dimanche 10 juin 2007

Le mouton à cinq pattes

Le Mouton à cinq pattes
1954
Henri Verneuil
Avec Fernandel, Louis de Funès


Naguère, le sieur Flingobis, qui a sabré son blog comme on sabre un mauvais souvenir, évoqua avec délice Le Mouton à Cinq pattes de Henri Verneuil en déclarant à qui voulait bien l’entendre que Sergio Leone avait piqué l’essence de son style dans ce film. Quelques mois plus tard, j’ai regardé ce petit film sympathique et drôle, curieux de voir ça par moi-même.
Le mouton à cinq pattes raconte l’histoire de cinq quintuplés qui jadis rendirent leur village célèbre. C’est un film à sketch où Fernandel interprète chaque quintuplé ainsi que leur père bougon. Le film ne manque pas d’audace (plus de seins nus que dans n’importe quel Brian de Palma), d’humour noir (le sketch avec le prétendant mort, le petit jeu morbide de De Funès) et de clins d'oeil (l'apparition de Don Camillo), ce qui en soit suffit à en faire une curiosité estimable.


Mais pour tous les fans de Sergio Leone, le sketch le plus intéressant reste celui du jeu à la mouche dans le cargo. Fernandel, en commandant de cargo louche, a tout perdu au poker face à trois gars patibulaires. Il décide de mettre en jeu son bateau et sa pépée. Une mouche est capturée et relâchée, tous hublots fermés. Deux morceaux de sucre sont posés sur la table. Si la mouche se pose sur le morceau de sucre le plus près de Fernandel, il remporte la mise, si elle se pose sur le morceau de sucre le plus proche des trois escogriffes, il perd son bateau et sa nana.La séquence est filmée comme Leone l’aurait fait : gros plans sur la mouche, sur les tronches des types, sur la sueur qui coule à flot, on entend le bzzz de la mouche, ainsi que le rouli du bateau qui tangue, comme un motif sonore obsédant. Les gars sont crispés dans l’attente et se sortent les yeux des orbites à observer la mouche. Les détails de la cabine sont étudiés à souhait : les cartes à jouer qui jonchent la table, le ventilateur suintant de saleté, le perroquet dans sa cage qui crie « ta gueule » et la mouche qui se pose sur le sein de la vahiné qui n’ose pas bouger. Mieux que Leone, la mouche en gros plan est une mouche réelle, alors que celle de Leone est fausse. C’est un vrai petit bonheur que de voir ça. Ça se termine même par un mini passage à tabac suivi d’un petit air à l’harmonica !

bzzzz…






krrr gnii, krr gniii, krrrr


krrrrrrrr…


Même le début, sans être aussi flagrant, rappelle un peu le style des westerns italiens : les roues de la chaise roulante du grand père grincent dans le quasi-silence, pendant qu’une troupe de théâtre tente de jouer Le Cid.

Le but de ce petit article n’est pas de dénoncer un quelconque plagiat de Leone sur Verneuil, il est juste de partager ce petit plaisir et de faire redécouvrir peut-être à certains le grand talent du cinéaste populaire qu’était Henri Verneuil (La bataille de San Sebastian, I comme Icare) et la bonhomie joviale de Fernandel.

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