mercredi 19 août 2009

Sierra Torride


Two Mules for Sister Sara
1970
Don Siegel
Avec: Clint Eastwood, Shirley MacLaine

Clintou sauve une nonne du viol et va l’aider à combattre les français au Mexique. Sergio Leone avait deviné la véritable identité de la nonne au bout de dix minutes. Si vous n’êtes pas Sergio Leone, ou si vous n’avez pas son intelligence supérieure, je vais essayer de ne pas spoiler la fin, sinon, vous voilà prévenus.

Clintou a bien sûr une place à part dans mon panthéon en plâtre. Après avoir vu la trilogie des dollars, je fus déçu de découvrir que Leone n’avait réalisé que cinq westerns, mais je fus bien aise d’apprendre que Clintou avait tourné un certain nombre de westerns du même acabit dans sa carrière ultérieure. Du même acabit, voire, car l’acteur/réalisateur prit bien soin de ne pas faire la même chose qu’en Italie, des westerns comme Josey Wales, Unforgiven ou L’homme des hautes plaines, malgré d’évidentes influences, prennent une ampleur autre, et ne manqueront pas de décevoir les amateurs qui rechercheraient des duplicatas des films de Leone. D’autres westerns, comme Pale Rider ou ce Sierra Torride peuvent néanmoins constituer une sorte de passerelle, les chaînons manquants entre les films de Leone et les westerns plus ambitieux d’Eastwood.

Sierra Torride, donc, avec sa musique signée Ennio Morricone, son mercenaire solitaire barbu qui allume ses cigarillos et ses fulgurances d’action violente se rapproche en effet grandement de ce que Clint a pu faire en Italie, le tout ficelé dans une ironie mordante qui ne dépare pas le morceau, à l’image de ce bestiaire initial (puma, crotale, tarentule), placé là pour montrer que le film qui débute va être sans concession. Mais dès que la tarentule se fait grossièrement aplatir par le sabot du cheval de notre homme sans nom, on comprend également que tout ceci n’est pas à prendre vraiment au sérieux. Sierra Torride s’oriente rapidement en effet vers la comédie, sitôt que Shirley MacLaine a remis ses oripeaux (on remarquera d’ailleurs qu’elle est plus belle en nonne, les cheveux cachés) la confrontation entre elle et lui entrainera une succession de gags verbaux assez drôles, tous basés bien sûr d’une part sur l’inadéquation primaire d’une nonne avec ce milieu hostile, et d’autre part sur le décalage entre le comportement attendu d’une nonne et celui de son usurpatrice. Ce qui permet à Eastwood de nous servir à loisir son rictus désormais légendaire, mélange de mâchoire serrée et de regard incrédule, qu’il n’avait pas eu tellement l’occasion de peaufiner chez Leone tant il était occupé à faire passer son bout de cigare d’une commissure des lèvres à l’autre. Shirley MacLaine elle, n’est pas avare de son talent, elle minaude, elle fume, elle boit, elle aiguise sa répartie et casse des flèches. Je ne crois pas avoir vu d’autres films avec elle, mais quand on parle de ce film avec les anciens, ils disent « Ha oui, avec Shirley MacLaine », mais pourtant, ils ont du mal à citer un autre film dans lequel elle aurait joué. Comme si la renommée d’une actrice ou d’un acteur pouvait se faire indépendamment de ses films… En attendant de découvrir quelques uns de ses autres films, je ne me prononcerai donc pas.
Le reste du film se suit vraiment bien, on rit, on prend du plaisir à suivre toutes les péripéties et les retournements de situation, ainsi que la progression du rapport amoureux entre les deux têtes d’affiche, sans oublier la parodique musique d'Ennio Morricone. Et rien d’autre. Don Siegel suit le scénario de Budd Boetticher et n’y apporte aucune épaisseur, aucune consistance, aucune réelle noirceur comme il le fit pourtant pour les films précédant et suivant ce film dans sa filmographie : les grinçants Un Shérif à New York et Dirty Harry, ainsi que l’atypique Les Proies. Seule une scène d’exécution tente très fugacement de faire passer un début d’émotion qui soit autre chose qu’un chatouillement de zygomatique ou d’adrénaline : un mexicain se fait fusiller, et l’on voit clairement sur le visage de l’un des soldats français la détresse de l’acte accompli, l’horreur de la situation. C’est rapide et ça passe vite, l’attaque finale, à base de dynamite, de coups de machete gores et de soldats virevoltants revient dans un cadre purement entertainment et remplit son office comme on l’attend. Et Eastwood peut enfin se taper la nonne, de façon il est vrai assez peu élégante. Si Sierra Torride est loin de valoir les meilleurs films d’Eastwood, s’il n’arrive jamais à la cheville des Leone et s’il est même inférieur aux meilleurs films de Siegel, il se situe néanmoins à la croisée de toutes ces personnalités, une sorte de récréation réussie, un patchwork bien digeste qui remplit bien le ventre sans filer la colique.

Où le voir : hooo, z’êtes grands non ?
Capture: Mariaque sans son aimable consentement, mais dont vous pouvez lire l'avis ici

3 commentaires:

  1. C'est le plus mauvais Clint à mon sens avec "Joe Kidd". Le coup de la religieuse qui s'avère être une pute, c'est d'un lourd ! Et puis l'armée française ressemble à n'importe quoi et parle un sabir inaudible, z'auraient pu faire un effort de documentation !
    Ah, le nouveau Tarantino avec Brad Pitt, ça a l'air d'êt' quequ' chose ! :)

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  2. C'est carrément bien meilleur que Joe Kidd. Et je le préfère aussi à Pendez les hauts et courts!

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  3. Moi aussi, je le trouve plutôt marrant mais ça ne vaut pas "Les proies"...
    De la part du "grand ancien", sur Shirley, je ne saurais trop te conseiller ses débuts dans le meilleur Hitchcock, "Mais qui a tué Harry", ses sommets avec Wilder "La garçonnière" et "Irma la douce", son duo avec Jerry Lewis dans "Artistes et modèles" et sa prestation en lesbienne amoureuse de Audrey Hepburn dans "La rumeur" de Wyler. dans le genre qui nous motive le plus, elle était sympa avec Glenn Ford et ses moutonsses dans "La vallée de la poudre"

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