irons aurait pu en effet nous faire craindre un western qui n’aurait de western que le cadre, théâtre d’expérimentations cinématographiques décousues, ou véhicule trop visible de thèmes contemporains, crainte dont semble se faire l’écho la scène dans la prison où Jeremy Irons entame une discussion littéraire un poil incongrue avant de se faire sèchement rabrouer par Ed Harris), par son efficacité narrative sans fioriture, Appaloosa est indubitablement un bon western, un western pour le plaisir de voir un nouveau western tout simplement, avec ce qu’il faut d’action, de caractérisation, de surprises malgré tout pour ne pas regretter son achat.

Le DVD : les très intéressantes scènes coupées (surtout le prologue) sont de loin ce qu’il y a de mieux dans ce DVD. Le commentaire audio d’Ed Harris, pour ce que j’ai pu en voir, ne dépasse pas les considérations de détail sur le tournage (on apprend malgré tout que les effets spéciaux numériques sont utilisés jusque dans un western comme celui-ci ! Ed Harris affirme aussi que Renée Zellweger ne joue pas une garce comme tout le monde pense, mais alors quoi?) et le making of (Du livre au film) est tout aussi insipide que tous les making of du moment où chacun dit du bien de tout le monde à tour de rôle. Je n’ai pas vu les autres bonus sur la ville d’Appaloosa, les lieux de tournage et Deam Semler, le directeur de la photographie.

En passant, un petit coup de gueule sur cette mauvaise habitude de mettre des bandes annonces en début de DVD : on ne peut pas accéder au menu directement, c'est d'un pénible. Alors OK, on peut zapper chaque bande annonce, mais chaque bande annonce commençant par le logo de la Major, il faut patienter avant de zapper pour être sûr que c'est une bande annonce. Ensuite, on a de la chance si on ne subit pas un message anti-piratage ou un message nous indiquant de réclamer notre argent si jamais un indélicat nous avait loué le DVD, puis re-logo, et enfin le menu animé arrive, menu qui peut aussi mettre quelques secondes à déployer son inutile animation. Vous lancez le film, surviennent à nouveau trois ou quatre écrans fixes de toutes les boites de prod ayant officié sur le film, et enfin vous avez le générique. Putain, quand tu veux revoir une scène pour référence ou pour le plaisir, faut être patient!

mercredi 26 août 2009

O'Cangaceiro


O’Cangaceiro
1969
Giovanni Fago

Avec: Tomas Milian, Eduardo Fajardo

Le western révolutionnaire, on le sait depuis qu’il existe, est, non sans ironie, fortement marqué à gauche. Dénonciation de l’impérialisme américain, des dictatures fascistes et du capitalisme. Aujourd’hui, la tendance analytique (qui va bien dans le sens du vent du moment) est de gratter sous la caution prolétarienne et de mettre en avant ladite ironie qui montrerait que les réalisateurs de westerns zapata ne croyaient pas à leur discours, employant donc une sorte de sous-sous-texte pour dire finalement, rien ne marche, on ne croit qu’en l’individualisme, et encore. Comme un genre de western nihiliste quoi : le capitalisme, tout ça c’est pas bien, mais faut faire avec, la révolution ne changera rien, comme le chantait Renaud : « ils font la fête au mois de juillet, en souvenir d’une révolution qui n’a jamais éliminé, la misère et l’exploitation ».

O’Cangaceiro ne déroge pas à la règle. La phrase clé est bien sûr cette remarque de l’ingénieur hollandais (Ugo Pagliai) sur le fait que si son entreprise peut faire des bénéfices en hausse de 80%, c’est bien parce que les pauvres n’ont rien à bouffer. Là, le film est dans le cadre. Et pourtant à la fin, Espedito (Tomas Milian) abandonne la lutte, genre ça ne sert à rien, tu peux toujours tuer un gouverneur ou deux, ça ne changera rien, la gangrène capitaliste est bien installée, pour régler ça il faudrait amputer sévèrement, voire couler le pays entier. Le film sort du cadre, Espedito s’en va, l’ingénieur hollandais s’en va aussi, leur conscience politique à tous les deux a évolué vers un ni-ni, on arrête tout et on s’efforce de survivre dans un monde de merde. Mais il faut dire que la révolution d’Espedito était d’emblée apolitique, à l’image de ces chefs de pillards qui se proclament général dans Companeros ou Saludos Hombre, avec en plus un coté mystico-chrétien-crétin souligné par son titre ridicule de Rédempteur.
Tout cela serait proprement à bailler d’ennui si on n’avait pas affaire à un petit western zapata de bonne tenue. On peut bien sûr lancer le débat sur cette dénomination puisque l’action se déroule au Brésil et n’est donc pas à classer dans la catégorie Western, mais honnêtement, je ne vois pas grande différence avec le genre, à deux ou trois détails près : les décors sont Brésiliens puisque le film a été tourné là-bas, on voit donc une végétation assez luxuriante, et le casting est brésilien aussi et tranche pas mal avec les gitans d’Almeria par sa couleur noire de peau. Enfin, les cangaceiros ont un joli costume. Mais pour le reste, l’armée se fait décimer, Tomas Milian joue toujours bien l’abruti exalté, Eduardo Fajardo est un méchant toujours excellent, et l’européen de rigueur est là (tiens, un Hollandais cette fois !) pour être confronté à la population locale (savoureuse scène de la voiture démantelée). Rien de bien neuf donc, mais que du plaisant, les bases sont là, mais avec une couleur un peu plus exotique, un peu comme lorsque Carlos Nuñez revisite le Boléro de Ravel. Deux belles scènes comme on en verrait plus dans le cinéma commercial d’aujourd’hui surnagent : celle où l’ingénieur hollandais lit Lord Jim de Joseph Conrad toute la nuit aux Cangaceiros (Je n’ai pas vraiment trouvé de résonance fracassante entre ce livre et le thème du film), et celle où le même ingénieur hollandais parvient au campement d’Espedito en suivant une piste formée d’hommes dans leurs hamacs. Belle conclusion sans doute, sous cette superbe et lancinante et brésilianisante musique de Riz Ortolani : la révolution ? Peuh, après la sieste !

Où le voir : DVD Wild Side, image propre mais VF foireuse à éviter, les voix sont étouffées voire inaudibles, passez donc la version italienne. Si vous êtes myopes et incapables de lire les sous-titres, vous êtes dans la merde. Deux bonus dans le coffret. Un entretien avec Giovanni Fago qui parle de son parcours, de son amour du cinéma et du Brésil, et de ses souvenirs sur le film. Très intéressant et émouvant. Le deuxième bonus est une intervention croisée de Noël Simsolo, Jean-François Giré et Jean Baptiste Thoret, les trois hommes retraçant les tenants et les aboutissants du western zapata. Noël Simsolo (auteur des Conversations avec Sergio Leone) place la barre assez haute en employant des mots comme "Brechtienne", Jean-François Giré se fait plus accessible mais n’apprendra pas grand-chose à ceux qui ont lu son livre, quant à Jean Baptiste Thoret il présente la thèse assez simpliste que le western américain n’a pu survivre que grâce au western spaghetti (quand on voit Major Dundee qui date de 64, on peut légitimement en douter) et va jusqu’à dire que La Horde Sauvage est un western spaghetti tourné en Amérique, affirmation qui me plairait énormément s’il s’agissait d’une provocation pure et simple, mais qui semble ici lancée de façon bien candide.

Image: western movies

lundi 24 août 2009

Les Colts de la Violence


1967
Mille dollari sul nero
Alberto Cardone
Avec: Anthony Steffen, Gianni Garko

Ça commence avec un gros plan sur la trogne en sueur d’Anthony Steffen, c'est-à-dire que ça commence de la façon la plus parfaite qui soit. On sait déjà qu’on va avoir droit à un film mal foutu, mal joué, mais qu’on va adorer ça. C’est le masochisme propre au genre. Une musique trompetissante s’élève sur les montagnes rocailleuses grisâtres d’Almeria, des détonations de Winchester retentissent à l’infini et notre homme fait mine de tomber. Le western spaghetti se décortique en motifs élémentaires insécables et incontournables : une musique, un homme qui tombe, une baston, puis sans transition, une pauvre loque qui se fait humilier, des sales gueules qui rient bêtement, un fouet qui claque. Les ingrédients sont là, le liant est le talent du réalisateur, la crème italienne prend où ne prend pas, je l’ai déjà dis ailleurs, tout est affaire de dosage, de talent, de respect du matériau. Le motif des sales gueules qui rient peut être glaçant s’il est placé en cours d’intrigue, que le tabassé paraît réellement souffrir, que les rires sont raccords avec les coups et le contexte ; il peut être ridicule s’il est placé dès le début du film, que le type qui se fait humilier est pour le moment inconnu, et que les rires semblent déconnectés des humiliations délivrées ou disproportionnés par rapport à leurs effets. Le talent est bien peu de chose, pourquoi en 1964 dans un film à petit budget, Clint Eastwood porte une tenue étudiée et splendide qui est encore aujourd’hui reconnue par n’importe quel quidam, pourquoi en 1967 dans ce film au budget sans doute comparable, Anthony Steffen a-t-il l’air encore plus pouilleux que d’habitude, vêtu éternellement des mêmes habits, sales, communs et si uniformes que les frontières entre le pantalon, la chemise et la veste deviennent indistinctes, comme si l’homme était moulé dans une coque beige inamovible et peu importe le film ? Avec si peu de soin porté au détail, Alberto Cardone peut bien situer le repaire du méchant dans un genre de temple précolombien pour provoquer un émoi esthétique, la maïzena fait des grumeaux au lieu de faire une crème fluide !

Mais comme pour Gringo joue sur le rouge du même Alberto Cardone, les grumeaux sont savoureux, et surtout totalement latins : la haine entre frères, la désintégration du noyau familial dont la mama parvient malgré tout, un temps, à empêcher le massacre, les dialogues extrêmement théâtraux et purement fonctionnels (Le « tu bois beaucoup trop » de Steffen à sa mère alors qu’il ne l’a pas vue depuis 12 ans), les traumatismes divers et variés, les situations outrées à la limite du ridicule, tout concourt à mettre en scène cette dramaturgie du désespoir si chère au genre. Et si Anthony Steffen est le même modèle de non jeu qu’il est d’habitude, Gianni Garko explose dans le rôle du méchant Sartana, instable, inquiétant, provocateur et fou, et grâce à lui, le film passe de justesse au cran supérieur. La mère est folle aussi, la fiancée est résignée, son frère est fou et muet, le reste du casting a peur de mourir, va mourir ou est déjà mort, les contre-plongées donnent le tournis, les mises à mort, que ce soit celle de la mère, celle du juge ou celle du type qui jouait le frère de Ramon dans Pour une poignée de dollars, durent, saignent, suent, dégoulinent de pathos mélodramatique jusqu’au bout des ongles recroquevillés. Ils sont tous en enfer et le spectateur est aux anges. J’aimais déjà beaucoup Gringo joue sur le rouge malgré une pile de défauts a priori insurmontables, j’aime autant Les colts de la violence, parce que malgré les décors fauchés, malgré la fausseté de certaines situations, malgré le ridicule, l’ennui ne pointe jamais son nez, et Alberto Cardone met tout son cœur à l’ouvrage pour apporter sa pelletée de torchis au boueux mais flamboyant édifice qu’est le western spaghetti.

Affiche: Western Movies
Merci à Sartana pour le film

vendredi 21 août 2009

Ernest Borgnine dans Urgences


Ceux qui sont fan d'Urgences n'auront pas manqué dimanche dernier l'épisode 19 de la saison 15 qui fait joliment revenir tout un tas de beau monde: le docteur Benton (Eriq La Salle), le docteur Doug Ross (Georges Clooney), ainsi que Carol Hattaway (Juliana Margulies). Un épisode solide donc en apparitions de pointures, pour une ultime saison qui joue du lourd dans le domaine de la nostalgie. Les fans d'Urgences qui seraient en outre fans du Thelma et Louise de Ridley Scott n'auront pas raté la prestation de Susan Sarandon en guest star dans ce même épisode! Et les fans d'Urgences et de Thelma et Louise qui se surprendraient en outre à vouer un amour immodéré pour le western auront été ravis de l'apparition, toujours dans ce 19e épisode, du grand Ernest Borgnine, 92 ans, en vieillard qui accompagne sa femme mourante à l'hosto. Evidemment, il ne manie plus la mitrailleuse dans cet épisode, encore moins que dans Blueberry, et son apparition assez rapide est surtout l'occasion de se rendre compte que oui, les oreilles ça continue vraiment à pousser toute la vie, et que si un jour on veut augmenter l'espérance de vie jusqu'à 200 ans il faudra sérieusement se pencher sur ce problème.

La bonne nouvelle c'est qu'il revient notre Ernest, dans le dernier épisode de cette quinzième et dernière saison d'Urgences, et qu'il aura sans doute un peu plus de grain à moudre puisqu'il semblerait qu'il ait été nominé pour un award quelconque pour cet épisode. A dimanche 23 août sur France 2, donc...

mercredi 19 août 2009

Sierra Torride


Two Mules for Sister Sara
1970
Don Siegel
Avec: Clint Eastwood, Shirley MacLaine

Clintou sauve une nonne du viol et va l’aider à combattre les français au Mexique. Sergio Leone avait deviné la véritable identité de la nonne au bout de dix minutes. Si vous n’êtes pas Sergio Leone, ou si vous n’avez pas son intelligence supérieure, je vais essayer de ne pas spoiler la fin, sinon, vous voilà prévenus.

Clintou a bien sûr une place à part dans mon panthéon en plâtre. Après avoir vu la trilogie des dollars, je fus déçu de découvrir que Leone n’avait réalisé que cinq westerns, mais je fus bien aise d’apprendre que Clintou avait tourné un certain nombre de westerns du même acabit dans sa carrière ultérieure. Du même acabit, voire, car l’acteur/réalisateur prit bien soin de ne pas faire la même chose qu’en Italie, des westerns comme Josey Wales, Unforgiven ou L’homme des hautes plaines, malgré d’évidentes influences, prennent une ampleur autre, et ne manqueront pas de décevoir les amateurs qui rechercheraient des duplicatas des films de Leone. D’autres westerns, comme Pale Rider ou ce Sierra Torride peuvent néanmoins constituer une sorte de passerelle, les chaînons manquants entre les films de Leone et les westerns plus ambitieux d’Eastwood.

Sierra Torride, donc, avec sa musique signée Ennio Morricone, son mercenaire solitaire barbu qui allume ses cigarillos et ses fulgurances d’action violente se rapproche en effet grandement de ce que Clint a pu faire en Italie, le tout ficelé dans une ironie mordante qui ne dépare pas le morceau, à l’image de ce bestiaire initial (puma, crotale, tarentule), placé là pour montrer que le film qui débute va être sans concession. Mais dès que la tarentule se fait grossièrement aplatir par le sabot du cheval de notre homme sans nom, on comprend également que tout ceci n’est pas à prendre vraiment au sérieux. Sierra Torride s’oriente rapidement en effet vers la comédie, sitôt que Shirley MacLaine a remis ses oripeaux (on remarquera d’ailleurs qu’elle est plus belle en nonne, les cheveux cachés) la confrontation entre elle et lui entrainera une succession de gags verbaux assez drôles, tous basés bien sûr d’une part sur l’inadéquation primaire d’une nonne avec ce milieu hostile, et d’autre part sur le décalage entre le comportement attendu d’une nonne et celui de son usurpatrice. Ce qui permet à Eastwood de nous servir à loisir son rictus désormais légendaire, mélange de mâchoire serrée et de regard incrédule, qu’il n’avait pas eu tellement l’occasion de peaufiner chez Leone tant il était occupé à faire passer son bout de cigare d’une commissure des lèvres à l’autre. Shirley MacLaine elle, n’est pas avare de son talent, elle minaude, elle fume, elle boit, elle aiguise sa répartie et casse des flèches. Je ne crois pas avoir vu d’autres films avec elle, mais quand on parle de ce film avec les anciens, ils disent « Ha oui, avec Shirley MacLaine », mais pourtant, ils ont du mal à citer un autre film dans lequel elle aurait joué. Comme si la renommée d’une actrice ou d’un acteur pouvait se faire indépendamment de ses films… En attendant de découvrir quelques uns de ses autres films, je ne me prononcerai donc pas.
Le reste du film se suit vraiment bien, on rit, on prend du plaisir à suivre toutes les péripéties et les retournements de situation, ainsi que la progression du rapport amoureux entre les deux têtes d’affiche, sans oublier la parodique musique d'Ennio Morricone. Et rien d’autre. Don Siegel suit le scénario de Budd Boetticher et n’y apporte aucune épaisseur, aucune consistance, aucune réelle noirceur comme il le fit pourtant pour les films précédant et suivant ce film dans sa filmographie : les grinçants Un Shérif à New York et Dirty Harry, ainsi que l’atypique Les Proies. Seule une scène d’exécution tente très fugacement de faire passer un début d’émotion qui soit autre chose qu’un chatouillement de zygomatique ou d’adrénaline : un mexicain se fait fusiller, et l’on voit clairement sur le visage de l’un des soldats français la détresse de l’acte accompli, l’horreur de la situation. C’est rapide et ça passe vite, l’attaque finale, à base de dynamite, de coups de machete gores et de soldats virevoltants revient dans un cadre purement entertainment et remplit son office comme on l’attend. Et Eastwood peut enfin se taper la nonne, de façon il est vrai assez peu élégante. Si Sierra Torride est loin de valoir les meilleurs films d’Eastwood, s’il n’arrive jamais à la cheville des Leone et s’il est même inférieur aux meilleurs films de Siegel, il se situe néanmoins à la croisée de toutes ces personnalités, une sorte de récréation réussie, un patchwork bien digeste qui remplit bien le ventre sans filer la colique.

Où le voir : hooo, z’êtes grands non ?
Capture: Mariaque sans son aimable consentement, mais dont vous pouvez lire l'avis ici

lundi 17 août 2009

La mission du commandant Lex


Springfield Rifle
1952
André De Toth
Avec : Gary Cooper, Lon Chaney Jr.

Les traducteurs français font vachement fort puisqu’ils gâchent l’une des deux surprises du film avec leur titre idiot. Le commandant Lex (Gary Cooper) est condamné et chassé de l’armée pour lâcheté, mais il s’agit d’une opération undercover, d’une mission comme le précise donc le titre français, pour pouvoir infiltrer une bande de pillards qui mettent en péril l’approvisionnement en chevaux des nordistes. Gary Cooper quitte donc prestement son uniforme, et c’est dommage, il avait une belle prestance avec sa vareuse lourde sur son cheval qui évolue lentement dans la neige. Heureusement, il reste la surprise du traître pour nous faire patienter, si le titre avait été La mission du commandant Lex pour démasquer le traître qui n’est autre que xxx, on n’avait plus besoin de voir le film. Car il s’agit finalement, malgré le casting prestigieux, d’un western de série B bien réalisé, dont l’action et le suspense ne faiblit pas, mais qui offre peu de substance autre que l’intrigue elle-même. Le personnage de Gary Cooper paraît avoir une personnalité assez complexe, il semble avoir quelques sympathies pour le Sud, mais c’est bien le tout. La conclusion finale reste quand même vive l’armée, vive le contre espionnage, et vive le Nord. Comme bien souvent, le western américain se range du coté des vainqueurs et n’esquisse aucun début de réflexion sur cette guerre qui fut la pire de l’histoire des Etats-Unis. Mais soyons honnête, ce n’est pas du tout ce que l’on demande à ce type de film, on demande une histoire bien ficelée, des rebondissements, du suspense et de l’action, c'est-à-dire peu ou prou le même cocktail que tous les westerns de série B des années 30 et 40, mais avec plus de moyens. Le traître doit montrer une totale absence de scrupules et c’est le cas, l’un des méchants doit être moche et comique, c’est bien le cas de la gueule tordue de Lon Chaney Jr., et bien sûr le héros peut compter sur ses potes de l’armée qui le suivront et le soutiendront même si toutes les circonstances aggravantes semblent être contre lui. Comme il se doit, le héros poursuit le baddy à la fin, exactement comme Roy Rogers/Gene Autry/Tim McCoy/Tex Ritter le font à la fin de leurs petits films, mais le coup du chapeau, bien qu'éculé, est filmé tout de même avec plus d'intensité qu'il ne le serait dans une de ces authentiques séries B.
Les "motifs" de la série A sont tout juste émergents: le passé un peu trouble du héros, sa relation tendue avec sa femme, la fuite de son fils, le thème du progrès en matière de guerre (contre espionnage et fusils Springfield). Gary Cooper est impeccable, bien que déjà un peu vieillissant et André De Toth film comme un pro, mais sans faire d’étincelles. Bref, tout va bien dans le petit monde du western sans heurt et sans reproche !

Où le voir: il a été diffusé en VF en décembre 2008 sur France 3. Comment, vous ne l'avez pas gravé??

Image: Western Movies