dimanche 3 juin 2007

Old boy vs Les années sauvages


En tout état de cause, ce papelard n’aurait dû traiter que de ce petit western diffusé l'autre jour sur France 3, qu’est Les Années Sauvages (Rudolph Maté 1956). Mais le hasard a voulu que je vois Old Boy juste avant, et cette collision de genre, d’époque et de style peut parfois provoquer des bouleversements émotionnels qui mettent l’homme aux abois. Old Boy c’est ce thriller à la mode datant de 2003, cette chose de Park Chan-wook adorée par les lecteurs de dvdrama, la quintessence d’un certain souffle venant d’Asie. On m’avait même dit : « ha ha ha, tu devrais regarder Old Boy tu verras, ça va être la claque de ta vie ! » « Ha ha ha, que j’avais répondu, que non, la claque de ma vie c’est Le Bon la brute et le Truand et une claque par vie, ça me suffit ! » Et puis bon, finalement j’ai regardé quand même…Alors oui, Old Boy c’est une jolie claque! C’est l’histoire d’un type qui est séquestré pendant 15 ans sans raison apparente, par des inconnus. Et quand on le libère, il doit découvrir qui, et pourquoi. Toutes les cinq minutes, ça rebondit. Toutes les 30 secondes, on te balance une trouvaille scénaristique, ou visuelle, en pleine tronche. C’est violent, c’est malsain, c’est affreux, c’est désespéré, c’est pessimiste et ça fait mal aux dents. Et c’est brillant ! Et je ne parle même pas de l’intelligence de la confrontation finale, ni du brio d’une certaine « scène dans le couloir » qui vaut à elle seule de voir le film, pour peu qu’on apprécie la baston.
Old Boy est donc bien une claque, je mentirais en disant que je n’ai pas aimé le film, mais Old boy est une claque qui arrive trop tard. Du coup pour moi, c’est plutôt une claquette. Je ne dis pas, si j’avais vu ce film il y a quinze ans, j’y aurais peut-être adhéré plus pleinement. Mais aujourd’hui, passé la claque, que reste-t-il ? Rien justement, une petite douleur sur la joue (ou ici aux dents). Les claques cinématographiques, finalement, c’est une seule par vie. Et quand on l’a déjà reçu sa claque, on ne voit dans Old Boy que ce qu’on reprochait à l’époque à Sergio Leone : une mise en scène tapageuse, une ode à l’esbroufe où la virtuosité ne sert qu’à dissimuler les incohérences d’un scénario qui au fond ne tient pas debout, une claque pour le plaisir de mettre une claque. Etrange paradoxe de retrouver ailleurs les défauts que l’on ne saurait voir dans ses films de chevet !



Quand, légèrement décontenancé, ne sachant pas trop quoi penser de Old Boy, vous mettez Les Années Sauvages (The Rawhide years) dans le magnétoscope, un sourire ravi vous revient instantanément au visage. Ici tout est linéaire, simple et prévisible, à l’image d’un cinéma que seul Clint Eastwood honore encore aujourd’hui. Le gentil héros est un bon bougre qui doit prouver son innocence (Tony Curtis). Son compagnon est un voleur de chevaux, qui est aussi un bon bougre et qui a toujours le sourire (Arthur Kennedy). Les péripéties se suivent avec bonheur, hop une poursuite, hop une baston, hop une fusillade, hop un retournement de situation prévisible, hop tout est bien qui finit bien. Après Old Boy, on a l’impression de regarder un film pour mômes, et l’étrange vérité, c’est que ça fait du bien ! Dans Les années sauvages, il y a pourtant quelques éléments qui font grincer des dents : il y a ce lynchage d’un innocent qui n’a même pas le temps de protester, il y a ce type qui file des coups de ceinturons à notre beau jeune homme, mais c’est ce genre de détails que l’on se félicite de remarquer, parce qu’ils brisent la monotonie du film et lui donnent un contenu. Dans Old Boy c’est au contraire quand soudain il n’y a rien à remarquer que l’on est étonné.
Regarder Les Années Sauvages après Old Boy, c’est comme manger un steak frites après un plat délicat de sushi aux piments. On sait que ce n’est pas le plus fin, mais on sait ce qu’on mange. Regarder Les Années Sauvages après Old Boy, ça fait également mal au moral, surtout si vous vous surprenez à préférer Les Années Sauvages. Car si tel est le cas, c’est désormais officiel, vous faîtes partie des vieux cons ! Les années sauvages sont les années perdues, damn it, you god damned old fool, get on your horse, and get the hell outta here !
Ah, et merci France 3...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire