dimanche 8 novembre 2015

Les Sept Mercenaires


Il y avait longtemps que je n'avais pas revu cet incontournable western américain, mais c'est comme si je l'avais vu hier. Je me rends compte que chaque plan du film est à ce point gravé dans ma mémoire que quand je le revois, je suis incapable de prendre du recul sur le film. Il s'ensuit que Les Sept Mercenaires n'est pas pour moi un film que l'on juge, c'est devenu, comme pour les contes, une sorte d'acquis culturel  au même titre que Pierre et le Loup ou Le Renard et Le Corbeau. Une oeuvre qui est si universelle qu'on ne la remet pas en question. Qui s'amuserait à faire une critique en bonne et due forme du Petit Chaperon Rouge? Qui va pointer le simplisme des caractères des héros des Trois petits Cochons? Qui fera remarquer que les moments d'introspection sont artificiels dans Le Petit Poucet? Les Sept Mercenaires se trouvent là, bien installés le cul sur leur piédestal d'oeuvre populaire indépassable, si linéaire et efficace qu'on n'en voit pas les baisses de rythme, ni les incohérences, ni les facilités. Non vraiment, ne comptez pas sur moi pour dire du mal de ce western brillant, archétypal, inévitable et super chouette. Yul, Charles, Steve et James, et Eli, bien sûr, Eli, qu'on a toujours plaisir à revoir tous, même pour la millième fois, la musique qu'on a toujours plaisir à entendre, les scènes d'introduction, le laïus sur le courage asséné par Bronson aux gamins, tout est bon, tout est toujours là où on l'avait laissé la dernière fois. Les Sept Mercenaires, ça fait partie de la famille, c'est comme un meuble qu'on voit sans y faire attention. Ils sont là comme une évidence, et puis c'est tout! 

mardi 20 octobre 2015

American Sniper



American Beauty, American Psycho, American History X, American Nightmare et maintenant American Sniper. De ce côté ci de l'atlantique, on trouve ça classe quand on rajoute le mot "American" devant un titre, ça rajoute tout de suite une espèce d'aura au film, liée sans doute à notre admiration sans cesse refoulée pour le pays de l'oncle Sam.
En l’occurrence, il s'agit bien ici d'un sniper américain qui dégomme des irakiens à distance. Vertige de la distance à la cible qui pose bien souvent la question de la responsabilité morale face à ses actes. Si le sniper de ce film a une réelle envie d'en découdre et n'hésite pas à aller au front avec ses camarades, qu'en est-il de ceux qui tirent à distance de très loin, sans être jamais en danger? Et si le maniement d'une telle arme requiert au moins d'être sur le terrain, au quotidien avec les hommes, qu'en est-il des pilotes de drone qui tuent à 10 000 km de leur "lieu de travail"?
Car s'il est une chose qui transparaît nettement dans ce film, comme dans la plupart des films de guerre américains récents, c'est la disproportionnalité des forces en présence. Les américains ont un équipement sophistiqué, des armes de pointe et un appui aérien. Les insurgés roulent en R12, n'ont pas de casques et ont une tactique de guerre ignoble: envoyer des enfants faire sauter les convois et tuer les collabos à la perceuse. Difficile de faire le tri dans tout ça, entre une guerre illégitime d'une part, des dictateurs sanguinaires d'autre part, des fanatiques religieux inhumains à droite, du pétrole à gauche. Ce serait bon de pouvoir choisir son camp naturel sans se poser de question (surtout quand lesdits fanatiques assassinent flics, juifs et humoristes chez nous), mais voilà, le cerveau humain se pose toujours des questions, et il est bien emmerdé quand il n'y a pas de réponse claire.
Clint Eastwood n'en a absolument rien à faire de tout ça. Il veut, apparemment, montrer les effets de la guerre sur l'être humain, sujet qui, au passage, a déjà été traité des centaines de fois (je me reverrais bien un Cimino moi tiens...). Il prend un cas cinégénique,  un sniper légendaire qui a tué au moins 160 irakiens. Celui-ci semble sûr de son coup, ne tremble légèrement que quand il doit tuer un gosse, a ce regard absent des vétérans quand il rentre chez lui. Pas parce qu'il est traumatisé, mais parce qu'il veut y retourner sans plus attendre. Autour de lui, il y a beaucoup de gens qui doutent, mais pas lui. Au final, il réussit à raccrocher en s'occupant de gueules cassées et en retrouvant ses bottes de cowboy dans un placard. Eastwood a édulcoré le personnage de la vraie vie, qui était bien plus radical que dans le film. Il lui a adjoint un adversaire à sa mesure, un sniper irakien redoutable, histoire d'avoir une vraie histoire. Le fait que cet irakien n'ait jamais eu en réalité le rôle décrit dans ce film, est le symptôme même d'une guerre moderne non télégénique. Comment filmer une guerre sans méchant réellement identifié, à la réalité complexe, insaisissable, et forcément décevante: pas de victoire à fêter, pas de batailles rangées au dénouement clair et net, juste du chaos interminable. Le sniper irakien personnifie l'ennemi, donne un but au héros alors qu'en réalité il n'en avait pas.
Il procure une péripétie cinématographique au film, mais quitte à se divertir avec un combat de sniper, Stalingrad de Jean-Jacques Annaud était bien plus rigolo. C'est que l'affrontement entre snipers n'est pas l'enjeu de American Sniper. Quel est cet enjeu alors? Je suis bien en peine d'en trouver un. Eastwood filme son histoire sans juger, montre les effets de la guerre sur le vétéran, sur son couple, qui finit par s'en remettre plus ou moins. Quel est le message? Il n'y en a pas, Eastwood est juste un témoin. Il montre, sans prendre parti, et c'est déjà une force en soi. Mais ce n'est pas suffisant. Je ne comprends pas bien pourquoi American Sniper est devenu le plus grand succès de son auteur. Comme d'habitude avec Eastwood, c'est bien filmé, net, lisible, pas tape à l’œil pour un sou, on ne s'ennuie pas, mais il manque son humour et son ironie habituels. De ce point de vue, je réfère largement Gran Torino, auquel Eastwood apporte son jeu d'acteur bougon et sympathique. Bradley Cooper n'exprime pas grand chose, on a du mal à s'identifier à lui. Son caractère buté et sûr de son droit en font un personnage de cinéma proche d'un Burt Sullivan qui veut apporter la justice coûte que coûte. Mais un tel personnage, avec une conception de la justice simpliste dans une réalité aussi complexe pose question, remue et dérange, et on ne peut pas adhérer au personnage.  On devient alors juste témoin du destin d'un soldat, qui certes tire très bien, mais dont Eastwood n'a pas su révéler grand chose d'autre que cette faculté balistique supérieure! 

samedi 17 octobre 2015

Mad Max - Fury Road



Je me souviens encore des critiques Télérama des Mad Max dans les années 80, elles évoquaient des films affreux, véritables éloges de la laideur et puits sans fin de violence gratuite et d'auto-défense coupable. Dans les années 90, ces films commençaient à être réhabilités, je vis alors Mad Max 2 et j'aimai franchement cette course de camion incroyable, ce monde anarchique et violent, ce nouveau terrain de jeu propre à renouveler l'univers du western spaghetti. Mad Max alors, c'était le top du culte, encore que je trouvais déjà que le premier avait beaucoup vieilli. Aujourd'hui, je n'ai même pas voulu revoir la trilogie avant de voir ce quatrième opus, de peur que ces films accusent leur âge et leur budget, de peur qu'ils soient ringardisés par Miller lui-même.

Pourtant, le cinéaste australien a juste fait ce dont tout le monde rêvait : prendre la course de camion de Mad Max 2, et l'étirer littéralement sur tout un film, sans prétendre à autre chose qu'à ça. A part une séquence de 10 minutes à partir de 1h 14m et 27s où il ne se passe plus rien et pendant laquelle on se fait royalement chier, ce n'est que action, action et action. Les véhicules les plus improbables se coursent les uns derrières les autres, les personnages sautent sans arrêt des bagnoles aux camions et vice versa, certains perchés sur d'immenses bambous flexibles, au milieu des motos qui virevoltent et balancent des cocktails molotov à tout va et provoquent des accidents spectaculaires. En bref, du Mad Max pur jus, pendant deux heures, le tout agrémenté de péripéties plus classiques : bastons, véhicules ensablés, tempête extra-solaire. Bien sûr, Miller déploie dans ses plus grandes largeurs son bestiaire déjà bien développé il y a trente ans: difformités monstrueuses, que ce soit chez les puissants ou chez les exclus, colosses gigantesques et guerriers grimés, scarifiés et tatoués. Les peaux sont tendues et desséchées, les pustules et les ganglions de toute sorte déforment leurs silhouettes. Ces exacerbations de cour des miracles portent tous des costumes extravagants faits de bric et de broc, selon une industrie de récupération à grande échelle, qui donnent au monde de Miller sa poésie du pittoresque si chère aux aficionados du western spaghetti. Les habitants de la petite géographie Millerienne sont tous des guerriers intrépides, bravant en permanence le danger, aucun ne semble avoir peur de la mort,on les voit tous éviter les divers objets contondants qui les menacent à chaque instant par simple instinct de survie, mais pas par peur de la mort. Les femmes sont à l'avenant, en premier lieu, bien sûr, Furiosa qui se couvre de peintures de guerre à la graisse de moyeu pour ne pas que l'on discerne sa fragilité dans son regard ; jusqu'à ces femmes pondeuses, qui, bien que constituant, par leurs seules silhouettes longilignes de mannequins des années 90, une première faute de goût de ce film au demeurant très réussi, n'en deviennent pas moins elle même des guerrières affrontant tous les dangers car c'est tout simplement le monde dans lequel elles vivent.
Depuis le premier opus, bien de l'eau a coulé sous les ponts dans le petit musée des horreurs cinématographiques. Miller ne tente pas de surenchérir dans le nauséabond et le malsain, il essaye au contraire de sublimer son univers qui a été décliné ad nauseam depuis trente ans. Les séquences glauques sont minimalistes, les morts violentes et gores sont filmées hors champ pour la plupart. La vie de Mad Max reste violente, mais elle apparaît moins cruelle que dans les premiers opus où l'on n'hésitait pas à crucifier ou à violer à la cantonade. Dans Fury road, les prisonniers sont - relativement - bien traités, les femmes sont des objets mais ne semblent pas titiller l'appétit masculin plus que ça, et par ailleurs, années prudes obligent, vous ne verrez pas un bout de sein à l'horizon.
Miller se concentre uniquement sur l'incessant ballet des véhicules qui ondulent au fil des dunes et s'applique à mettre en scène des accidents les plus spectaculaires possibles. Il y arrive fort bien, refusant dans la plupart des cas la facilité du tout numérique, et réussissant à rendre crédibles la plupart des effets spéciaux, là où d'autres auraient accouché d'une infâme bouillie numérique - c'est une franche réussite à ce niveau là, à une ou deux exceptions près toutefois, dont la séquence de la tempête dans son intégralité, qui, tout en étant assez belle visuellement, est assez ratée sur le plan de la pure vraisemblance technique ; le personnage Nux regardant, en extase, les avatars numériques de ses potes emportés dans les tourmentes pixelisées, comme un gamer qui se repasserait le replay de ses prouesses sur son jeu favori. Mais à part ça, tout ce qui se casse se casse de fort belle manière, et la scène de l'autoroute de Matrix Reloaded, souvent citée en exemple et que moi-même j'avais appréciée, vient, avec la sortie de ce Mad Max, de repasser de la section Cinéma à la section GTA.
Pour le reste, c'est du Mad Max très réussi, les scènes d'action sont très efficaces narrativement, puisqu'on suit en général plusieurs personnages évoluant de part et d'autre du convoi, parfois sur plusieurs véhicules à la fois, sans jamais que l'on ne perde le fil ni que l'on soit sorti de la scène par un effet raté ou une invraisemblance criante. C'est du cinéma d'action à l'ancienne, mais porté à son paroxysme, sans effet d'accéléré, sans découpage brutal et illisible, avec suffisamment peu de ralentis pour ne pas couper le rythme si exigeant d'une séquence réussie. Mad Max Fury Road donne l'impression de reprendre là où Speed ou Die Hard 3 s'étaient arrêté et de faire oublier des années de maelstrom fatigants tels que Transformers ou Pirates des Caraïbes. On n'en ressort pas épuisés comme dans ces actioners récents, pour preuve je l'ai revu une deuxième fois immédiatement après la première, juste pour savourer le montage et le rythme, juste pour retrouver le plaisir de l’enchaînement des séquences.
Pour autant, Mad Max est loin d'être un grand film, il ne véhicule rien d'autre que de l'adrénaline, il dispose d'un personnage principal incroyablement mou et sans une once de charisme, au point que j'aurais largement préféré Mel Gibson dans le rôle malgré son âge, plutôt que cet ersatz sans âme et gras du menton. Furiosa, jouée par Charlize Theron est effectivement largement plus intéressante, mais ce ne sont certes pas les dialogues de ce film - qui n'a pas dû coûter cher en doubleurs - qui révèlent le plus sa personnalité. Ce sont les non-dits, les silences et les regards qui permettent au spectateur de lui façonner une histoire, un vécu et un capital sympathie intéressant. Bref, c'est le spectateur qui travaille le plus pour combler les manques narratifs, et finalement c'est aussi bien comme ça. Même si le film fourmille de petits détails bien sentis (le volant en tant qu'objet de culte à part entière, le chrome sur les dents, ce moment surréaliste où les belligérants crachent de l'essence dans leurs moteurs pour aller plus vite), il peut parfois donner l'impression d'aller trop loin dans le portnawak (le guitariste métalleux navrant à l'avant de l'une des voitures) ou nous saouler avec les visions répétitives de Max qui perturbent le récit au lieu de donner la profondeur voulue au personnage. On constate que le film manque également singulièrement d'humour, à part quand Max récupère tous les flingues planqués dans le camion, qui n'est qu'une redite du début du troisième opus.  Tous ces petits loupés parasitent le film, pas au point de faire faiblir sa locomotive principale, la vitesse, mais ce sont bien des parasites dans un film qui aurait presque pu être un film concept du film d'action à l'état pur. On pourrait imaginer un Mad Max 5 qui démarre directement par la poursuite, sans scènes d'introduction, sans explications préalables de qui poursuit qui et pourquoi. La poursuite, les combats et les péripéties se poursuivraient sans aucun dialogue autre que purement fonctionnel, pas de pause introspective, rien pour venir perturber l'action pure. Les tenants et les aboutissants de la poursuite se révéleraient d'eux mêmes au fur et à mesure des moments de bravoure qui iraient crescendo vers un feu d'artifice final où l'on comprendrait naturellement le fin mot de l'histoire, sans avoir eu besoin d'un seul temps mort. 
On aurait alors vraiment un pur film d'action, quand les films d'action dont on dit qu'ils sont des "purs films d'action" sont en général bavard à 60%. Mais par pitié, trouvez un autre acteur pour Max!

dimanche 6 septembre 2015

Drive


Drive
2011
Nicolas Winding Refn
Avec: Ryan Gosling

Comme la cavalerie, j'arrive quatre ans après la bataille sur ce film. Vous vous en souvenez peut-être, il y avait comme un bourdonnement à l'époque de sa sortie, c'était le genre de film dont on nous dit "C'est bizarre comme film, mais franchement, c'est pas mal", que l'on traduit en général par: "Le réalisateur a embrassé un certain nombre de partis-pris esthétiques pas très mainstream, mais il a quand même mis une bonne dose de violence ou de sexe pour qu'on trouve ça bien". Normalement, j'attends quatre ans avant de me décider à regarder ce type de film, et parfois, comme dans le cas présent, la distance temporelle permet d'apprécier rétrospectivement certaines évolutions du quotidien. 
Notamment, je comprends mieux aujourd'hui pourquoi certains conducteurs de Golf démarrent pied au plancher au feu vert, avec un flegme insupportable, pour se rabattre comme des merdes à 70 km/h sur la file de droite de la rocade, après avoir séché ma Clio 1.2 RTE sur place. Rebelote au péage de l'autoroute A83, dès la barrière levée ils accélèrent le plus rapidement possible, tout en mâchouillant quelque chose d'indéfinissable, avant d'être brutalement rappelés à l'ordre par leur limiteur de vitesse calé à 138 km/h, 4 km/h au dessus de la limite pour compenser l'imprécision de leur compteur, auxquels ils ajoutent 4 km/h pour prendre en compte les 5 km/h de l'incertitude des radars de la Gendarmerie. Le lecteur toujours attentif à ce stade notera que ces conducteurs de Golf pourraient donc régler leur limiteur à 139 km/h, mais, rebelles sans l'être vraiment, ils se gardent une marge de confort pour pouvoir écouter tranquillement "You're a real hero" sur leur autoradio de marque JVC, le regard mutique mais les gestes précis.
Je ne peux pas dire précisément si j'ai aimé le film ou pas. Le héros, quoique ténébreux à la mode spaghetti, manque de carrure et de crédibilité. Son attitude taciturne semble plus liée à une anomalie chromosomique qu'à une réelle prise de hauteur sur le monde réel. L’héroïne nous fait des petits regards meugnons, elle a une coupe moderne et elle est sexy sans être trop sexe, belle tout en restant girl next door, pour que tout héros réel normalement constitué ait envie de se la culbuter au ralenti sur la table de la cuisine tout en voulant la protéger pour toujours de ces méchants mafiosi issus du cinéma américain des années 70. Notre héros se sent protecteur, mais sans raison identifiée autre que l'anomalie chromosomique précédemment sus-citée, il ne baise pas, sauf si j'ai loupé la scène de sexe au moment où je suis allé me chercher un yaourt dans le frigo. En tout cas, c'est décevant, pas que je sois friand des habituelles scènes de sexe que le cinéma hollywoodien nous ressort ad nauseam, mais je me disais que dans ce film peut être, on pourrait avoir un début de scène intéressante. Mais non, pas de sexe, c'est sale et ce n'est pas bien. Montrer un mec qui plante une fourchette dans la gueule d'un type comme dans les Affranchis, ça ne pose pas de problème. Montrer un gars qui coupe une artère d'un autre gars en le rassurant pendant qu'il meurt, c'est pas grave. Montrer le héros qui pulvérise le crâne d'un méchant dans un ascenseur, ça ne gêne aucun censeur! Mais montrer un bout de téton dans un film, c'est tout simplement impensable! Mais ça, on a tellement l'habitude, cette hypocrisie versus cette violence acharnée, qu'on finit par ne plus faire attention. 
La scène de l’ascenseur, c'est une des presque belles scènes du film. Le héros descend au sous-sol avec sa girl next door. Il y a aussi un méchant dans l'ascenseur. Notre héros prend le temps de longuement embrasser la fille. Le mec le laisse faire. J'ai trouvé ça génial, quelque soit l'interprétation que l'on donne au truc. On peut y voir une invraisemblance assumée, une ellipse temporelle pendant laquelle le héros crie "pouce", on peut y voir un méchant qui aurait le sens de l'honneur, quelque chose qu'on ne voit plus au cinéma, comme le général Santa Anna qui laisse partir femmes et enfants de fort Alamo, sans massacrer, ni violer, ni empaler, ni écorcher personne. Cette bonté d'âme est devenue impossible chez un méchant aujourd'hui. Hitchcock a déclaré un jour qu'il n'y avait pas de film réussi sans méchant réussi. Il aurait mieux fait de se taire, parce que tout le monde a cru que cela voulait dire un méchant vraiment méchant, forcément inhumain. Dans GoT (si vous ne savez pas ce que j'entends par GoT, vous venez d'une autre planète), Sansa passe d'un mari cruel et totalement barge à un autre mari cruel et totalement barge. La liste des horreurs qu'ils font subir aux autres, leur absence totale de pitié envers quiconque, en font des personnages creux, vides de substance, qui terrifient le spectateur de façon mécanique, comme un banal sursaut dans un film d'horreur. Totalement étranger à un Liberty Valance ou à un Frank, le méchant actuel est forcément psychopathe, de la trempe d'un John Doe ou d'un Anton Chigurh, fêlé mais sans âme, sans une once de conscience, toujours dans la surenchère, faisant passer Hans Gruber, Dark Vador et Roy Batty pour des petits caïds de quartier. 
J'ai cru que c'était le contraire le méchant dans l'ascenseur de Drive, j'ai cru qu'il laissait le temps au héros d'embrasser sa nana avant de lui faire la peau, j'ai cru qu'il lui accordait sa dernière requête de condamné, comme un méchant qui aurait du respect pour son adversaire, un méchant qui respecterait un certain code d'honneur, un méchant pas 100% méchant quoi, mais ça, ça n'intéresse plus personne. Aujourd'hui, le méchant ne doit respecter aucune trêve, décapiter les émissaires, trahir ses promesses, brûler le drapeau blanc, tuer pour le plaisir et torturer dès qu'il s'ennuie, parce que brrr, le méchant doit être très très méchant, et à force d'être très très méchant, il en devient complètement raté. 
En l’occurrence, dans cette scène de l'ascenseur, cette interprétation ne tient pas, le regard étonné qu'il jette au héros avant que celui-ci lui marave la gueule nous indique qu'il est juste con et qu'il n'avait pas remarqué que le héros l'avait repéré. Et c'est au tour de notre héros de devenir très très méchant. Il ne lui fout pas juste un pain pour pouvoir le ligoter et le laisser dans un placard, non, il lui défonce vraiment la tronche à coup de pied, jusqu'à ce que, je présume, la gueule du type soit réduite en bouillie. Il frappe à n'en plus finir, il frappe tellement fort qu'à un moment il y a un bout de truc qui saute, un bout d'os, pas une dent, plutôt une mandibule ou un bout d'arcade sourcilière, on ne peut pas savoir, mais on comprend à ce moment que le type est perdu, le héros lui a aplati la boite crânienne comme une vulgaire boîte d’œufs. Ce bout de mandibule qui virevolte, m'a évidemment mis cette scène en horreur, pas seulement parce que je doute, aussi fort que l'on veuille fracasser un type, qu'on arrive à faire virevolter des bouts aussi facilement que ça, pas seulement parce que cette abjection est là pour donner du frisson aux pré-pubères avides de sensations fortes qui se pâment devant n'importe quelle scène pourvu qu'elle soit craspec, mais surtout parce que le réalisateur suit une mode à la con, parce qu'un type ne peut plus être violent sans être hyper violent, parce que cette mandibule fout en l'air une scène qui promettait d'être très belle. Cette scène résume en fait ce que je pense du film, une suite de bonnes scènes gâchées par une trop grande porosité aux tics cinématographiques du moment, des bonnes idées gâchées par un réalisateur qui se regarde le nombril et qui nous prend pour témoins, des ralentis en veux tu en voilà, une tonalité de couleur rétro, des références à la pelle sans une once d'humour, une histoire racontée platement, sans compassion ni amour pour ses personnages. 
Et c'est dommage, parce que je suis bon public, j'aime bien les histoires de mecs qui maravent tous les méchants pour sauver une fille, j'aime bien les types taciturnes qu'il ne faut pas trop énerver, j'aime bien les scènes d'action et les films de genre, mais là je suis pas rentré dedans, tout simplement parce que le réalisateur n'était pas rentré dedans non plus, trop occupé qu'il était à choisir les bonnes chansons pour ses scènes clés, trop occupé qu'il était à choisir le bon blouson pour son acteur, trop occupé qu'il était à choisir le bon filtre pour sa caméra et le bon bout de mandibule à faire sauter. Par contre, la psychologie, l'amour, le caractère de ses personnages, il a choisi de torcher ça par quelques sourires entendus, quelques phrases anecdotiques, sans nous ouvrir la moindre porte pour nous permettre d'accéder à leur humanité. Et c'est bien dommage.  

vendredi 28 août 2015

La Nuit du carrefour



La Nuit du carrefour
1932
Jean Renoir
Avec: Pierre Renoir

En général, quand on pense au Commissaire Maigret, on se représente un homme assez massif, assez âgé, évoluant dans une France des années 50, comme vous pourrez la voir dans Maigret et l'affaire Saint-Fiacre (1959) avec Jean Gabin, ou encore dans l'excellent Maigret tend un piège (1958, toujours avec Gabin, qui distille une atmosphère oppressante pendant toute la durée du film). Mais Maigret n'est pas ancré dans l'après-guerre, il ne faut pas oublier que les quinze premiers Maigret furent publiés par Simenon dans les années 30, portés par un Maigret entre deux âges et pas si proche de la retraite que ça.
La Nuit du carrefour fait partie de ce lot là, avec le très connu Chien jaune, et ce qui frappe à la lecture de ces romans, c'est leur intemporalité. Il faut les chercher les indices qui rattachent l'intrigue à son époque, car quand on ne s'y connait guère en modèles de voiture, ils ne pullulent pas. Les bagnoles sont bien là, le téléphone aussi, on trouve déjà du trafic de drogue même si le mot dealer n'existe pas, et tout l'ensemble pourrait aussi bien se passer dans les années 80.
Bien sûr, quand on regarde l'adaptation qu'en a faite Jean Renoir en 1932, c'est l'inverse qui frappe: les chevaux aux labours, les motos qui ont des roues à rayons, les automobiles carrées et les pompes à essence manuelles, droites et immenses, la maison sans électricité et les routes sans marquages. Renoir, grand admirateur de Simenon, fut l'un des premiers à adapter un Maigret pour le cinéma. Les adaptations ne seront pas très nombreuses par la suite, Maigret, peu spectaculaire, semblant bien plus à l'aise dans le format télévisé. Quoi qu'il en soit, Renoir fait une adaptation fidèle du roman, quoique probablement incompréhensible pour ceux n'ayant pas lu le roman , en insistant bien sur l'aspect lugubre des lieux (un carrefour en pleine campagne avec tout juste trois maisons), la boue et le brouillard, la nuit et la pluie, les pièces enfumées. Renoir filme la nuit et la maison ancienne comme des lieux fantasmatiques qui seraient remplis de fantômes et d'objets incongrus, tout en respectant le contrat du film noir, avec sa came, ses truands et sa femme fatale. Le film est relativement jeune dans l'histoire du parlant, et la bande son souffre de nombreuses imperfections, des faux raccords, ou plutôt des absences de raccords quand un personnage passe d'une pièce à une autre. Mais Renoir sait malgré tout jouer avec le son, le bruit des automobiles qui passent est très marqué, et Renoir a l'idée de faire jouer l'un des personnages d'un petit accordéon à plusieurs reprises, comme pour attacher un motif musical au personnage. En dehors de cela, il n'y a pas de musique, ou très peu mais le jeu des acteurs commence assez clairement déjà à se détacher de la grandiloquence du temps du muet. Pierre Renoir, en commissaire Maigret est agréable, sans vraiment marquer. Il lui manque son flegme et son air maussade. La Nuit du carrefour n'est pas un film inoubliable, mais il est un témoignage intéressant de l'évolution du cinéma français, tout autant qu'un témoignage d'un temps disparu. On assiste, vers la fin, à une course poursuite en voiture, de nuit, à travers des petits villages. L'image est abimée, et les phares éclairent mal, on aperçoit par flashs, des images de la France des années 30, comme des fantômes de villages endormis pour toujours. Tout ceci me fait penser par ailleurs à Gas-oil, un film de 1955 avec Jean Gabin, autrement plus lumineux, que j'ai vu récemment. Gabin joue un camionneur aux prises avec des truands, ce qui permet d'admirer toute une floppée de camions de l'époque, une France de petites routes sinueuses, on y voit par exemple le passage de la Marne à Charenton qui a bien changé depuis, des bistros avec des sandwiches à l'andouillette et des flippers d'un autre âge. On y voit aussi Roger Hanin jeune, et Jeanne Moreau belle comme jamais. On est vingt ans après La Nuit du carrefour, la technique a beaucoup évolué, la bande son aussi. Roger Hanin se retrouve dans une voiture qui roule, coincée par des camions, avec quelques cadrages qui préfigurent le futur Duel de Steven Spielberg
Quelques films à voir donc, pour ne pas oublier d'où on vient, et d'où vient le cinéma qu'on peut voir tous les jours.



vendredi 3 avril 2015

Valdez



Valdez is coming
1971
Edwin Sherin
Avec: Burt Lancaster

Valdez est une production Burt Lancaster, et en tant que telle, ce n'est pas sans une légère appréhension que l'on met la galette dans le lecteur de..., je veux dire, la clé USB à l'arrière de... pardon, que l'on streame le film directement de son smartphone sur sa TV. En effet, ceux qui ont lu le roman auront du mal à s'imaginer l'armoire Burt Lancaster et son sourire étincelant en ancien éclaireur métèque humble et sec, et le fait qu'il ait nommé un parfait inconnu pour réaliser le film n'est pas de nature à calmer cette appréhension.
Cependant, bien vite, on est soulagé de constater que Burt Lancaster ne fait pas du Burt Lancaster. Âgé, légèrement voûté, les cheveux grisonnants, du maquillage un poil trop voyant pour le transformer en greaser, Lancaster campe un personnage qui physiquement est loin de celui qu'on a pu s'imaginer en lisant le roman, mais qui respecte à la lettre l'esprit du personnage. Mutique et stoïque, Valdez ne fait pas de coups d'éclats et garde son air renfrogné jusqu'au bout, c'est bien simple, vous ne verrez pas les dents de Burt dans ce film. 
Le scénario est aussi étrangement très fidèle au livre, rien n'est fait pour le rendre plus spectaculaire, ni plus violent, ni plus commercial, jusqu'à la fin abrupte qui clôt magistralement le livre. Mais, comme tous les gens cultivés le savent, la fidélité d'un film au roman ne fait pas un bon film. Si certains éléments ont tout de même été expurgés pour améliorer la lisibilité du film, d'autres auraient mérité d'être plus développés, comme la relation entre Valdez et la femme, et surtout la relation entre El Segundo et Tanner, qui est un des pivots du roman. Le film montre peu l'évolution de cette relation et anéantit l'effet du dénouement en donnant carrément l'impression que la fin a été bâclée. Un rien dommage, d'autant que le reste de la réalisation sans éclat ne parvient pas à rehausser l'ensemble. Le film ayant été tourné en Espagne, on ne manque pas de reconnaître ici et là des décors mille fois vus dans les westerns spaghetti, et dans l'absolu je n'ai rien contre, sauf quand cela me sort de l'histoire, et que cela raccroche le film à un genre auquel il n'appartient pas. Pour toutes ces raisons, Valdez est un film assez mineur dans l'histoire du western et dans la filmographie de Lancaster, mais qui passe quand même assez bien.

dimanche 29 mars 2015

Valdez arrive !



Valdez is Coming!
1970
Elmore Leonard


D'Elmore Leonard, je n'ai pas lu grand chose, mais il faut dire que le peu que j'ai lu ne m'a pas incité à approfondir son oeuvre. Maximum Bob m'avait laissé un goût d'inachevé, un polar principalement basé sur l'ambiance, le glauque et le morbide, mais qui ne paraissait jamais aller au bout de ses personnages et de son intrigue. Out of Sight quant à lui, est l'un des rares bouquins que j'ai lu qui soit moins riche que le film qui en a été tiré. Valdez arrive m'a plus ou moins réconcilié avec l'auteur culte, les défauts que je lui prête devenant le principal intérêt de ce petit roman sec et nerveux. Leonard ne bâtit pas une intrigue incroyable, et c'est tant mieux! Leonard n'approfondit pas beaucoup la psyché de ses personnages, mais pour un western, c'est ça qu'il faut. Valdez, le personnage principal, est un de ces entêtés admirables du western qui va au bout de ses convictions, de son attachement à la justice telle qu'il la conçoit, la cause fut elle futile, sans gloire et perdue d'avance. Engagé à dédommager une squaw dont le négro de mari s'est fait descendre par erreur, Valdez - lui-même métèque - va aller de vexations en vexations quand il réclame de l'argent au très puissant Tanner, le petit tyran local. On le voit rien qu'à l'énoncé de l'histoire, Valdez arrive est une quête pour la reconnaissance des déclassés, des laissés pour compte, des victimes de racisme de tout genre, un livre au sous-texte politique fort qui donne la parole à ceux qu'on ne voit jamais. Valdez, humilié par les hommes de Tanner, fait ce que tout héros de western fait d'habitude, il finit par ouvrir un tiroir et sortir ses armes qui dormaient là depuis une éternité. Pas de pot, c'est à un ancien éclaireur de l'armée que Tanner s'en est pris, un dur de dur, impossible à pister, et très bon au tir. Il y a bien El Segundo, le bras droit de Tanner, qui a remarqué que Valdez avait du cran, mais il l'a remarqué trop tard. Maintenant, Valdez a récupéré ses armes, et il arrive!
Le caractère obtus et buté de Valdez va provoquer un déchaînement de violence déconnecté du but initial, une bonne dizaine de morts, sans compter les chevaux, et la destruction de la maison d'un ami de Valdez. Tout ça pour une ou deux centaine de dollars, pour une squaw qui s'en fout et qui est déjà retourné chez les siens, pour un principe! En même temps, ce principe commence à se diluer un peu, quand Valdez ayant kidnappé la femme de Tanner, se verrait bien vivre avec elle le restant de ses jours. Tanner, enragé, part à la poursuite de Valdez et de sa femme. El Segundo lui, compte les hommes que Valdez lui a descendu, et commence à se demander si cela en vaut bien la peine. Si on reste calé sur le premier degré, c'est à dire sur cette chasse à l'homme si classique du western, on appréciera la description précise des techniques de Valdez, de son instinct et de son habileté aux armes. Les péripéties s’enchaînent, et le livre sait ménager son suspense. Le dénouement, renouant avec l'humain, avec le raisonnable, déjouant les pronostics qu'on s'est inscrit dans la cervelle après des centaines de westerns qui finissent tous pareil, la fin abrupte et sans épilogue, signent une grande oeuvre qui laisse une étrange satisfaction au lecteur. La satisfaction que le pire n'est pas certain, et que tout ne suit pas des schémas préconçus. A lire avant de voir le film qui en a été tiré avec Burt Lancaster.

A noter, la traduction d'Elie Robert-Nicoud, qui a le bon goût de traduire sans chercher à utiliser systématiquement le lexique archi-rabâché du western, et donc de ré-ancrer le livre dans une forme de d'authenticité et non pas dans le terrain de jeu habituel du western.

vendredi 6 mars 2015

Petit Papa Baston



Botte di natale
Terence Hill
1994
Avec Bud Spencer et Terence Hill

Bud Spencer et Terence Hill ont pris un sacré coup de vieux, mais ils n'en sont pas devenus plus raisonnables pour autant. Toujours amateurs d'haricots au lard, toujours très gênés aux entournures quand il s'agit de prendre le thé avec les dames, toujours prompts à faire la sieste n'importe où, toujours assez négligés dans le choix de leurs tenues vestimentaires, toujours détestés par les critiques de Télérama, et surtout, toujours adeptes de baffes tonitruantes pour régler les problèmes en cours. La mécanique du duo est toujours la même, Bud Spencer échafaude des plans que Terence Hill fait rater plus ou moins dans le sens qui l'arrange. Bud Spencer retrouve sa veste en peau de mouton, Terence Hill son cache poussière qui ne le quitte plus depuis Mon Nom est Personne. Il semble que rien n'ait changé dans le petit monde du western fayot, si ce n'est le poids des ans qui ici se fait douloureusement sentir. Terence Hill, si athlétique naguère, semble ici ratatiné, et Bud Spencer, qui imposait alors sa formidable puissance, semble avoir du mal à se mouvoir. La cruauté de dame nature fait mal, décidément, encore plus pour le casting des second rôles comme Neil Summers, qui continue en plus à se prendre des baffes toutes les dix minutes. Autre changement notable, le personnage de Terence Hill n'est plus le super-héros tout puissant qu'il était naguère. Il gaffe, il se plante, son personnage s'est enrichi d'une petite dose de Pierre Richard qui rééquilibre un peu les forces au sein du duo. Enfin, changement d'époque oblige, l'heure n'est plus à l'ironie mordante du western spaghetti. Les années 90 imposent leur sentimentalisme, leur politiquement correct et font de Petit Papa Baston un film pour enfants, consensuel, fréquentable pour tout le monde, avec l'esprit de Noël, le sens de la famille et tout le toutim. A la limite, même si je trouve que ça ne fait pas très Trinita, ça passe assez bien. Quelques séquences sont hilarantes, à l'image de la pendaison de Bud Spencer qui ne se passe pas du tout comme prévu. D'autres sont beaucoup plus poussives, comme la baston finale qui manque de rythme. Vous l'aurez compris par vous-même, Petit Papa Baston est un petit film rigolo pour les nostalgiques d'un cinéma populaire simple et efficace. J'aurais aimé que Terence Hill et Bud Spencer jouent de leur âge dans ce film, style "trop vieux pour ces conneries, mais on va leur montrer aux jeunots que les vieux papys savent encore y faire", mais non, ils font comme s'ils avaient encore vingt ans. Dans leur tête, oui c'est un peu le cas, et dans la notre, grâce à eux, encore dix de moins le temps d'un film...

samedi 21 février 2015

Mon nom est Shangaï Joe

Robert Hundar

1972
Il mio nome e' Shanghai joe
Mario Caïano
Avec : Chen Lee, Piero  Lulli, Gordon Mitchell, Klaus Kinski, Robert Hundar, Rick Boyd

Revoir Mon nom est Shangaï Joe alors que récemment, un gars tranquille se faisait refuser l'entrée dans un wagon parce qu'il est noir, est une épreuve pour l'homme rationnel persuadé que l'humain s'améliore avec les siècles. En 1882, notre héros Shangaï Joe (Chen Lee), un Chinois avec chapeau pointu, part pour le Texas Andalou, où il ne subira que vexations, brimades, voire tentatives de meurtres. L'agressivité est permanente, les seuls personnages positifs qu'il rencontre sont des peones mexicanos qui sont encore plus mal traités que lui, vu qu'ils sont esclaves. Notre héros, contrairement aux autres chinks, aux blacks et autres bougnoules a de la chance car il est diablement expert en zarts martiaux, ce qui fait qu'il démolit systématiquement ses tourmenteurs, parfois de façon relativement gore. Ça soulage diablement notre mauvaise conscience, mais il faut savoir que dans la vraie vie, les victimes du racisme sont rarement capables de faire des bonds de deux mètres sans élan, et qu'ils subissent et se résignent sans rien dire. Cependant, ce n'est pas le sujet de ce blog, pas plus que l'esclavage qui semble avoir encore un bel avenir chez Daesh (je rajoute ça pour équilibrer un peu).
Au bout d'un moment, le racisme n'est plus le sujet principal, Shangaï Joe se contente de rencontrer des cinglés plus psychopathes les uns que les autres, et dont les motivations sont tout sauf claires. Robert Hundar commence par faire une apparition très courte mais très impressionnante. Ce gars là avait quand même un physique vachement imposant, mais il ne peut pas rester longtemps, il se fait bouillir la tête dans une marmite de riz. Gordon Mitchell n'est pas mieux loti, non seulement on ne comprend pas bien ce qu'il fout là, mais en plus il se bat comme d'habitude dans ce qui ressemble à une carrière romaine, alors que le film bénéficiait pourtant d'un budget qui semblait jusque là raisonnable. L'explication vient ensuite, Klaus Kinski fait une apparition de 5 minutes, maigre et toujours aussi givré. Il a dû engloutir le reste du budget, et du coup, il ne reste pas longtemps non plus, notre Chinois lui fait la peau. Tout cela est très décousu, mais se suit avec plaisir néanmoins. Les combats sont corrects mais ont quand même pris un sacré coup de vieux. Il faut dire qu'il y a deux jours, je me suis mis The Raid 2 qui en comparaison donne l'impression que Shangaï Joe a été tourné au ralenti (et d'ailleurs c'est souvent le cas). The Raid 2 de Gareth Evans, fait suite à The Raid (du même), qui en soi était déjà un film d'arts martiaux très bien maîtrisé, d'une violence démesurée, bien qu'à la longue invraisemblable. The Raid 2 fait mieux, en réussissant à la fois à être plus posé, plus crédible tout en étant plus violent et moins film concept (c'est à dire un film qui se tient en grande partie sur l'originalité d'un pitch de départ, à savoir pour The Raid, une escouade de flics qui attaque un immeuble rempli de gangsters, le pitch c'est juste ça, le réalisateur part là-dessus, fait un huis-clos dans son immeuble et explore toutes les facettes possibles comme dans Piège de Cristal, sauf qu'au bout d'un moment on atteint les limites du concept.). The Raid 2 évite cet écueil, tout en allant crescendo dans la violence et l’invraisemblance, comme dans un jeu vidéo. Le dernier combat, entre Cecep Arif Rahman et Iko Uwais, alors même que celui-ci vient de démolir la fille aux marteaux (Julie Estelle) et l'homme à la batte de base-ball (Very Tri Yulisman) dans un combat d'au moins dix minutes, est tout bonnement anthologique. The Raid 2, un film que je vous conseille si vous avez le cœur bien accroché!



mardi 17 février 2015

Arizona Colt

Arizona Colt
1966
Michele Lupo
Avec: Giuliano Gemma, Fernando Sancho, Nello Pazzafini

Parfois il faut faire pause dans sa vie effrénée, revenir à ses amours, back to basic, ressortir un vieil enregistrement sur un vieux DVD-R qui prend la poussière, écouter la belle musique à l'harmonica du générique et retrouver le sourire en voyant s'afficher les noms de Guiliano Gemma, Fernando Sancho et Nello Pazzafini. Parfois il faut se laisser porter, apposer un voile pudique sur tous les défauts, ne pas voir l'intention commerciale évidente de réitérer le succès du premier Ringo. Ne pas réfléchir. Je n'aime pas les types qui réfléchissent, dit Fernando Sancho. J'ai suivi son conseil, j'ai mis mes neurones en veilleuse, apprécié le spectacle, les qualités d'athlète du beau Giuliano, le rire gras du gros Fernando, la veulerie de l'inénarrable Nello Pazzafini, les boissons explosives de Double Whisky (Roberto Camardiel). Ne pas se prendre la tête, suivre avec bonne humeur les différentes tonalités du film, du plus comique au plus tragique. Ne pense pas, ressens dit Yoda, ressens cette étrange charge émotive apportée par la sonorité si particulière des armes à feu du western spaghetti, imprègne toi de la sueur et de la lumière d'Almeria. Prépare toi doucement à l'inévitable carnage final avant que Giuliano n'embrasse Corinne Marchand et quitte la ville, alors que s'élève la langoureuse chanson de générique. Et si tu trouves ça beau, n'en aie pas honte, c'est effectivement beau comme du western spaghetti! 

PS: même si à proprement parler, il ne s'agit pas de l'armée mexicaine, je considère que ce film participe de ce grand génocide oublié.

jeudi 12 février 2015

Pour un whisky de plus

A gauche, Robert Hundar, à droite, Antonio Casas


Calvaca et uccidi
José Louis Boreau
1963

Avec: Alex Nicol, Robert Hundar, Antonio Casas

Continuons cette micro-anthologie du western Espagnol pré-Leone, avec Pour un Whisky de plus, aka ... Et pour un whisky de plus, aka Ville Sans Loi. L'image du DVD ESI est très très moyenne (rayures, tâches, couleurs brunâtres), ce qui ne rend pas service à ce film déjà très mineur. Encore une fois, les espagnols à l'époque se contentaient d'imiter le western américain dans des décors pratiquement vides de figuration. Mais dans ce film, on a quand même une belle explosion au début, et une fusillade finale bien fournie avec un paquet de gens qui pleuvent des toits. 

On retrouve le thème immuable de la ville tenue par des notables qui font régner la loi du plus fort avec un homme de main tout de noir vêtu (Robert Hundar). Le film prend le pari de jongler avec trois autres poncifs absolus du western américain: 1) Le Shérif vieillissant qui fermait plus ou moins les yeux jusque là, qui n'a personne pour l'aider, qui décide de s'y mettre et qui se fait descendre. 2) Le brave type, sorti de prison, qui ne veut surtout pas d'ennui, et qui se retrouve finalement pris dans la tourmente. 3) Le héros alcoolique, qui arrête de boire pour l'amour d'une femme et finit par liquider toute la vermine.
Dans le rôle du 1) on retrouve Antonio Casas qui plus tard se fera descendre par Lee Van Cleef alors même qu'il venait de lui offrir à bouffer dans un Leone bien connu. Dans le rôle du 2), c'est Luis Induni, un gars qui officiera comme second couteau dans tout un tas de spagh et dans le rôle du 3), c'est Alex Nicol, un acteur américain qui parvient à donner une certaine crédibilité à son personnage, sans trop en faire. Cependant, aucun de ces poncifs n'offrira d'éclairage nouveau sur le genre, aucune scène ne dépasse le stade du grattage circonspect de menton dans l'esprit dubitatif du spectateur, tant la mise en scène est plate, maladroite, linéaire, le doublage indigent et les dialogues barbants. Et donc, comme pour 4 balles pour Joe, comme pour L'ange noir du Mississippi, comme pour La furie des Apaches, comme pour 5 rafales pour Ringo, je ne saurai point vous recommander ce film, car vous allez vous ennuyer et vous allez trouver cela très mauvais. Mais si pour une raison ou pour une autre vous décidez malgré tout de le regarder, je vous enjoins à la clémence. Appréciez le comme un petit témoignage d'un cinéma certes raté, mais simple et honnête, et révolu à jamais.

Cinq rafales pour Ringo


Cinco pistolas de Texas
1965
Ignacio F. Iquino



Continuons à explorer le fond du panier du western espagnol. Espagnol mais pas que! Cinq rafales pour Ringo, aka Ringo le Hors la loi, aka La Revanche de Ringo est une production Eurociné, tout comme L'ange Noir du Mississippi, c'est à dire qu'il y a du pognon français dans ses veines. Malheureusement, pas de quoi crier cocorico tant ce film est oublié sitôt vu, comme les autres.

Daté de 1965, c'est à dire postérieur au mois d'août 1964 qui selon la légende Leoniene à vu Pour une poignée de dollars conquérir le monde à partir d'une seule salle, on aurait pu s'attendre à ce que Cinq Rafales pour Ringo commence à contenir quelques éléments de langage spaghetti. Et bien que nenni, on reste dans une imitation du western américain, et Ringo n'existe pas du tout dans ce film, malgré ce que les exploitants français ont essayé de nous faire croire après trois retitrages postérieurs.




C'est l'histoire d'un Shérif (Anthony Taber) qui arrive dans une ville trop paisible pour être honnête et qui va faire un peu de ménage. Au crédit du film, un personnage de croque-mort et son acolyte bougon et édenté, une blonde à chapeau (Maria Pia Conte) dont notre intransigeant Shérif tombera amoureux (il choisit la fille de banquier plutôt que la fille de saloon, où est passé le romantisme?) et une bagarre que mon indulgence qualifie de plutôt efficace dans le bureau du Shérif. Pour le reste, mon attention s'est largement dissipée durant toute l'intrigue et j'ai rapidement perdu le fil des rebondissements. A la fin, la cavalerie vient prêter main forte au héros. Fin du spoiler.

mercredi 11 février 2015

La loi de la violence



Legge della violenza
1969
Gianni Crea

Un pistolero ténébreux aux yeux bleus arrive en ville et prend le pouvoir petit à petit. Un bon petit gars du coin qui croit en la loi va avoir bien du mal à rétablir la justice. Malgré de bonnes intentions et un scénario plus complexe qu’il n’y paraît (le vengeur ténébreux, George Greenwood qui devient rapidement de plus en plus antipathique), La Loi de la Violence ne vaut pas un clou. Décors miteux, situations traînant en longueur, l’ennui est patent et ne s’apaisera nullement au cours du règlement de compte final. La musique de Stelvio Cipriani très inspirée des thèmes d'Ennio Morricone avec des coups de cloches de ci de làles gros plans dans les yeux, une séquence de fouet éprouvante qui ne l'est (éprouvante) que parce qu'elle est mal filmée, loin, très loin de son modèle du temps du massacre, tout cela n'y changera rien! Regarder ce film équivaut à perdre une heure et demie pendant laquelle vous auriez pu voir Le Septième Sceau, Pierrot le Fou, ou même, pourquoi pas, Matrix Reloaded. Difficile ici d'avoir ne serait-ce qu'un petit capital sympathie pour ce film, malgré toute ma meilleure volonté.

Bonus pour Vincent d'Inisfree:



Une scène modérément intéressante : le pistolero ténébreux finit par se retourner pour que la belle (Igli Villani) sorte de son bain tranquillement. Sauf que ce pervers s'est placé devant un miroir pour mieux l'observer à son insu.


L'Ange noir du Mississippi




Bienvenido, padre Murray
1962
Ramòn Torrado
Avec: René Muñoz, Fernando Sancho

A nouveau, il est facile de céder aux moqueries pour ce film, non seulement mineur, mais mineur même dans le cœur des plus acharnés des aficionados du western européen. Pourtant, L'Ange Noir du Mississippi est une curiosité à plus d'un titre. D'abord par son sujet, le racisme enduré avec philosophie par un pasteur noir dans une ville de l'Ouest, sujet finalement relativement rare dans le western (et malgré le récent succès du Django de Tarantino, c'est un sujet que l'on continuera à ne pas voir souvent). Les westerns traitant du racisme anti-noir ou anti-indien sont généralement assez pesants et plein de bonnes intentions souvent maladroites. 
Celui-ci n'échappe pas à la règle, mais ça n'empêche pas une certaine efficacité dans la violence et son impact, celle du lynchage inaugural, celle, situationnelle, de l'accueil glacial réservé au pasteur par ceux-là même qui espéraient sa venue. Mon œil contemporain, non historien, sourit à nouveau de l'ironie qui veut qu'une telle ode à la tolérance soit tournée dans la dictature franquiste pendant que la plus grande démocratie du monde était occupée à mettre un terme à sa propre ségrégation raciale dans la violence. Mais passons, c'est encore ma vision tordue des choses. Sans grande originalité, notre pasteur (René Muñoz, fluet et placide, très convainquant) parvient, à grand renfort de petits arrangement avec la religion, à mettre un paquet de gens de son coté, y compris le grand Fernando Sancho, occupé à roder le personnage exubérant qui fera sa gloire. La religion, et c'est un point qui n'a pas dû déranger les franquistes, est vue comme civilisatrice, un antidote à la violence, alors même que l'actualité nous rappelle tous les jours que la religion est la plus grande source de violence dans ce monde. Encore ma vision tordue des choses. Notons tout de même que notre pasteur se retrouve obligé de passer à l'action. Après avoir assommé deux bandidos, il se signe rapidement, pour conjurer le mauvais sort. J'ai voulu y voir un lien avec Tuco, un air de famille de plus avec ces grands films à l'origine de ce blog, films qui m'ont amené à découvrir des petits films dispensables comme celui-ci, mais pas inintéressants...


Captures: Stéphane sur Western Maniacs

mardi 10 février 2015

La furie des Apaches



El hombre de la Diligencia
1964
José María Elorrieta

La furie des apaches aka Furie Apache aka La vengeance des Apaches est un très honnête petit western espagnol fauché pré-Léonien, inspiré de la Chevauchée Fantastique de John Ford, avec une menace indienne permanente qui permet aux blancs encore en vie de régler leurs différents différends entre eux.  Bien sûr, les amateurs de fous-rire et autres écumeurs de nanardises auront matière à se délecter d'un cinéma qui a mal vieilli, et qui n'avait pas les moyens de ses ambitions, mais qui fut pourtant suffisant pour divertir toute une génération de spectateurs pas encore abreuvée en masse par la télévision.
Du western espagnol pas encore spaghetti donc, même si on trouve déjà ça et là des postures, des trognes, des regards qui n'échapperont pas aux connaisseurs. Même au sein du pourtant peu reconnu western espagnol, José María Elorrieta n'est pas une pointure recommandée par les aficionados. Pourtant sa réalisation est très correcte, à condition bien sûr de se mettre dans l'ambiance et d'apprécier le charme désuet de ces petites productions. Les acteurs ne se font pas spécialement remarquer non plus, ni par leur jeu, ni par une renommée qui aurait pu arriver ultérieurement pendant le boom du western spaghetti. Sur western maniac, on souligne qu'Aldo Sambrel est peut-être un gars qu'on aperçoit de loin au fond à droite, ce qui en dit long finalement sur la postérité du film. Le doublage français est caractéristique des doublages à la chaîne de l'époque, peu portés sur la nuance et très théâtraux. Contrairement à certains, j'ai apprécié la voix off de l'introduction qui tente d'apporter une touche de lyrisme à l'américaine en plaquant des dates et des lieux de l'histoire américaine sur fond de canyons espagnols. En somme, la plus grande curiosité de tout cela, c'est que ce type de film, qui aurait pu largement être oublié de tous, soit encore disponible de nos jours (grâce au boum des dvd des années 2000), et qu'une génération qui n'était pas née à l'époque soit en mesure de le regarder, et même - étrangement - de l'apprécier.

vendredi 9 janvier 2015

Charlie Hebdo

Après l'horreur de ces derniers jours, un dessin, enfin, m'a redonné un bref sourire... 


samedi 3 janvier 2015

Les Plus Belles Musiques D'Ennio Morricone Vol.2



C'est un disque vinyle 33 tours qui date du début des années 1980, que l'on m'avait offert quelques années plus tard parce que mon vif intérêt pour Ennio Morricone avait alors explosé brutalement, même si lorsque je le reçus, j'écoutais avant tout et principalement les morceaux Le Bon La Brute et le Truand et Il était une fois dans l'Ouest (L'homme à l'harmonica). 
C'est un disque témoin, témoin d'un temps où certains titres du maestro n'étaient pas encore sortis : pas de Mission à l'époque, ni d'Incorruptibles, ni surtout d'Il Etait une fois en Amérique. Et même si l'on excepte ces tubes postérieurs et les deux titres Leonesques, en fait de best of, il explore surtout La Bataille de San Sebastian, Le Clan des Siciliens, La Banquière et la Cage Aux Folles. On n'y trouve pas certains thèmes incontournables tels que ceux de Et pour quelques dollars de plus ou Il était une fois la Révolution, on n'y trouve pas une note de Mon nom est personne, ni certains favoris comme L'Estasi Dell'Oro avec Tuco qui court dans son cimetière ou Dopo l'esplosione pendant le travelling sur les morts de la grotte dans Il était une fois la Révolution.
Pourtant, aujourd'hui encore, je peux remettre ce disque sur une platine qui crachote, et l'émotion revient comme une vague, me mettant au bord des larmes, pour des musiques qui pour la plupart ne m'évoquaient rien à l'époque puisque je n'avais pas vu les films dont elles étaient tirées. Ainsi, lorsque plus tard je vis La Bataille de San Sebastian et Le Clan des Siciliens, je connaissais déjà leur splendide musique par cœur. Henri Verneuil avait, comme Sergio Leone, l'intelligence d'utiliser la musique de Morricone à bon escient, voire de l'intégrer magistralement à l'oeuvre comme lorsque le grand Montand découvre le côté obscur le la farce à la fin d'I comme Icare. Le thème de La Cage aux folles ainsi que les fabuleux cuivres de La Cage Aux Folles II (Sa Seule Pensée C'Est Lui) m'émeuvent comme jamais, malgré leur côté cheezy, si loin pourtant de ce que l'on pourrait imaginer pour ces comédies d'Edouard Molinaro. Et par ailleurs, si une note positive ressort encore aujourd'hui à la vision de ces films, elle provient en partie de la musique qui par son côté sérieux contrebalance les caricatures homosexuelles. 
Cela fonctionne d'ailleurs bien mieux que la bande son de La Banquière qui sous-emploie scandaleusement la somptueuse partition de Morricone. De Francis Girod, je n'ai toujours pas vu René la Canne ni Le Trio Infernal également présents sur ce disque. Mais je me dis que si Francis Girod a autant négligé les talents de son musicien que dans La Banquière, j'ai encore le temps de découvrir le gâchis, si gâchis il y a.
On trouve également dans ce disque un morceau plus anecdotique des Moissons Du Ciel de Terence Malick, avec un solo piano exécuté par Enrico Pierannunzi dont la dextérité m'impressionnait alors, et un passage de La Bataille d'Alger, film qui était alors invisible en France, et ce jusqu'en 2004, et qui a été utilisé par les américains pour comprendre comment ne pas perdre la guérilla urbaine en Irak.




Au dos de la pochette, on y voit des disques que j'aurais voulu tous écouter, certains pour des films que je n'aurai jamais eu l'occasion de voir. Si certains bisseux auront certainement vu Le trésor des quatre couronnes, film en 3D de Ferdinando Baldi, quelqu'un a-t-il vu Nana Le Désir de Dan Wolfman, ou La Désobéissance d'Aldo Lado? Quant à La Dame Aux Camélias, avec Isabelle Huppert, et One Two Two, 122 rue de Provence avec Francis Huster, je ne sais pas s'ils sont devenus très rares, mais je n'ai jamais eu l'occasion de les voir. Preuve que si Morricone tournait avec les plus grands, il était aussi capable de cachetonner. Mais en l'état, voir toutes ces pochettes de disque, ces titres de films devenus célèbres pour certains, totalement oubliés pour d'autres, ces musiques de films associés à des génériques typés années 70 engendre forcément la nostalgie d'un cinéma que l'on voudrait voir forcément plus authentique et généreux que celui d'aujourd'hui. Quentin Tarantino n'a pour l'heure pas réussi à travailler avec Ennio Morricone, et s'en est trouvé réduit à coller certains de ses morceaux là où il le pouvait. Quelque part cela me semble normal et dans l'ordre des choses, la musique d'Ennio Morricone accompagne un cinéma qui n'existe plus, et que seuls certains pasticheurs s'efforcent de maintenir en vie.