Bataille sans merci
Gun Fury
1953
Raoul Walsh
Avec: Rock Hudson
France 3 mon amour diffusait donc un western en cette après-midi grise de premier Mai. Voici pourquoi je paye la redevance : quelques westerns à Noël, un western le premier Mai, un western de temps en temps tard le soir. Au final, ce n’est pas si mal n’est ce pas ? En tout cas on ne va pas se plaindre.
Surtout qu’en plus c’est du bon, sans tâche sans défaut. Dans la diligence, on se passe le whisky, les chevaux galopent et bien sûr l’embuscade est là. Le héros meurt, vite, trop vite, on ne s’inquiète guère de le voir dans la poussière rouge au milieu des rochers imposants qui s’empilent comme des lego. Les bandits s’emparent de sa fiancée, damn ! La musique violoneuse qui s’envole pour souligner l’action détourne l’attention de Tep’ junior de son cube fisherprice, signe que le marketing auditif des années 50 est encore efficace sur les jeunes générations.
La femme, au milieu des canyons, avec sa robe verte inadaptée aux conditions rigoureuses du désert, non seulement n’est pas ridicule, mais au contraire, en impose, elle forme avec la nature un tableau coloré très remarquable. Refusant les avances du chef des bandits, refusant de perdre ses atours féminins, refusant l’aide des quelques bandits qui la prennent en pitié, Donna Reed est digne et orgueilleuse, bien qu’inquiète.
Le numéro deux des bandits (Leo Gordon), abandonné aux vautours pour avoir voulu abandonner la femme, s’associe avec notre héros ressuscité des morts (Rock Hudson un peu binaire), pour poursuivre la bande qui a emmené la femme. Leo Gordon c’est un peu Richard Widmark dans L’homme aux colts d’or mais un peu seulement. Le bandit qui a bon fond, mais qui a du mal à quitter l’influence de son chef. Tout ce petit monde se poursuit sans relâche comme on poursuit un mauvais rêve. Les tensions s’exacerbent, les bandits voudraient bien se débarrasser de la fille qui les ralentit, mais leur chef (Phil Carey) en est tombé amoureux. Parmi les bandits, on reconnaît Lee Marvin, pas encore star, mais déjà bien présent. Du coté des bons, un indien caricatural se joint à la chasse, lui aussi a des comptes à rendre, toujours la même quête furieuse du sang qui appelle le sang, une vie pour une vie, alors que tous les petits shérifs et valeureux citoyens rencontrés sur le chemin refusent leur aide à notre trio, car personne ne veut risquer sa vie pour celle des autres. Alors que le dénouement approche, notre héros ne fait pas le poids face au méchant. Heureusement l’indien est là, qui décanille tout le monde à la winchester, et qui sauve le héros d’un lancer de couteau adroit. Mais c’est quand même le blanc qui embrasse la femme dans le plan final.
1h15 chrono, on n’a pas vraiment le temps de s’ennuyer. De temps en temps, des objets nous arrivent en pleine tronche, ou les sabots d’un cheval, ou la lame de l’indien, menaçante qui s’approche. C’est que le film avait été tourné en 3D, trente ans avant le Futuroscope qui utilise encore aujourd’hui les mêmes procédés grossiers pour gérer les « whaaa » et les « houuu » du spectateur. Evidemment, France 3 mon amour n’a pas su exploiter les capacités cachées du Secam analogique pour restituer ces effets sur nos écrans cathodiques. Peut-être dans vingt ans…
Quand on éteint le poste, on n’est pas déçu par ce bon petit western de série, mais il y a un truc qui turlupine l’esprit, un truc qui nous chagrine quand même sans trop savoir quoi. On récupère le programme TV et l’aiguillon qui picote les neurones se révèle soudain : « Il s’agit d’un film de Raoul Walsh ! ». On s’inquiète, on se repasse le film dans la tête : « ne valait-il pas mieux que ce jugement hâtif de série B sympathique ? », quand même Raoul Walsh quoi… Renseignement pris, il semblerait qu’il s’agisse d’un western mineur dans l’œuvre du grand Walsh. Ouf, on n’est donc pas passé à coté d’un chef d’œuvre sans le savoir. Rendez-vous est donc pris pour voir ou revoir les westerns plus réputés du maître : The big Trail, They Died with Their Boots On. Allez France 3 chérie, encore un effort !
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