samedi 22 mars 2014

Chacun pour soi




1967
Ognuno per se
Giorgio Capitani
Avec : Van Heflin, George Hilton, Klaus Kinski, Gilbert Roland

Réussite formelle autant qu'artistique, Chacun pour soi allie le meilleur du western européen et du western américain. Au premier, il emprunte les sales gueules, la noirceur et le nihilisme, au second un sens de la mesure et un soin particulier à la réalisation qui donne de la profondeur au scénario. On assiste aux habituels coups fourrés du spaghetti, mais ce n'est pas un jeu car tous les personnages sont fouillés et ambivalents. On assiste aux habituelles fusillades, mais on ne s'amuse pas à compter les morts comme d'habitude. On reconnaît, comme à chaque fois, les décors d'Almeria, mais ils sont si bien mis en valeur qu'on y croit sans peine, y compris cette fameuse dune filmée dans tous les sens. Tout est maîtrisé, cadré, sans que jamais Giorgio Capitani - dont c'est le seul western - ne perde de vue son histoire, sans jamais que le manque de moyens ne vienne le faire dévier de son objectif. Capitani porte une attention extrême aux détails, ici un revolver caché sous une pierre, là un flacon de quinine qui aura son importance, sans oublier ces deux tueurs du début qu'on retrouvera à la fin. Des détails toujours, comme Van Heflin encourageant son cheval, comme cette marmite qui se remplit d'eau au milieu de la mine, comme ce petit pas de danse de Gilbert Roland avant une fusillade, des détails donc, qui placent Chacun pour soi sans peine au-dessus du tout venant.

Capitani s'appuie sur une distribution solide, Van Heflin en tête, formidable en vieux chercheur d'or fatigué mais lucide, et George Hilton à contre-emploi, dont on regrette d'ailleurs que la relation père fils avec Van Heflin soit un peu oubliée quand le duo se transforme en quatuor. Les rôles de Kinski et Roland sont plus convenus mais tout aussi maîtrisés. Curd Ridel insiste dans la présentation du DVD (très bien, mais quelque peu noyée par la profusion de références) sur l'homosexualité entre Kinski et Hilton. Je n'ai pas trouvé cette relation si évidente que ça, mais cela semble faire consensus partout. [Edit suite à discussion en commentaires]  Sachant que le personnage de Kinski à pris le rôle du père du personnage de Hilton, j'y vois plutôt une relation incestueuse pédophile qui aurait perduré une fois l'âge adulte atteint. On voit d'ailleurs Hilton les yeux plongés dans le décolleté d'une serveuse, ce qui semblerait bien indiquer que sa relation avec Kinski est subie. Son désarroi lorsque celui-ci meurt serait donc plutôt lié à la perte du père, et non pas à la perte de l'amant. 

Quoi qu'il en soit, le film, par son thème et ses personnages, m'a quelque peu fait penser au double album des Monts de la Superstition de Charlier et Giraud. Même si le déroulement de l'histoire et les péripéties sont totalement différents entre les deux oeuvres, c'est cette minutie dans la réalisation, la richesse des situations qui tirent à chaque fois pleinement parti de tous les éléments disponibles (aridité, relief, manque d'eau, folie lancinante) qui emportent l'adhésion pleine et totale du lecteur/spectateur. L'un comme l'autre forment une réussite du genre, et si vous avez aimé l'un, je ne saurais trop vous conseiller de vous procurer l'autre.

Capture: DVD Artus

14 commentaires:

  1. Etrange que tu ne vois pas ce que la réalisation essaye pourtant de nous montrer clairement dans la relation entre Kinski et Hilton. Il y a également un consensus sur le rôle de la musique de Rustichelli. Elle donne une autre dimension au film, loin des clichés habituels (même si je les aime bien ces clichés, c'est d'ailleurs ce que je recherche en regardant tous ces spagh'). C'est vrai qu'on se croirait dans Lawrence d'Arabie à certains moments.

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  2. J'ai pas vu Le Trésor De La Sierra Madre dont le film semble s'inspirer. Y as-tu jeter un coup d'oeil? Pour en revenir au film, la scène où les quatre sont pris en embuscade lors de la halte est tout simplement excellente, le petit pas de danse de Roland, la complicité du groupe, ils ont l'air plus mille fois plus cool que les Expendabeulz.

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  3. Ce n'est pas vraiment que je ne le vois pas, mais toutes les critiques, tous les commentaires insistent sur la relation homosexuelle du couple Hilton /Kinski, pour ma part, et dans la mesure où Hilton indique à Heflin que c'est Kinski qui a joué le rôle de père quand celui-ci est parti, j'y vois plutôt une relation incestueuse pédophile, qui perdure une fois l'enfant devenu adulte. Ce qui pour le coup n'a rien à voir avec l'homosexualité...

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    1. C'est un peu tordu mais ça se tient.

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    2. Tordu, pourtant on voit bien Hilton sortir de la diligence en galante compagnie, on le voit également plonger son regard dans le décolleté d'une serveuse. Ça se tient tellement que je vais mettre mon texte à jour...

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    3. L'homosexualité refoulée, ça existe aussi.

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    4. Toutes les scènes montrent l'ascendant de Kinski sur Hilton. Relation homosexuelle il y a, mais à sens unique elle est !

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  4. En ce qui concerne Le trésor de la Sierra Madre, je l'ai vu il y a longtemps. Je ne peux pas te dire pour la connexion entre les deux. J'ai vu Le jardin du Diable que certains rapprochent aussi de ce film, la ressemblance ne m'a pas frappé.

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    1. J'ai pas lu les commentaires faisant ce rapprochement mais les passages à cheval à flanc de falaise ont pu y faire penser.

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    2. C'est Jo sur Western Maniac qui parlait de ça je crois. D'ailleurs il n'intervient plus sur ce forum ??

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  5. J'ai pu lire ce commentaire sur western maniac : "les donneurs de leçon ont déserté le forum". Mais parlaient-ils de Jo? En tout cas, plus de trace de ses interventions sur le forum, mais il continue à alimenter son blog. Moi j'aimais bien ses interventions pointilleuses.

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  6. Bon, je ne sais pas pourquoi mais blogger ça ne marche plus de chez moi...
    Beaucoup aimé ce western qui m'a remotivé côté western italien; Le pas de danse de Roland, c'est inoubliable. Sinon je suis assez d'accord avec toi sur la relation Kinski/Hilton, j'y ai vu surtout un rapport de domination sado-maso, limite de l'hypnotisme. Ça n'empêche pas qu'ils puissent être homos, mais ça ne suffit pas à décrire cette relation. En tout cas, ce duo d'acteurs, ça fait toujours des étincelles.

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  7. Le DVD "LES COLTS AU SOLEIL" sort le 6 mai 2014 en DVD en VOST et VF. Un excellent Western à tort méconnu ! Avec un casting haut de gamme: Richard CRENNA; Stephen BOYD; Rosanna SCHIAFFINO.

    L'histoire: Après une agression, Noon a perdu la mémoire. Laissé pour mort, il se met en quête de son identité et rencontre alors la charmante Fan. Attiré par la jeune femme, Noon est surpris d'apprendre qu'elle est victime d'un complot, dont il semble être l’instigateur...

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