mercredi 19 mars 2025

Critique Hombre - 1967


Voici une critique du western Hombre, parue en Juillet-Août 1967 dans le numéro 118 de la revue "Cinéma 67". La critique est signée Guy Braucourt. La revue montre El Dorado en couverture, malheureusement aucun article au sujet de ce film à l'intérieur.

HOMBRE.


Film américain, de Martin Ritt. - Int. : Paul Newman, Frederich March, Diane Cilento.


À l’époque des grossières contrefaçons de westerns réalisées par les Italiens et les Espagnols, à l’époque où un public trop indulgent se laisse jeter en guise de poudre aux yeux la poussière des chemins des Pouilles ou de l’Andalousie, on espère encore que la lumière reviendra de l’Ouest (américain). Las ! Ce ne sont pas les médiocres RETOUR DES SEPT (que, comble d’ironie, les Américains sont venus tourner en Espagne), TEXAS, NOUS VOILÀ (désolante pochade qui démontre par l’absurde que, cessant de croire en lui-même, le western n’a plus pour seule ressource que de se parodier lourdement) et ce HOMBRE signé Martin Ritt, qui feront renaître un genre bien décadent.


Pour moitié remake (inavoué, celui-ci) de LA CHEVAUCHÉE FANTASTIQUE de Ford, le film de Ritt est composé par ailleurs de thèmes, de décors, de personnages qui traînent dans tous les westerns traditionnels. Diligence avec une demi-douzaine de passagers dont un financier véreux (Frederic March) et un héros (Paul Newman) dont la tare aux yeux des méchants est d’avoir été élevé par les Apaches, attaque de la diligence par les bandits, fusillade dans les rochers de l’Arizona (beau décor naturel mais déjà vu), marche dans le désert, cabane abandonnée et assiégée, affrontements moraux et raciaux dans le champ clos de la baraque, duel au soleil enfin et sacrifice chevaleresque du dur-égoïste-aux-yeux-bleus-mais-à-l’âme-généreuse. Tout y est, rien ne passe l’écran. Pourquoi ? Justement parce que « tout » c’est trop, et que faute d’un sujet personnel auquel il aurait tenu, le réalisateur de cette bonne méditation sur le western et la fin de l’Ouest d’antan qu’était HUD, s’est contenté de faire un film d’anthologie et de tout laisser reposer sur son interprète principal. Le temps n’est plus où ce genre noble avait ses maîtres, Ford, Mann, Walsh, Daves... À l’Ouest, rien de nouveau...

Guy Braucourt.

samedi 15 mars 2025

Critique Rio Conchos - 1965




Voici une critique de Rio Conchos, parue en janvier 1965 dans le numéro 92 de Cinéma 65. Elle est signée M.M, probablement Marcel MARTIN.

RIO CONCHOS

U.S.A. Réal. : Gordon Douglas. Sc. : Joseph Landon, Clair Huffaker.
Ph. : Joe MacDonald. Mus. : Jerry Goldschmidt.
Int. : Richard Boone, Stuart Whitman, Tony Franciosa, Edmond O’Brien, Wende Wagner, Warner Anderson.

Peu après la fin de la Guerre de Sécession, un aventurier militaire sudiste veut armer les tribus apaches pour les lancer contre la population civile : un groupe d’hommes courageux fera échouer ce sinistre dessein. Auteur de quelques bons westerns, dont le remarquable YELLOW-STONE KELLY, Gordon Douglas déploie les fastes d’un métier consommé au service d’une histoire fertile en péripéties et rehaussée d’éclatantes couleurs. Pourtant on ne sort jamais des limites du répertoire westernien et l’œuvre n’apporte aucun élément exceptionnel sur aucun plan.

M. M.

dimanche 9 mars 2025

Critique Will Penny Le Solitaire - 1968


Voici une critique du western Will Penny Le Solitaire, parue en Mars 1968 dans le numéro 124 de la revue "Cinéma 68". La critique est signée Guy Braucourt.

WILL PENNY LE SOLITAIRE (Will Penny)

Film américain en technicolor de Tom Gries, avec Charlton Heston, Joan Hackett, Donald Pleasence.

Encore un western de la période décadente. C’est-à-dire un western où, d’une part, le héros devenant un homme ordinaire, marqué par l’âge, la fatigue et le souci de gagner son pain, le réalisme quotidien de l’Ouest américain prend le pas sur la mythologie épico-hollywoodienne (et c’est là le côté positif de l’évolution du genre et du film de Tom Gries), mais d’autre part aussi un western où le refus de l’action héroïque et la volonté d’analyse psychologique amènent de longs bavardages, des conventionnelles et mélodramatisantes confrontations de personnages (vieux solitaire et jeune femme mal mariée, petit garçon qui trouve dans l’étranger le père affectueux qu’il n’a pas). D’où un film déchiré entre des intentions estimables et une réalisation plus que contestable, tout comme — pour les mêmes raisons d’ailleurs — LA ROUTE DE L’OUEST, de Andrew McLaglen. D’autant que, autour d’un Charlton Heston égal à lui-même et sur les larges épaules duquel repose tout le film, à part un Charlton Heston dont la sensibilité bourrue fait croire au personnage, l’interprétation est des plus médiocres avec une Joan Hackett (pourtant l’une des meilleures du « Groupe ») qui n’est pas à sa place, et un Donald Pleasence dont le cinéma est en train de faire depuis CUL-DE-SAC l’un des plus mauvais et ridiculement parodiques interprètes de méchants. Il faut tout de même signaler deux détails psychologiques intéressants dans le cadre traditionnel du western : l’argument très actuel du divorce servant à balayer le mari généreux que l’héroïne doit rejoindre, l’âge avoué du héros motivant le refus du happy end attendu. Mais cela même n’était-il pas dit déjà, et avec bien plus de finesse et bien moins de mots, dans le SHANE de Stevens et le GUNS IN THE AFTERNOON de Peckinpah ? Il est décidément bien difficile de n’avoir pas de souvenirs en matière de westerns…

G.B.

dimanche 2 mars 2025

Critique Le Grand McLintok - 1964

 Voici une critique du western Le Grand McLintock parue en Mars1964 dans le numéro 84 de la revue "Cinéma 64". La critique n'est pas signée.

LE GRAND McLINTOCK (McLINTOCK)

Film américain d’Andrew McLaglen avec John Wayne, Maureen O’Hara, Yvonne de Carlo, Patrick Wayne, Chill Wills.

Réalisé par le fils du défunt Victor McLaglen, ce western est une sorte de remake de L’HOMME TRANQUILLE dont l’action rassemble le couple fameux Wayne-O’Hara dans les situations qui ont fait le succès du classique de Ford. Film de famille où Patrick Wayne donne la réplique à son père et où tout est fait pour plaire au public : action et sentiment se partagent la vedette dans cette œuvrette à l’eau de rose très platement mise en scène.

dimanche 9 février 2025

Critique "le bon la brute et le truand" - 1968

 


Voici une critique du western italien Le bon la brute et le truand parue en Mai 1968 dans le numéro 126 de la revue "Cinéma 68". La critique est signée Guy Braucourt.


LE BON, LA BRUTE ET LE TRUAND

AVANTI LEONE !

Nous avons dit suffisamment de mal dans ces pages des pseudo-westerns à l’italienne (le plus souvent en les ignorant : au rythme d’une demi-douzaine sortant chaque mois sur les écrans parisiens, c’eût été de la place gâchée !), nous avons suffisamment rejeté le principe même du genre (faux, paresseux, nuisible au cinéma transalpin sauf bien sûr sur le plan commercial), pour reconnaître, puisque l’occasion s’en présente avec le dernier film de Sergio Leone, que le western made in Italia peut aboutir à une oeuvre accomplie, digne d’estime, constituant assurément le chef-d’œuvre du western non américain, valant mieux en tout cas que 90 % de la production hollywoodienne des dernières années (les réussites se comptant sur les doigts d’une seule main : Les Professionnels, El Dorado, Violence à Jéricho, The Shooting, présenté à la semaine de "Positif").

Au départ, un schéma très simple : trois hommes, tous un peu truands quoiqu'en dise un titre ironique, lancés sur la piste d’un fabuleux trésor. Trois tout aussi simples questions permettant de tenir le spectateur sous tension deux heures quarante durant : où, comment, qui. Et en ce qui concerne le décor, l’ambiance, les interprètes, pas de problèmes : on prend les mêmes et on recommence. Il y a donc les paysages familiers des Pouilles, les variations musicales guillerettes de Ennio Morricone sur le thème du premier volet de la trilogie léonienne (1), l’impassibilité « distanciatrice » (ou distanciée ?) de Clint Eastwood à qui l’on adjoint de nouveau l’étonnant faciès de Lee Van Cleef tout en faisant prendre du service à un troisième larron, l’Américain Eli Wallach chargé d’animer un peu l’action que le lymphatisme eastwoodien risquait fort de paralyser. Le ton, les effets, les tics sont les mêmes, eux aussi selon le principe d’une recette qui a fait ses preuves : violence exacerbée et sadisme triomphant, gros plans agressifs, gueules grimaçantes, lenteur étudiée jusqu’à l’exaspération pour appuyer quelques secondes explosives.

Pourtant, ce qui était dans les précédents (Pour une poignée de dollars, Et pour quelques dollars de plus), contrefaçon grossière et trucage pénible (démarquage d’un genre importé plus inspiration inavouée de films de Kurosawa), éléments purement extérieurs et facilités spectaculaires, devient ici style d’auteur – ou quasiment – mode d’expression d’un univers personnel. Point de héros, point de causes nobles, point de « bons » dans cet univers impitoyable : seulement des débrouillards, des crapules sans scrupules qui se livrent une guerre privée dans le cadre d’une guerre nationale (Sécession) qu’ils ignorent, qui ne les concerne que dans la mesure où elle facilite ou gêne leurs petites affaires.

Dès lors, le parti pris de réalisme sordide, de vulgarité photographique, les tics, les trucs et les trognes sont pleinement justifiés : comme disait à peu près Godard, le gros plan est aussi affaire de morale. Et ces masques qui suent l’avidité, la violence, le sadisme, la peur, ces faces trop humaines, ce sont celles d’hommes vidés de tout héroïsme "de cinéma", de tout romantisme pseudo-historique ("ils étaient bons, ils étaient forts, ils étaient grands : ils ont fait l’Ouest" dit la légende). Le latin et méditerranéen Leone retrouve d’ailleurs dans son film le ton et la "morale" d’une genre littéraire spécifiquement latin (espagnol plus précisément) : le roman picaresque. Le Bon, la Brute et le Truand apparaît comme une épopée comique picaresque avec son étourdissante succession d'épreuves qui n’ont pour but que de mettre en valeur l’ingéniosité de ses "picaros" (des coquins), avec son naturalisme pittoresque, ses gags-combines qui sont autant de manifestations de la débrouillardise du "héros" (le prisonnier attaché par une chaîne au poignet de son gardien assommé, la brise en le plaçant sur un rail au passage d’un train), l’aptitude de personnages ni tout à fait bons ni tout à fait méchants, à s’en sortir par tous les moyens, au-delà de toute morale, mais en forçant toujours notre sympathie...

L’originalité profonde de Leone (tout au moins, répétons-le, dans son dernier film) tient non seulement à sa manière de pousser les outrances jusqu’au pur délire, vidant ainsi les situations dramatiques de leur potentiel tragique (le face à face de quatre individus à mine patibulaire dans la première séquence, filmé comme les traditionnels règlements de comptes mais qui débouche sur l’agression grotesquement ratée d’un cinquième homme en train de manger ; le périlleux équilibre du truand sur la croix d’une tombe et au bout d’une corde), mais surtout et inversement à réussir par un humour macabre à peine soutenable à re-dramatiser la farce (la combine du chasseur de primes et du candidat à la pendaison : drôle et sans danger car le tireur vise bien, mais que survienne un importun et le complice confiant reste accroché à sa corde ; dans le camp nordiste, l’orchestre de prisonniers qui crée l’ambiance et couvre les cris pendant qu’on torture – référence évidente aux camps de concentration nazis avec leurs orchestres juifs ; le capitaine alcoolique de l’armée nordiste qui ne rêve que de détruire le pont qu’il est chargé de défendre).

Ajoutons à cela pour faire bonne mesure des gags de "cartoons" : le pistolet gardé dans le bain, les nordistes pris de loin pour des sudistes tant leur uniforme bleu est couvert de poussière...

Non, vraiment, aucune raison de bouder ce western (qui aurait sans doute gagné à être moins étiré, et aurait vu son efficacité encore accrue sur deux heures de durée) ! La voie du Nouveau Monde est à présent ouverte à Leone qui va tourner aux Etats-Unis son prochain film. On attend avec intérêt et curiosité le résultat de ce mouvement d’import-export culturel avec retour à l’envoyeur...

Guy Braucourt

(1) Mais qu’on ne s’y trompe pas : Morricone n’est pas seulement le compositeur des Dollars, des Ringo et autres Ecossais au Texas. Quelques films italiens de marque lui doivent leur exceptionnelle réussite musicale : Prima Della Rivoluzione, Pugni in Tasca, Uccellacci e Uccellini. Excusez du peu !

IL BUONO, IL BRUTTO E IL CATTIVO
Italie : 1967.
Réalisation : Sergio Leone.
Scénario et dialogues : Age, Scarpelli, Luciano Vincenzoni et Sergio Leone.
Prises de vues : Tonino delli Colli.
Musique : Ennio Morricone.
Interprétation : Clint Eastwood, Eli Wallach, Lee Van Cleef, Mario Brega, Aldo Giuffre, Livio Lorenzon, Luigi Pistilli, Enzo Petito, John Bartha.
Techniscope - Technicolor.

Critique "Et pour quelques dollars de plus" - 1966

Voici une critique du western italien Et pour quelques dollars de plus parue en Novembre 1966 dans le numéro 110 de la revue "Cinéma 66". La critique est signée G.B, probablement Guy Braucourt.


ET POUR QUELQUES DOLLARS DE PLUS

Italie. Réal. : Sergio Leone. - Sc. : Vincenzoni, Morzella et Leone. - Ph. : M. Dallamano. - Mus. : Ennio Morricone. - Int. : Clint Eastwood, Lee Van Cleef, G.M. Volonté.

Ayant ramassé plus d’un milliard de lires sur le seul marché italien avec « une poignée de dollars », le malin Leone a dû se dire « que sera-ce donc avec quelques dollars de plus »! Il a crânement signé de son nom cette fois, a même tenté d’écrire un scénario original au lieu de l’emprunter à Kurosawa (notons toutefois qu’il conserve le personnage japonais du ronin vagabond, le Sanjuro du « Yojinbo » — le Mercenaire — de Kurosawa, et adapte très vaguement la seconde aventure du héros dans « Tsubaki Sanjuro » — « Sanjuro des Camélias »), enfin à Jack Palance comme protagoniste de son film (pour se rabattre finalement sur Lee Van Cleef qui n’est d’ailleurs pas mal)...

Hélas ! pour lui comme pour nous, ce calcul si évidemment, si mathématiquement logique et qui ne nécessitait qu’une simple cote des changes, s’est avéré d’autant plus faux que la monnaie utilisée était grossièrement contrefaite. Cette histoire de deux « bounty killers », de deux chasseurs de primes s’associant pour détruire une bande de quinze pilleurs de banque est aussi répugnante par sa « morale » que par son traitement scénique deux longues heures durant, à coups de gros plans de visages ricanant et suant, et avec beaucoup moins de vigueur, de sadisme, et surtout d’humour que le précédent.

Alors, S.V.P., n’en jetez plus et la prochaine fois gardez la monnaie !

G.B.

Critique "Le dollar troué" - 1966


Voici une critique du western italien Le dollar troué parue en Novembre 1966 dans le numéro 110 de la revue "Cinéma 66". La critique n'est pas signée.


LE DOLLAR TROUÉ (Un dollaro bucato)

Italie. Réal. : Kelvin Jackson Paget. - Sc. : J. Finley et K.J.P. - Ph. : Tony Dry. - Mus. : Gianni Ferrio. - Int. : Montgomery Wood, Evelyn Stewart, Peter Cross, John Mac Douglas, Frank Farrel.


Après la Guerre de Sécession, deux frères sudistes partent vers l’Ouest pour faire fortune : ils sont mis face à face dans un duel à mort par un gentleman-gangster et le cadet est tué. Les aventures commencent... Encore un western italien réalisé sous un pseudonyme par un cinéaste dont nous n’avons pas réussi jusqu’ici à percer l’identité. Cela vaut peut-être mieux pour lui, car ce dollar, très correctement réalisé et interprété, n’est cependant que de la fausse monnaie.