samedi 29 mai 2010

Le convoi sauvage



Man in the wilderness
1971
Richard C. Sarafian
Avec : Richard Harris, John Huston


Le western n’est pourtant pas propre à traumatiser les enfants. Mais Le convoi sauvage fut l’un de ceux qui me marqua, à cause de cette attaque de grizzly sauvage, gore, impressionnante, réaliste. Même si les effets ont un peu vieilli aujourd’hui, elle reste assez impactante, Richard Harris ballotté comme un fétu de paille, tentant de trouver refuge dans un arbre, et traîné sans ménagement, cela vous pose un film, surtout quand la scène en question est si proche du début.

Man in the wilderness en anglais, Le convoi sauvage en français, chaque titre évoque un aspect de l’intrigue. Man in the wilderness d’abord, raconte la quasi-mort de cet homme, Richard Harris, recousu hâtivement puis abandonné par les hommes du convoi qu’il guidait. L’homme reste allongé très longtemps, la caméra l’imite, filmant l’eau, la boue, les feuilles mortes au ras du sol. L’homme finit par se confondre avec la terre, il rampe, il grimace, il se recouvre de feuilles et fait corps avec la nature salvatrice. A plusieurs reprises, il se cache et s’unit ainsi à la terre, se camouflant naturellement dans son nouvel élément, si bien transformé en matériau naturel que même les indiens ne le repèrent pas. Sa vision est floue, des flashbacks le hantent et nous renseignent sur sa vie, son enfant, sa nature un brin misanthrope. Sarafian nous livre là un cinéma généreux et franc, il fait beaucoup avec peu et la survie, puis la renaissance de l’homme s’avère passionnante, et en même temps contemplative dans la mesure où le spectateur reste spectateur : on ne cherche pas à nous faire partager son calvaire, l’homme se débrouille très bien tout seul, c’est un professionnel. Plus qu’une immersion, c’est le spectacle aux premières loges du type aguerri qui survit par tous les moyens. Richard Harris est parfait dans la démonstration de la souffrance durable, il arbore un rictus de douleur et de haine permanent, accentué par sa blessure au visage. Une fois plus ou moins remis sur pattes, il cherche à rejoindre le convoi qui l’a abandonné. Pour se venger, pour retourner à la civilisation, on ne sait pas trop, l’homme reste énigmatique. En chemin il verra une indienne accoucher accroupie, seule, en silence et digne. Elle donne ensuite son enfant au père, comme une offrande, et l’homme qui assiste à tout cela, à nouveau planqué sous un tronc quelconque, exprime peut-être le désir de revoir son propre fils. C’est beau. Avec le temps, on voit un peu les ficelles, mais c’est beau.

Le convoi sauvage ensuite, c’est la petite troupe qui a abandonné l’homme. Un équipage hétéroclite qui traîne un énorme bateau dans la nature. Ceux qui ont oublié l’attaque de l’ours se souviennent de ce western avec des hommes qui tirent un bateau sur roues. Le capitaine de l’équipe, c’est John Huston, et apparemment il tient à son bateau dont le mat ressemble à une immense croix évangélique en territoire indien. Evidemment, Huston fait un peu penser au capitaine Achab, droit, poursuivant son rêve malgré la grogne de ses hommes. Il y a le froid et l’arrivée de l’hiver qui menace, et il y a les indiens, et il y a la boue finale qui enlise tout le monde. Plus qu’au roman de Melville, cette épopée un peu folle rappelle encore plus celle de Dundee, ou d’Aguirre, lorsque l’ambition, la détermination entêtée amène au fiasco de toute une troupe. Le convoi sauvage fait alors partie de ces westerns des années 70, qui réussissent parfaitement à renouveler le western, en l’ancrant dans le mythe du retour à la nature des ces années là avec les désillusions qui vont avec, un propos ambitieux et une grammaire qui ne sous-estime pas le spectateur, sans pour autant le noyer dans une forme absconse et des délires expérimentaux usants. Un juste milieu parfait en somme. A voir quoi…

4 commentaires:

  1. Richard Harris a raconté dans une interview qu'il s'était retrouvé seul un moment avec l'ours sur le plateau et qu'il avait eu la trouille de sa vie. On voyait d'ailleurs la scène dans un rush (qui n'a pas été conservé au montage !) où il prenait ses jambes à son cou. :-)
    Souris_117

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  2. Tiens, content de te revoir Souris_117. Flingo ne vient plus par ici, j'espère qu'il n'a pas d'ennuis (de santé ou autres?)

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  3. T'en fais pas pour Flingo, maintenant il est super papi d'une petite Eloïse et il va bientôt revenir pour vous embêter !^^
    Souris_117

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