lundi 9 juillet 2007

Bouncer

Par Boucq et Jodorowsky
Premier cycle.

Les humanos publient en mode « pocket » les deux premiers tomes du Bouncer de Boucq et Jodorowsky. Le format m’a plu, le prix aussi, j’ai acheté.

Le bouncer c’est le videur dans les saloons, c’est celui qui fait valdinguer les portes battantes quand il expulse les poivrots et ceux qui font du tapage. Mais ce n’est pas de ce joli métier dont on va parler ici, mais plutôt de vengeance. Comme dans Nevada Smith un gamin voit ses parents horriblement assassinés. Il rencontre alors le Bouncer qui va lui apprendre à devenir un homme pour mener à bien sa vengeance. Mais le gosse découvre que cette histoire de vengeance est un complexe nœud oedipien dans la plus pure tradition du spagh, et que le Bouncer n’est pas étranger à tout ça.

Pour commencer, je n’ai jamais vraiment accroché au style graphique de Boucq. C’est déjà un handicap pour qui voudrait apprécier cette BD à sa juste valeur. Dans Bouncer, Boucq réussit à faire du Giraud tout en gardant sa patte personnelle. Au final ça passe très bien, on a droit à de magnifiques cases paysagières, des gros plans sur les révolvers ciselés du gamin, et des trognes à faire baver un chirurgien esthétique. Si comme moi vous n’aimez pas trop le style de Boucq, ceci ne doit donc pas vous rebuter.
Par contre, si comme moi vous aimeriez qu’on vous raconte du neuf en terme d’histoires western, il vaut mieux s’en tenir aux derniers Blueberry qui me paraissent curieusement plus intéressants que la trame sans intérêt de ce premier cycle du Bouncer. Certes, le scénario se suit sans déplaisir, certes les personnages haut en couleur de la pute et de ses trois fils sont plutôt inattendus, mais Jodorowsky échoue à remporter l’adhésion à deux niveaux :
En premier lieu les clichés, de la bande de sudistes, forcément affreux, violeurs, assassins ; aux notables, forcément cupides et conservateurs ; en passant par l’institutrice naturellement ouverte d’esprit qui y va de son petit couplet sur l’histoire honteuse des Etats-Unis, on ne trouve pas grand-chose qui divertit l’esprit de son petit train train politiquement correct. Je ne demande pas des sudistes qui combattent le KKK, des notables qui accueillent les indiens avec des fleurs et une institutrice conne et moche, mais comme le disait quelqu’un à propos de Dirty Harry, le vrai talent c’est de savoir créer des poncifs de toute pièce. Ce serait bien de lire des histoires de temps en temps qui cessent de toujours vouloir faire coller les lieux communs du moment à l’époque décrite. La violence, toujours la même depuis les années 80 dans les BD « adultes », toujours des viols toutes les trois pages, toujours des « crève connard ! » avec du sang qui gicle, toujours du glauque, toujours l’initiation du jeune « à la sauvage » face au félin, face au vide, toujours les mêmes rouages sexe + violence + dialogues explicites usés jusqu’à la corde. Là non plus, je ne suis pas un défenseur de la morale qui veut du Martine à l’école, mais je veux du neuf !
En deuxième lieu, Jodorowsky qui excelle dans la provocation et l’imagination débridée dans la plupart de ses BD (L’incal, La Caste des Méta Barons) ne propose rien ici qui turlupine le lecteur, rien qui lui fasse dire « Ce type est dingue » ou « c’est du délire cette histoire ». En plus du manque d’originalité, on ne retrouve donc même pas la patte de l’auteur. Le summum provocateur étant censé être la fameuse cachette du diamant (hé oui, il y a une histoire de diamant aussi) que l’on devine dès la fin du tome 1. On finit donc ce premier cycle en ayant l’impression d’avoir lu un truc déjà lu ailleurs, sans sel supplémentaire, sans goût nouveau. Ce n’est pas forcément désagréable, mais on aurait aimé quelque chose de plus étonnant de la part de ces deux auteurs pourtant peu académiques.

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