samedi 30 juin 2007

Une corde, un colt


Un Western Cocorico tout simplement réussi.
Cimitero senza croci
1969
Robert Hossein
Avec: Robert Hossein, Michèle Mercier


La belle Maria (Michèle Mercier) voit son mari pendu sans autre forme de procès par la famille Rogers, qui fait la loi dans la région. Elle fait appel à Manuel, pistolero solitaire, pour se venger. Sa vengeance est une vengeance d’honneur, une vengeance qui n’appelle pas le sang, mais plutôt l’humiliation. Mais les anciens associés de son mari essayent de pervertir le processus en cherchant l’argent également. Bien sûr, la poudre finit par parler…



A plus d’un titre, Une Corde, un Colt est un bon petit western spaghetti qui fait honneur au genre. D’abord parce que les codes sont présents et respectés, sans chercher à les détourner ou à les expliciter d’une quelconque manière. Robert Hossein campe un pistolero mystérieux assez convaincant. Il tire de la main gauche et porte un gant noir à la main droite qui lui permet d’actionner le chien très vite pour accélérer sa cadence de tir. Et les scènes de tir que l’on pourrait trouver trop rapides (les bouteilles cassées, le duel final) s’expliquent de cette manière. Manuel mâchouille son cigare, ne parle quasiment pas et porte la barbe de trois jours règlementaire. Il possède en outre un regard de chien battu qui rappelle Jean-Louis Trintignant dans Le Grand Silence. C’est sans doute la marque de ces acteurs français de faire transparaître l’humanité et la mélancolie de leur personnage, même quand le rôle ne s’y prête à priori pas. On peut aussi rétorquer qu’ils n’ont pas la carrure, mais cela est un autre débat. Le thème de la vengeance, la soif omniprésente de l’argent, les poursuites, les dialogues très rares et la musique d’André Hossein ne nous trompent pas, nous sommes bien dans un western spaghetti, avec son passage à tabac agrémenté de whisky versé sur les blessures vives (ouch), avec ses morts violentes et ses cadrages biscornus dans le désert aride, avec son village fantôme, comme un mirage dans le désert. Tout est là et la pesanteur du non-dit et la force des regards poussent les hommes à la tragédie, dont tout le monde connaît l’issue à l’avance.


Mais Une Corde, un Colt est aussi un film qui ménage quelques surprises. Que l’on ne s’y trompe pas, le personnage principal n’est pas Manuel, mais Maria. C’est elle qui est à l’origine du carnage, c’est elle qui agit. Qu’un western puisse avoir pour moteur de l’action une femme, et non pas un trésor ou un héros meurtri, voilà qui est peu commun dans le western européen et dans le western tout court. Si peu commun en fait que cet aspect du film ne transparaît pas immédiatement, c’est seulement une fois le film vu que l’on réalise que Michelle Mercier est au fond la star du film, comme si Hossein n’avait en définitive pas eu le cran d’annoncer : « ceci est un western de femme ». L’autre personnage féminin, la fille des Rogers, n’a d’ailleurs pas non plus un rôle négligeable, puisque c’est elle qui tire la dernière balle. Et la dernière balle tue …
Autre aspect peu courant dans le western spaghetti que Hossein a plus ou moins tenté d’introduire sans trop le dire : l’Amour. On découvre petit à petit et in fine que Manuel et Maria s’aiment depuis longtemps sans se l’avouer (faut dire qu’ils ne se parlent pas beaucoup…). Malheureusement le ressors dramatique et tragique que l’on aurait pu tirer de cet amour raté est largement sous-exploité, comme par peur de ne pas faire assez spaghetti. Pourtant des films comme Le Dernier des salauds montrent que « histoire d’amour » et « western spaghetti » ne sont pas deux termes antithétiques. Malgré tout, il est agréable de découvrir que le pistolero ténébreux n’est pas uniquement un robot, mais qu’il est également humain. Les deux ex-associés de feu le mari de Maria sont aussi intéressants. Loin d’être de simples canailles sans foi ni loi, ils cherchent à tirer parti de la situation pour s’enrichir. Mais ils savent aussi respecter les termes d’un marché, et il ne leur vient même pas à l’idée de garder la part qui revient à Maria. C’est par contre du coté des méchants que le casting pêche un peu, les méchants ne sont tout simplement pas assez méchants. Ils font certes planer la menace de mort à tout instant, mais sans démesure, sans folie, sans éclat. Dommage!
Enfin, comme souvent dans ces productions, on trouve quelques scènes qui détonnent, inattendues voire incompréhensibles. Il s’agit bien sûr de la scène du repas, drôle, aux incroyables bruitages, et qui renforce encore le coté humain de Manuel, tout en achevant un peu plus la non-crédibilité des Rogers en tant que méchants de service. Il s’agit également du viol de la fille des Rogers. Quid, why, what for, porque ? Pourquoi Manuel laisse t-il faire ? Que signifie ce long échange de regards entre Manuel et Maria pendant que les deux autres accomplissent leur basse besogne ? Quelques non-dits, quelques mystères qui pimentent un peu plus un plat de spaghetti déjà pas mal gouteux.


Où le voir ? : Il est passé sur Canal+ au Cinéma de Quartier. Merci à la personne de Western Movies qui m’a prêté son enregistrement.


Rumeur 1 : une rumeur affirme de source sûre que Sergio Leone joue le rôle du tenancier de l’hôtel, du barman du Saloon et du patriarche des Rogers. Il paraîtrait aussi que Leone a tourné la scène du début, la plupart des scènes du milieu, la scène de la fin, ainsi que la scène du repas, la scène des baffes et la scène de la pissotière !!!!! Mais cela reste à vérifier !!!!!!!
Rumeur 2 : Selon la cousine de l’arrière grand-mère de Dario Argento, qui a participé au scénario, Robert Hossein passait plus de temps à chercher à coucher avec l’ensemble du personnel féminin de la production et du casting, au lieu d’essayer de faire un bon film. Bien sûr, on attend avidement la confirmation de Robert Hossein lui-même sur ce point!!!!!!!!!!!

4 commentaires:

  1. Bonjour Tepepa, j'ai découvert votre excellent blog par hasard en recherchant des interviews de Sergio Leone. Je suis novice en matière de western et c'est avec surprise que je découvre ce film de Robert Hossein. J'aurais beaucoup aimé le voir, malheureusement le support me manque. Je ne suis pas du genre à mendier mais auriez-vous la gentillesse et l'amabilité de me fournir une copie de votre enregistrement de Canal+ ? Je vous rembourserai bien sûr tous vos frais et vous rétribuerai pour cela. Je suis sincèrement de venir polluer votre blog avec ma demande mais je n'ai pas trouvé de formulaire de contact. Je vous laisse mon adresse e-mail en espérant avoir de vos nouvelles. Je vous remercie et vous félicite pour votre blog que je continuerai à consulter avec plaisir.
    Très cordialement.
    gulden(point)draak(at)yahoo(point)fr

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  2. Cher Monsieur vous pouvez trouver ce western ici : http://www.amazon.de/Friedhof-ohne-Kreuze-Robert-Hossein/dp/B000TGCE90/ref=sr_1_1?ie=UTF8&s=dvd&qid=1208729971&sr=8-1

    sur Amazon cherchez "Friedhof ohne Kreuze"

    le DVD a une piste française pour le film, et une interview de Robert Hossein (environ 20 min) y est aussi proposé.

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  3. Et bien voilà, j'allais répondre qu'il existait quelque part un DVD allemand avec piste française, mais si un gentil anonyme met le lien, c'est encore mieux! Merci! :-)

    Je n'ai d'ailleurs plus cet enregistrement que j'ai rendu à la personne de Western Movies qui me l'avait prêté. Je vous encourage à vous inscrire sur ce forum si vous voulez découvrir le western et faire quelques échanges.

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  4. le lien c'est moi en fait ... ça m'apprendra à poster en anonyme tiens ! lol

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