samedi 21 février 2015

Mon nom est Shangaï Joe

Robert Hundar

1972
Il mio nome e' Shanghai joe
Mario Caïano
Avec : Chen Lee, Piero  Lulli, Gordon Mitchell, Klaus Kinski, Robert Hundar, Rick Boyd

Revoir Mon nom est Shangaï Joe alors que récemment, un gars tranquille se faisait refuser l'entrée dans un wagon parce qu'il est noir, est une épreuve pour l'homme rationnel persuadé que l'humain s'améliore avec les siècles. En 1882, notre héros Shangaï Joe (Chen Lee), un Chinois avec chapeau pointu, part pour le Texas Andalou, où il ne subira que vexations, brimades, voire tentatives de meurtres. L'agressivité est permanente, les seuls personnages positifs qu'il rencontre sont des peones mexicanos qui sont encore plus mal traités que lui, vu qu'ils sont esclaves. Notre héros, contrairement aux autres chinks, aux blacks et autres bougnoules a de la chance car il est diablement expert en zarts martiaux, ce qui fait qu'il démolit systématiquement ses tourmenteurs, parfois de façon relativement gore. Ça soulage diablement notre mauvaise conscience, mais il faut savoir que dans la vraie vie, les victimes du racisme sont rarement capables de faire des bonds de deux mètres sans élan, et qu'ils subissent et se résignent sans rien dire. Cependant, ce n'est pas le sujet de ce blog, pas plus que l'esclavage qui semble avoir encore un bel avenir chez Daesh (je rajoute ça pour équilibrer un peu).
Au bout d'un moment, le racisme n'est plus le sujet principal, Shangaï Joe se contente de rencontrer des cinglés plus psychopathes les uns que les autres, et dont les motivations sont tout sauf claires. Robert Hundar commence par faire une apparition très courte mais très impressionnante. Ce gars là avait quand même un physique vachement imposant, mais il ne peut pas rester longtemps, il se fait bouillir la tête dans une marmite de riz. Gordon Mitchell n'est pas mieux loti, non seulement on ne comprend pas bien ce qu'il fout là, mais en plus il se bat comme d'habitude dans ce qui ressemble à une carrière romaine, alors que le film bénéficiait pourtant d'un budget qui semblait jusque là raisonnable. L'explication vient ensuite, Klaus Kinski fait une apparition de 5 minutes, maigre et toujours aussi givré. Il a dû engloutir le reste du budget, et du coup, il ne reste pas longtemps non plus, notre Chinois lui fait la peau. Tout cela est très décousu, mais se suit avec plaisir néanmoins. Les combats sont corrects mais ont quand même pris un sacré coup de vieux. Il faut dire qu'il y a deux jours, je me suis mis The Raid 2 qui en comparaison donne l'impression que Shangaï Joe a été tourné au ralenti (et d'ailleurs c'est souvent le cas). The Raid 2 de Gareth Evans, fait suite à The Raid (du même), qui en soi était déjà un film d'arts martiaux très bien maîtrisé, d'une violence démesurée, bien qu'à la longue invraisemblable. The Raid 2 fait mieux, en réussissant à la fois à être plus posé, plus crédible tout en étant plus violent et moins film concept (c'est à dire un film qui se tient en grande partie sur l'originalité d'un pitch de départ, à savoir pour The Raid, une escouade de flics qui attaque un immeuble rempli de gangsters, le pitch c'est juste ça, le réalisateur part là-dessus, fait un huis-clos dans son immeuble et explore toutes les facettes possibles comme dans Piège de Cristal, sauf qu'au bout d'un moment on atteint les limites du concept.). The Raid 2 évite cet écueil, tout en allant crescendo dans la violence et l’invraisemblance, comme dans un jeu vidéo. Le dernier combat, entre Cecep Arif Rahman et Iko Uwais, alors même que celui-ci vient de démolir la fille aux marteaux (Julie Estelle) et l'homme à la batte de base-ball (Very Tri Yulisman) dans un combat d'au moins dix minutes, est tout bonnement anthologique. The Raid 2, un film que je vous conseille si vous avez le cœur bien accroché!



mardi 17 février 2015

Arizona Colt

Arizona Colt
1966
Michele Lupo
Avec: Giuliano Gemma, Fernando Sancho, Nello Pazzafini

Parfois il faut faire pause dans sa vie effrénée, revenir à ses amours, back to basic, ressortir un vieil enregistrement sur un vieux DVD-R qui prend la poussière, écouter la belle musique à l'harmonica du générique et retrouver le sourire en voyant s'afficher les noms de Guiliano Gemma, Fernando Sancho et Nello Pazzafini. Parfois il faut se laisser porter, apposer un voile pudique sur tous les défauts, ne pas voir l'intention commerciale évidente de réitérer le succès du premier Ringo. Ne pas réfléchir. Je n'aime pas les types qui réfléchissent, dit Fernando Sancho. J'ai suivi son conseil, j'ai mis mes neurones en veilleuse, apprécié le spectacle, les qualités d'athlète du beau Giuliano, le rire gras du gros Fernando, la veulerie de l'inénarrable Nello Pazzafini, les boissons explosives de Double Whisky (Roberto Camardiel). Ne pas se prendre la tête, suivre avec bonne humeur les différentes tonalités du film, du plus comique au plus tragique. Ne pense pas, ressens dit Yoda, ressens cette étrange charge émotive apportée par la sonorité si particulière des armes à feu du western spaghetti, imprègne toi de la sueur et de la lumière d'Almeria. Prépare toi doucement à l'inévitable carnage final avant que Giuliano n'embrasse Corinne Marchand et quitte la ville, alors que s'élève la langoureuse chanson de générique. Et si tu trouves ça beau, n'en aie pas honte, c'est effectivement beau comme du western spaghetti! 

PS: même si à proprement parler, il ne s'agit pas de l'armée mexicaine, je considère que ce film participe de ce grand génocide oublié.

jeudi 12 février 2015

Pour un whisky de plus

A gauche, Robert Hundar, à droite, Antonio Casas


Calvaca et uccidi
José Louis Boreau
1963

Avec: Alex Nicol, Robert Hundar, Antonio Casas

Continuons cette micro-anthologie du western Espagnol pré-Leone, avec Pour un Whisky de plus, aka ... Et pour un whisky de plus, aka Ville Sans Loi. L'image du DVD ESI est très très moyenne (rayures, tâches, couleurs brunâtres), ce qui ne rend pas service à ce film déjà très mineur. Encore une fois, les espagnols à l'époque se contentaient d'imiter le western américain dans des décors pratiquement vides de figuration. Mais dans ce film, on a quand même une belle explosion au début, et une fusillade finale bien fournie avec un paquet de gens qui pleuvent des toits. 

On retrouve le thème immuable de la ville tenue par des notables qui font régner la loi du plus fort avec un homme de main tout de noir vêtu (Robert Hundar). Le film prend le pari de jongler avec trois autres poncifs absolus du western américain: 1) Le Shérif vieillissant qui fermait plus ou moins les yeux jusque là, qui n'a personne pour l'aider, qui décide de s'y mettre et qui se fait descendre. 2) Le brave type, sorti de prison, qui ne veut surtout pas d'ennui, et qui se retrouve finalement pris dans la tourmente. 3) Le héros alcoolique, qui arrête de boire pour l'amour d'une femme et finit par liquider toute la vermine.
Dans le rôle du 1) on retrouve Antonio Casas qui plus tard se fera descendre par Lee Van Cleef alors même qu'il venait de lui offrir à bouffer dans un Leone bien connu. Dans le rôle du 2), c'est Luis Induni, un gars qui officiera comme second couteau dans tout un tas de spagh et dans le rôle du 3), c'est Alex Nicol, un acteur américain qui parvient à donner une certaine crédibilité à son personnage, sans trop en faire. Cependant, aucun de ces poncifs n'offrira d'éclairage nouveau sur le genre, aucune scène ne dépasse le stade du grattage circonspect de menton dans l'esprit dubitatif du spectateur, tant la mise en scène est plate, maladroite, linéaire, le doublage indigent et les dialogues barbants. Et donc, comme pour 4 balles pour Joe, comme pour L'ange noir du Mississippi, comme pour La furie des Apaches, comme pour 5 rafales pour Ringo, je ne saurai point vous recommander ce film, car vous allez vous ennuyer et vous allez trouver cela très mauvais. Mais si pour une raison ou pour une autre vous décidez malgré tout de le regarder, je vous enjoins à la clémence. Appréciez le comme un petit témoignage d'un cinéma certes raté, mais simple et honnête, et révolu à jamais.

Cinq rafales pour Ringo


Cinco pistolas de Texas
1965
Ignacio F. Iquino



Continuons à explorer le fond du panier du western espagnol. Espagnol mais pas que! Cinq rafales pour Ringo, aka Ringo le Hors la loi, aka La Revanche de Ringo est une production Eurociné, tout comme L'ange Noir du Mississippi, c'est à dire qu'il y a du pognon français dans ses veines. Malheureusement, pas de quoi crier cocorico tant ce film est oublié sitôt vu, comme les autres.

Daté de 1965, c'est à dire postérieur au mois d'août 1964 qui selon la légende Leoniene à vu Pour une poignée de dollars conquérir le monde à partir d'une seule salle, on aurait pu s'attendre à ce que Cinq Rafales pour Ringo commence à contenir quelques éléments de langage spaghetti. Et bien que nenni, on reste dans une imitation du western américain, et Ringo n'existe pas du tout dans ce film, malgré ce que les exploitants français ont essayé de nous faire croire après trois retitrages postérieurs.




C'est l'histoire d'un Shérif (Anthony Taber) qui arrive dans une ville trop paisible pour être honnête et qui va faire un peu de ménage. Au crédit du film, un personnage de croque-mort et son acolyte bougon et édenté, une blonde à chapeau (Maria Pia Conte) dont notre intransigeant Shérif tombera amoureux (il choisit la fille de banquier plutôt que la fille de saloon, où est passé le romantisme?) et une bagarre que mon indulgence qualifie de plutôt efficace dans le bureau du Shérif. Pour le reste, mon attention s'est largement dissipée durant toute l'intrigue et j'ai rapidement perdu le fil des rebondissements. A la fin, la cavalerie vient prêter main forte au héros. Fin du spoiler.

mercredi 11 février 2015

La loi de la violence



Legge della violenza
1969
Gianni Crea

Un pistolero ténébreux aux yeux bleus arrive en ville et prend le pouvoir petit à petit. Un bon petit gars du coin qui croit en la loi va avoir bien du mal à rétablir la justice. Malgré de bonnes intentions et un scénario plus complexe qu’il n’y paraît (le vengeur ténébreux, George Greenwood qui devient rapidement de plus en plus antipathique), La Loi de la Violence ne vaut pas un clou. Décors miteux, situations traînant en longueur, l’ennui est patent et ne s’apaisera nullement au cours du règlement de compte final. La musique de Stelvio Cipriani très inspirée des thèmes d'Ennio Morricone avec des coups de cloches de ci de làles gros plans dans les yeux, une séquence de fouet éprouvante qui ne l'est (éprouvante) que parce qu'elle est mal filmée, loin, très loin de son modèle du temps du massacre, tout cela n'y changera rien! Regarder ce film équivaut à perdre une heure et demie pendant laquelle vous auriez pu voir Le Septième Sceau, Pierrot le Fou, ou même, pourquoi pas, Matrix Reloaded. Difficile ici d'avoir ne serait-ce qu'un petit capital sympathie pour ce film, malgré toute ma meilleure volonté.

Bonus pour Vincent d'Inisfree:



Une scène modérément intéressante : le pistolero ténébreux finit par se retourner pour que la belle (Igli Villani) sorte de son bain tranquillement. Sauf que ce pervers s'est placé devant un miroir pour mieux l'observer à son insu.


L'Ange noir du Mississippi




Bienvenido, padre Murray
1962
Ramòn Torrado
Avec: René Muñoz, Fernando Sancho

A nouveau, il est facile de céder aux moqueries pour ce film, non seulement mineur, mais mineur même dans le cœur des plus acharnés des aficionados du western européen. Pourtant, L'Ange Noir du Mississippi est une curiosité à plus d'un titre. D'abord par son sujet, le racisme enduré avec philosophie par un pasteur noir dans une ville de l'Ouest, sujet finalement relativement rare dans le western (et malgré le récent succès du Django de Tarantino, c'est un sujet que l'on continuera à ne pas voir souvent). Les westerns traitant du racisme anti-noir ou anti-indien sont généralement assez pesants et plein de bonnes intentions souvent maladroites. 
Celui-ci n'échappe pas à la règle, mais ça n'empêche pas une certaine efficacité dans la violence et son impact, celle du lynchage inaugural, celle, situationnelle, de l'accueil glacial réservé au pasteur par ceux-là même qui espéraient sa venue. Mon œil contemporain, non historien, sourit à nouveau de l'ironie qui veut qu'une telle ode à la tolérance soit tournée dans la dictature franquiste pendant que la plus grande démocratie du monde était occupée à mettre un terme à sa propre ségrégation raciale dans la violence. Mais passons, c'est encore ma vision tordue des choses. Sans grande originalité, notre pasteur (René Muñoz, fluet et placide, très convainquant) parvient, à grand renfort de petits arrangement avec la religion, à mettre un paquet de gens de son coté, y compris le grand Fernando Sancho, occupé à roder le personnage exubérant qui fera sa gloire. La religion, et c'est un point qui n'a pas dû déranger les franquistes, est vue comme civilisatrice, un antidote à la violence, alors même que l'actualité nous rappelle tous les jours que la religion est la plus grande source de violence dans ce monde. Encore ma vision tordue des choses. Notons tout de même que notre pasteur se retrouve obligé de passer à l'action. Après avoir assommé deux bandidos, il se signe rapidement, pour conjurer le mauvais sort. J'ai voulu y voir un lien avec Tuco, un air de famille de plus avec ces grands films à l'origine de ce blog, films qui m'ont amené à découvrir des petits films dispensables comme celui-ci, mais pas inintéressants...


Captures: Stéphane sur Western Maniacs

mardi 10 février 2015

La furie des Apaches



El hombre de la Diligencia
1964
José María Elorrieta

La furie des apaches aka Furie Apache aka La vengeance des Apaches est un très honnête petit western espagnol fauché pré-Léonien, inspiré de la Chevauchée Fantastique de John Ford, avec une menace indienne permanente qui permet aux blancs encore en vie de régler leurs différents différends entre eux.  Bien sûr, les amateurs de fous-rire et autres écumeurs de nanardises auront matière à se délecter d'un cinéma qui a mal vieilli, et qui n'avait pas les moyens de ses ambitions, mais qui fut pourtant suffisant pour divertir toute une génération de spectateurs pas encore abreuvée en masse par la télévision.
Du western espagnol pas encore spaghetti donc, même si on trouve déjà ça et là des postures, des trognes, des regards qui n'échapperont pas aux connaisseurs. Même au sein du pourtant peu reconnu western espagnol, José María Elorrieta n'est pas une pointure recommandée par les aficionados. Pourtant sa réalisation est très correcte, à condition bien sûr de se mettre dans l'ambiance et d'apprécier le charme désuet de ces petites productions. Les acteurs ne se font pas spécialement remarquer non plus, ni par leur jeu, ni par une renommée qui aurait pu arriver ultérieurement pendant le boom du western spaghetti. Sur western maniac, on souligne qu'Aldo Sambrel est peut-être un gars qu'on aperçoit de loin au fond à droite, ce qui en dit long finalement sur la postérité du film. Le doublage français est caractéristique des doublages à la chaîne de l'époque, peu portés sur la nuance et très théâtraux. Contrairement à certains, j'ai apprécié la voix off de l'introduction qui tente d'apporter une touche de lyrisme à l'américaine en plaquant des dates et des lieux de l'histoire américaine sur fond de canyons espagnols. En somme, la plus grande curiosité de tout cela, c'est que ce type de film, qui aurait pu largement être oublié de tous, soit encore disponible de nos jours (grâce au boum des dvd des années 2000), et qu'une génération qui n'était pas née à l'époque soit en mesure de le regarder, et même - étrangement - de l'apprécier.