lundi 2 juillet 2007

The Shooting



1966

Monte Hellman


Avec : Warren Oates, Jack Nicholson, Millie Perkins, Will Hutchins




Willett Gashade (Warren Oates) et son associé Coley (Will Hutchins) escortent une belle jeune femme (Millie Perkins) jusqu’à la ville de Kingsley. Plus ils avancent, plus la végétation se fait rare, et plus il devient clair que la jeune femme poursuit quelqu’un. Ils sont bientôt rejoints par Billy Spear (Jack Nicholson), un tueur à gage plutôt inquiétant.

« Les us et coutumes du genre sont dynamités par les sentiments intérieurs mis à nu » Critique de dvdrama. (
http://www.dvdrama.com/fiche.php?6184&ouzesuis=3&mode=test)

« le plus brillant dans sa façon de peler méticuleusement, tranche par tranche, un genre tel que le western pour n’en laisser qu’un squelette » Critique d’écran large. (
http://www.ecranlarge.com/critique-cinema-329.php)

« Hellman ne suit pas de linéarité dramatique, dilue les codes du western à tel point que le spectateur perd ses repères. » Critique de DVDclassik (
http://www.dvdclassik.com/Critiques/coffret-monte-hellman-dvd.htm)

Dans Rainbow Valley, on voit John Wayne poursuivre des bandits, eux même poursuivant Georges 'Gabby' Hayes en automobile. Voilà déjà en 1935 un code du western sacrément dynamité. Dans le premier épisode de The Miracle Rider en 1935 toujours, l’intro montre la disparition de l’Indien face au méchant blanc. Diable, encore un us du western nettement dilué ! Dans le Vol du Rapide en 1903, Edwin S. Porter réduisait déjà son western à l’état de squelette désarticulé en prévoyant une séquence choc (le bandit qui tire sur les spectateurs) projetée en début ou en fin de film. Il était une fois dans l’Ouest, Butch Cassidy et le Kid, Impitoyable, Missouri Breaks, Jeremiah Johnson, Mon Nom est Personne, Un nommé Cable Hogue, Little Big Man, Le Reptile, Duel au Soleil, Quarante Tueurs, Une nuit en enfer 3, Django & Sartana, … en fait, les westerns qui démystifient le western en en contournant les archétypes sont tellement nombreux que ce ne serait pas rendre justice au film de Monte Hellman que de le réduire uniquement à cela.

En premier lieu, tous les codes du western sont parfaitement respectés. L’avancée dans le désert est lente, haletante, poussiéreuse et tendue. Le réalisme des situations se cristallise autour d’éléments pragmatiques parfaitement inscrits dans le genre western. Willet Gashade suit une piste, qui est parfois « froide », parfois « à un ou deux jours d’avance ». Les chevaux sont une pièce maîtresse de la progression de l’intrigue : ils sont changés, abattus ou abandonnés, sellés et dessellés, bichonnés ou sauvés de la mort moyennant 50 dollars. Ils se mettent à boiter, et quand l’un des protagonistes n’a plus de cheval, il est abandonné dans le désert. Il n’y a qu’à voir la dégaine des chevaux en fin de film, défaits et fourbus, pour constater que Monte Hellman prend à cœur la crédibilité des situations et ne cherche pas uniquement à composer un film expérimental à base de tourments humains enfermés dans l’immensité du désert. Après les chevaux, un autre élément typique du western prend une dimension d’importance considérable : l’eau. L’eau qui vient bien sûr à manquer après avoir été « stagnante » voire « empoisonnée ». L’eau est cet élément capital qui est accaparé par le plus fort (le tueur à gage) quand elle commence à se faire rare. L’épuisement des poursuivis/poursuivants est encore un code non détourné, la chaleur et la sècheresse se fait sentir dans ces immenses décors désertiques baignés par un soleil qui « grille la cervelle ». Enfin, les armes, dès le début, sont ces petits engins de mort qui régissent les rapports humains dans l’Ouest sauvage. Gashade qui se méfie initialement de Coley lui confisque son revolver, pour lui intimer ensuite l’ordre de s’en procurer d’autres. Le tueur à gage qui tire plus vite que son ombre prend soin de désarmer tout le monde, et la première chose que fait Coley, abandonné dans le désert, est de récupérer son flingue. Et puis cette autre figure séculaire du western qu’est la mort par légitime défense (« he drew first on me ») est aussi respectée. La femme, comme toujours dans les westerns, est moteur de l’action, comme toujours dans les westerns elle est belle, et comme toujours dans les westerns elle est entêtée. Comme toujours dans les westerns, il s’agit d’une histoire de vengeance, et comme souvent, les personnages ont un passé trouble qui leur colle à la peau.



 

Alors bien sûr, le but n’est pas de montrer que The Shooting - dont l’ancien titre français La mort tragique de Leland Drum semble avoir été sacrifié à l’autel du tout english - est un western comme les autres. Mais ce n’est pas parce que le film contourne ces fameux « codes » du western qu’il n’est pas un western comme les autres. C’est plutôt parce qu’il présente des personnages sombres, énigmatiques dont les motivations ne sont claires pour personne. Des anti-héros un peu benêts (Coley) ou résignés (Gashade). C’est parce qu’il offre des lignes de dialogues décalés, parfois saugrenues, parfois lourdes de sens (« Le but d’une chasse c’est de tuer »), parfois inattendues. C’est parce qu’il donne à voir des petites scènes « atypiques » comme les affectionne le cinéma indépendant (la mort de l’oiseau, le barbu seul dans le désert, l’indien qui ne répond pas, le décalage entre le récit initial de Coley et les images présentées) qui déstabilisent la progression linéaire de l’intrigue pour mieux surprendre le spectateur. Enfin c’est parce qu’il présente peu de personnages, tous enfermés dehors dans un huis clos naturel, tous méfiants, contraints de cheminer ensemble. Et bien sûr, c’est parce qu’il se conclue sur un gunfight surprenant, à la conclusion ouverte ou sujette à de multiples interprétations sur la nature de l’anti-héros Gashade. Un western énigmatique et surprenant, c’est entendu, mais un sacré morceau de western !





2 commentaires:

  1. Ai rencontré en mars dernier Monte Hellman au Festival Cinéma d'Alès et il n'est toujours pas décidé à donner plus d'explication sur cette fin hallucinante; Et, pour ma part, il a bien raison !
    Ce site est toujours un plaisir à visiter.

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  2. Il y a un ou deux ans, il y a une rumeur qui disait qu'il allait tourner un film sur les Daltons.
    Il n'a rien indiqué sur des projets de western ?

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