lundi 9 juillet 2007

Le spécialiste


Gli Specialisti
Sergio Corbucci
1968
Avec Johnny Hallyday

Résumé: Hud (Johnny Hallyday) le Spécialiste cherche un trésor, avec vaguement une histoire de frangin qui s’est fait trucider. Mais là n’est pas l’intérêt, l’intérêt c’est que Hud tire vite et juste, il a une cotte de maille et il cogne dur.

Johnny Hallyday, nous français, on aime bien se foutre de sa gueule. Faut dire qu’il cherche, mais bon… Sur ce Spécialiste il est donc tout naturel de dire qu’il joue comme un pied et qu’il n’est pas crédible pour un sou. En fait, ça sort presque comme un réflexe de dire ça ! Or ce n’est pas du tout le cas ! D’une part, ce Johnny Hallyday là est bien trop jeune pour que moi, pauvre trentenaire, puisse faire le lien avec le Johnny Hallyday actuel ou même avec celui des années 80, seules références visuelles en la matière en ce qui me concerne. C’est donc presque une tête inconnue qui apparaît à l’écran. Ensuite, et bien quoi qu’on dise, Johnny Hallyday est parfait. Ténébreux, énigmatique, ça, même une huître y arriverait. Mais ses dialogues sont dits sans fausses notes, ses combats sont très biens, sa garde robe très bien étudiée, et le chanteur ajoute une petite touche de fragilité, tout en étant convaincant en héros meurtri et blessé. En ce qui me concerne, Johnny Hallyday ne dénature donc pas ce correct western de Sergio Corbucci.

Le détail Johnny étant expédié, on retrouve un bon petit Corbucci en bonne forme, mais pas en super grande forme. En fait on s’ennuie pas mal, sauf à la fin. A part le héros taciturne, Corbucci nous refait son personnage de Shérif loufoque et maladroit (Gastone Moschin), mais intègre et juste. Ce shérif remet à leur place une bande de hippies crétins, car Corbucci n’aimait pas les hippies, qui sous couvert de libération sexuelle essayent de se taper les jeunes filles bien éduquées (par exemple Sylvie Fennec). Des hippies dans un western, il fallait oser, mais c’est pour ça qu’on aime le western spaghetti, oui ou non ? En outre ça permet, 40 ans plus tard, aux afficionados de concocter des questionnaires tordus avec des questions incongrues du genre « Dans quel western un shérif est pris à partie par une bande de hippies au cours d’une partie de pêche ? ». Alors messieurs les ricaneurs, un peu de respect.

Si Corbucci n’aimait pas le pacifisme béat des hippies, il n’aimait pas non plus la lâcheté des gens comme il faut. Sa ville est encore un repère de grippe-sous avares et couards que Hud humilie en foutant le feu à leur tas d’argent sale. Et si la corruption règne dans les villes, les bandits haut en couleur règnent toujours dans les plaines désertiques. Celui du Spécialiste (Mario Adorf) a le bras du capitaine crochet, et il organise des combats de coups de têtes avec le Shérif comme victime, mais qui s’en sort mystérieusement. Ce qui vous donnera l’occasion de briller aux dîners de Mme de Rostcshild en posant cette question au tout venant : « Dans quel western le shérif se bat uniquement à coup de têtes contre un bandit ?».

Tout ça c’est bien joli, c’est dépaysant ou ça tente de l’être, mais pour un Corbucci, ça manque de tripes, ça manque de méchanceté, ça manque ne noirceur. Serait-ce Johnny Hallyday qui aurait bataillé ferme pour atténuer la cruauté du réalisateur et ne pas trop écorner son image d’idole des jeunes? Si c’est le cas, il a flanché sur la fin, parce que ça part méchamment en vrille. Après s’être bien battu pour sauver une saleté de banquière du viol (Françoise Fabian), Johnny se prend une fourche dans le fémur, ce qui ne l’empêche pas de dessouder tous les bandits aussi efficacement que s’il avait un Uzi. Comme déjà indiqué plus haut, il brûle l’argent des notables, source de tous les maux, puis il va se vider de son sang au saloon, titubant, presque mort. Les hippies décident d’humilier la ville en mettant tout le monde à poil, et provoquent Hud en duel, ce qui nous amène une nouvelle question pour spécialistes : « Dans quel western voit on le héros gagner un duel alors qu’il n’a pas de balles dans son revolver ? ». Cette dernière partie, montrant Hud vraiment mal en point, remet le film sur les rails et récompense l’amateur de sa ténacité. Enfin la bonne vieille ambiance poisseuse et mortifère qui caractérise le genre ! Il était temps, mais ce n’est pas trop grave, car si ce n’est pas un grand western spaghetti, quelques bonnes idées, quelques thèmes chers au réalisateur, quelques trucs un peu zarb suffisent à ce petit Corbucci pour être cent fois plus intéressant que bon nombre de spagh tournés à la va-vite, sans budget, et sans ambition…

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