samedi 9 juin 2007

Les petites choses dans Et pour quelques dollars de plus...


Toujours aussi peu d’introduction scolaire les amis, entrons tout de suite directement immédiatement dans les petits détails qui me plaisent dans Et pour Quelques Dollars de Plus, là maintenant :


L’inconnu qui se fait descendre
Quand on regardait les westerns en famille à la Dernière Séance sur FR3, on jouait au jeu du « premier qui voit un cheval », car un nombre incalculable de westerns hollywoodiens débutent avec le héros, qui apparaît, au loin, sur son cheval, en sifflotant. Et c’est ainsi que débute Et Pour Quelques Dollars de Plus, mais notre héros se fait abattre immédiatement d’un coup de winchester. Leone commence donc son deuxième film par un coup de théâtre, par une petite surprise qui prend agréablement le spectateur à revers. On ne saura rien de plus sur le pauvre malheureux, il est là pour illustrer les lignes qui suivent sur le prix de la mort, pour servir d’introduction au métier de chasseur de prime : des types qui tirent leurs proies de loin et sans crier gare. A ce sujet, Sir Christopher Frayling indique que le tireur est probablement Clint Eastwood (un cigare qui s’allume…) qui descend un bandit. Pourquoi pas, rien n’interdit de le penser, mais pour moi, ce n’est pas le cas. En ce qui me concerne, il s’agit d’un chasseur de prime lambda, qui descend lâchement un petit desperado. Le personnage du Manchot ne me paraît pas du genre à tirer de loin, et dans les scènes qui suivent on le voit au contraire qui serre ses proies de près en prenant des risques. Si ce chasseur de prime initial devait vraiment être l’un des deux protagonistes principaux, ce serait plutôt le Colonel Mortimer, qui a appris à vivre vieux en tirant de loin, même si on voit dans la suite de l’histoire qu’il est loin d’être un lâche… Mais à la distance ou cette première victime est abattue, il est impossible au tireur d’être sûr d’avoir la bonne personne dans sa ligne de mire et ni le Manchot, ni le colonel Mortimer ne prendrait le risque de tuer un innocent.






Le pas très beau Galloway
Sergio Leone est connu pour filmer des trognes, et si on ne devait en retenir qu’une, ce serait celle du bandit Galloway. Les tics, les dents, le regard, un seul visage permettent de rendre inoubliable une scène déjà inoubliable. L’acteur a été identifié récemment sur le spaghetti web board, il s’agit de Jose Terrón, que l’on retrouve également dans Django et très très brièvement dans Le Bon la Brute et le Truand (c’est Shorty qui se fait pendre).






Le Manchot qui fait tout de la main gauche
La scène d’introduction de Clint Eastwood le montre attachant son cheval de la main gauche, jouant aux cartes de la main gauche, se battant uniquement de la main gauche, au point qu’on pourrait croire qu’il est vraiment manchot. Mais quand il faut tirer, il le fait de la main droite qui est cachée sous son poncho. Ce n’est pas vraiment un petit détail, vu que c’est assez primordial pour comprendre pourquoi le personnage de Clint Eastwood se fait appeler « le Manchot », mais c’est néanmoins un aspect que j’ai remarqué très tard, après avoir vu le film de nombreuses fois pendant l’adolescence. C’est curieux de voir que lorsqu’on est attaché à un film, on est souvent incapable de le revoir avec l’esprit frais : les détails que l’on comprend mal, on continue à les comprendre mal, même si l’on a acquis une plus grande maturité. Mon conseil : si vous aimez vraiment un film, aménagez vous de temps en temps des périodes d’abstinence de 5 ou 10 ans sans le voir, vous y gagnerez beaucoup.


La gaine en cuir
Le manchot porte à la main droite une espèce de gaine en cuir dont l’utilité est non élucidée (une meilleure préhension du revolver ? une protection contre la poudre brûlée, un stabilisateur qui encaisse les vibrations ?). Il faut surtout y voir un détail vestimentaire technique et/ou ornemental de plus qui forge l’univers du western italien.






La moitié de la barbe rasée
Dans les westerns, le barbier n’a généralement pas le temps de finir ce qu’il a commencé. Quand on voit un gars chez le barbier, il est à chaque fois dérangé par un gunfight ou une pendaison ou une bagarre qui le fait sortir séance tenante de la boutique, sans que cela ne soit visible sur le visage glabre du personnage. Sergio Leone prend à nouveau le contre-pied de cette petite tradition, le type qui sort du barbier en catastrophe se retrouve avec une bonne moitié de bonne grosse barbe sur le visage. Et ça recoupe sans doute une réalité historique : dans l’Ouest, quand on allait chez le barbier, c’était pas juste pour trois poils qui se battent en duel sur le menton.






Un peu de violence inutile
Il était une fois dans l’Ouest est souvent le plus apprécié des westerns de Sergio Leone, parce qu’il n’y a pas de violence inutile. Comme si Leone, par rapport à un film comme Et pour quelques dollars de plus, avait enfin cessé de jouer aux cowboys pour réaliser un vrai film d’adultes. Mais c’est oublier deux choses : primo, dans Il était une fois dans l’Ouest la violence est bien là, inutile ou pas, seulement elle est assez souvent hors champ (le meurtre de l’enfant, le massacre dans le train…). Deuxio, il n’y a pas de violence inutile dans Et Pour quelques dollars de plus. Prenons pour exemple la scène d’évasion de l’Indien, dont le caractère psychopathe pourrait déjà servir de prétexte pour toute violence inutile : les sentinelles poignardées sont « utiles », parce qu’il serait trop risqué d’essayer de les assommer, de les ligoter etc... Le meurtre du charpentier est « utile » parce qu’il pourrait compromettre le plan d’attaque de banque de l’Indien, et celui-ci n’a pas le temps d’acheter son silence, il est en pleine évasion. Les gardes qui se font tous tour à tour abattre sont « utiles » parce qu’ils sont menaçants, ils ne sont pas abattus de sang froid, enfin, le massacre de la direction par l’Indien est « utile » car on est dans le cadre de la vengeance. Beaucoup de morts certes pour une évasion par rapport à un western classique, mais pas de vraie violence inutile comme on en verra beaucoup par la suite, par exemple dans les Sabata où le body count est proprement affolant. Tous les morts dans Et pour quelques dollars de plus sont scénaristiquement justifiés. Comment ça ma démonstration est bancale et de toute façon on s’en fout, ce qui compte c’est que le film soit bon ?


Le petit charpentier
Il va et vient dans sa cage, il s’inquiète, fait les cents pas, pendant que l’Indien dort. Il est touchant ce pauvre charpentier, très touchant. L’Indien est calme curieusement, peut-être parce qu’en prison il n’a pas sa came. Le comportement de l’Indien ira progressivement du calme froid et calculateur au délire destructeur final. Les scènes n’ont bien sûr pas été tournées dans l’ordre narratif, mais on peut y voir la victoire progressive de Gian Maria Volonte sur Sergio Leone qui avait bien du mal à maîtriser le jeu outrancier de l’acteur. Au début, Leone parvient à maintenir l’acteur dans un jeu assez sobre et clinique, puis à la fin, épuisé, il lâche prise, et Volonte part en roue libre…






Une affiche clouée à coup de revolver
Le préposé aux affiches cloue les affiches « Wanted » de l’Indien avec la crosse de son revolver. C’est classique, c’est simple, et malgré l’éclatement des codes du western, Sergio Leone en respecte les règles de base les plus simples : on n’utilise jamais de marteau dans l’ouest, toujours la crosse de son revolver, au risque d’en affaiblir les propriétés balistiques. Imparable.






Leone tue sa propre fille
L’Indien se venge et tue la femme et la fille de celui qui l’a trahi (violence inutile ?). La petite fille est la propre fille du réalisateur. Il faut avoir du cran et être vraiment « entier » dans son travail pour faire une chose pareille : tuer sa propre fille d’un an et demi à l’écran. Il faut être totalement vide de superstition soi-même et complètement imperméable aux mauvais œil familial et au qu’en dira-t-on pour commettre un infanticide, même fictif. Sir Chistopher Frayling insiste beaucoup dans son commentaire audio sur les aspects comiques du film, alors que curieusement mon appréciation personnelle de Et pour quelques dollars de plus est absolument exempte de toute distanciation ironique par le biais de l’humour. Les westerns de Leone sont pour moi des tragédies à prendre au premier degré le plus pur, loin de toute volonté parodique. Mais le fait que le réalisateur fasse tuer sa propre fille va dans le sens de Frayling : la violence chez Leone, n’est vraiment pas à prendre au sérieux.






Les tueurs dans l’église
L’Indien entame le petit rituel de la montre pour abattre le traître. Chacun des tueurs est filmé successivement dans une pose qui lui est propre : accoudé, debout, assis de travers, une jambe relevée, une winchester sur la cuisse, le regard intense. Le même genre de plan est réitéré lorsque l’Indien expose sa parabole du petit meuble en bois. Sergio Leone ne se contente pas de les filmer dans l’expectative, il prend des instantanés de leur vie, de leur gestuelle, de leur façon d’être, sans verser dans le portrait simple et sans saveur. Aujourd’hui, toutes les rocks stars sont photographiées dans ce genre de poses, ténébreuses, cool et intenses à la fois. L’origine de ce style est à chercher chez Sergio Leone. Si Si !


Les liens du traître
Pendant le duel entre l’Indien et son traître, on trouve un gros plan sur la corde qui lui maintenait les mains liées dans le dos et qui vient d’être tranchée. C’est pas une simple ficelle, elle est toute tordue parce qu’on sent qu’il a essayé de s’en défaire, il y a des bouts de filasse qui dépassent… et c’est chouette. C’est pas le plus gros budget de l’histoire du cinéma, mais on y voit plus de choses réelles que dans Superman returns. Une corde arrachée en numérique, c’est beaucoup moins beau.




Eastwood regarde ses affiches sur son lit
Que font les chasseurs de primes quand ils ont fini leur journée de boulot ? Ils se reposent sur leur lit en consultant leur collection d’affiches qu’ils connaissent déjà par cœur, ils refont des comptes qu’il connaissent déjà par cœur, ils rêvent de grands coups et de rafler la mise avant les autres. Un peu comme un philatéliste qui contemple sa collection et rêves des timbres qu’il aimerait obtenir en parcourant son Yvert et Tellier. Eastwood dans sa première séquence, est filmé comme un robot, mais avec cette scène sur son lit, il devient soudainement humain, il devient un petit collectionneur avec ses petites manies.


L’Indien habillé en Peone
Après son évasion, l’Indien reste assez longtemps habillé en pauvre peon, avec ses guêtres écrues. Sa tenue sans fioritures n’entame en rien son statut de chef, respecté des siens. Et pour quelques dollars de plus est un peu la revanche des pays pauvres et du Tiers Monde sur 60 ans de western hollywoodien, on y voit enfin des mexicains tirer bien et juste et avoir des rôles de premier plan, on y voit des pueblos vides et asséchés par le soleil, on y voit la misère au quotidien. On peut rétorquer que c’est un peu léger pour classer Et pour quelques dollars de plus comme un film social. Mais rien n’interdit, au delà du plaisir de l’action pure et des rebondissements scénaristiques, d’apprécier ce genre de détails à leur juste valeur. Sans toutefois tomber dans l’excès inverse, comme certains qui voient dans Zombie un film social avant tout, en oubliant que l’argumentaire « primal » du film est quand même de voir des humains se faire étriper par des presqu’humains.






Les archives : les frères Morton tués par un chasseur de prime
Le colonel Mortimer parcourt les archives du journal local pour trouver l’identité du Manchot. Il y parvient et tombe sur cet article : « Les frères Morton tués par un chasseur de primes ». Un article frustrant parce qu’on voit la scène en photo, mais on ne la voit pas au cours du film. Et on aimerait bien. Une petite scène de gunfight de plus, encore une petite preuve de l’extraordinaire habileté aux armes du manchot. Leone nous met l’eau à la bouche en évoquant le passé riche en fureur et en coups de feu de ses personnages, et ça c’est passionnant. Remarquons que le colonel Mortimer – le vieux – consulte la presse, moyen d’information moderne à l’époque, alors que le Manchot – le jeune – préfère se renseigner à l’ancienne, en demandant aux vieux briscards qui connaissent tout le monde. Comme si dans Spy Games on avait vu Redford utiliser un portable GPS WAN ionique triphasé (je sais je suis pas crédible quand je cause technique…) et Brad Pitt un pigeon voyageur.


Le train qui casse tout dans la baraque
Une scène reprise par ailleurs dans Les Blues Brothers mais qui me fait à chaque fois poser la même question : avec tous les trains qui passent, est ce que ça vaut le coup de remettre à chaque fois la baraque en ordre, vu que chaque train qui passe fout toutes les bouteilles et babioles des étagères par terre. La réponse est simple, au temps de l’ouest, il devait y avoir un train par jour, pas plus, donc on peut imaginer que le vieux fou prenne le temps de remettre tout en ordre à chaque fois (en plus il est fou). Dans Blues Brothers les trains sont très fréquents, ça ne tient pas debout ! Et oui, c’est bien beau de pomper, mais il faut le faire bien…






Le manchot et le colonel Mortimer se reniflent comme deux chiens andalous
Avant de s’abîmer leur bottes et leurs chapeaux, le Manchot et le colonel Mortimer se tournent autour comme deux chiens qui se jaugent. On dit souvent de Leone qu’il filmait ses westerns comme on les joue dans les cours de récré quand on est petit. Les protagonistes accomplissent leurs actes dignes, machos et violents, mais au fond, ce sont des gamins qui jouent. Sergio Leone rajoute ici une thématique « animale », les deux opposants se flairent, ils jouent, mais ils jouent avec leur instinct.
Sinon, la référence à Bunuel, c’est juste pour faire joli, mais si quelqu’un remarque ou connaît un lien entre Un chien Andalou et Et pour quelques dollars de plus, exprimez vous !!




Niño couvre l’Indien
L’Indien s’endort sur son joint et Mario Brega couvre Gian Maria Volonte avec sa vareuse. C’est aussi lui qui lui allume ses joints, il le pouponne et veille sur lui. L’Indien est un psychopathe qui n’a jamais fini de grandir, il a besoin d’un substitut de mère pour être opérationnel dans la vie de tous les jours. Par contre pour faire le psychopathe, il se débrouille très bien tout seul. Concernant les joints, les commentaires audio et autres critiques font tout un foin de cet aspect du film qui pour ma part ne m’a jamais paru primordial, ni même spécialement visible. Les cigarettes de L’Indien pourraient tout aussi bien être des cigarettes normales, roulées, sans herbe qui fait planer dedans. Les scènes de dépendance peuvent également être prises à rebours : l’Indien a des spasmes nerveux, des tics de psychopathe, et il a besoin du tabac pour se calmer. A mon avis, c’est une vision des choses qui se tient, d’ailleurs, c’est celle que j’avais quand j’ai découvert le film et que je n’avais même pas l’âge de savoir ce que c’est qu’un joint…





L’évasion à la dynamite
Le Manchot fait évader un membre du gang de l’Indien à la dynamite. Pas de préparation, pas de plan, pas de concertation avec l’intéressé, qui a tout juste le temps de se planquer derrière son matelas. Mais la surprise est vite passée, l’homme se ressaisit immédiatement, saute illico de la fenêtre éventrée, et court à toutes jambes vers le Manchot. Ceci rejoint l’image de Tuco sautant en croupe derrière Blondin : pas de blabla, pas de finasseries inutiles, tous ces hommes sont des professionnels qui ont l’habitude de s’évader sans poser de questions.






Le Manchot casse un œuf de la main gauche
Casser un œuf d’une main, j’ai déjà beaucoup de mal, alors de la main gauche, j’ose même pas essayer. Eastwood a dû salement s’entraîner pour réussir à faire ça, d’où un gaspillage en œuf assez conséquent. De plus, tout ne semble pas parfait, j’ai l’impression qu’Eastwood laisse tomber des bouts de coquilles dans le plat. La preuve, c’est qu’il ne mange pas l’omelette une fois celle-ci cuite. Mais ce qui est important, c’est de voir le héros se faire cuire un œuf dans un western. Ça n’arrive pas tous les jours !
Au fait, juste avant ça, le Manchot tue trois ou quatre hommes de l’Indien pendant la pause café. C’est quand qu’il touche les primes de ceux là ? Il les laisse moisir au soleil et vient les récupérer après ? Il les a flanqué dans une grotte ? Il a eu le temps de passer chez un shérif quelconque pour toucher la prime avant de faire croire à l’attaque de la banque ?


Agua Caliente
Ce nom de pueblo mexicain est vraiment savoureux. « Eau chaude » n’est vraiment pas un village accueillant, et son nom ajoute une consonance hispanique mystérieuse et inquiétante. Superbe !
La route qui mène à Agua Caliente est bordée d'Agaves, dont une certaine sous-espèce permet de faire la tequila. Les grandes tiges que l'on observe au dessus des feuilles signalent la floraison de la plante qui n'a lieu qu'une seule fois en fin de vie de l'espèce (la plante se reproduit et meurt). Bizarre que toutes ces agaves fleurissent en même temps non? On s'en fout? Ha OK!






Eastwood a déjà sa carrière en tête
Eastwood joue un rôle de chasseur de primes, un genre de crapules dégoûtante qui vit aux marges de la légalité (voir La Horde Sauvage ou Adios California). Sergio Leone en fait des héros somme toute assez positifs. Lorsque qu’Eastwood entre dans Agua Caliente, il nous prive d’un petit duel avec les trois mexicanos. Au lieu de leur tirer dessus, il fait tomber quelques pommes. C’est dommage pour le spectateur de onze ans qui aurait bien voulu voir quelques morts de plus, mais c’est d’autant mieux pour le spectateur exigeant que Leone prend un malin plaisir à surprendre dans le bon sens. Eastwood est donc un « bon » chasseur de primes, qui prend soin de ne pas tuer de gens inutilement, et c’est toujours ça de pris pour sa carrière future, où il reprendra souvent des rôles d’hommes « aux limites » (Dirty Harry, Josey Wales), violents, mais justes.
Eastwood descend donc quelques pommes, mais pendant une seconde on se demande presque s’il ne va pas plutôt descendre le gamin qui essaye de cueillir les pommes. Les trois mexicanos, en toute logique devraient aussi se poser la question, et profiter du moment où Eastwood est de profil pour dégainer et l’abattre avant qu’il ne tue un enfant de leur village. Alors pourquoi ne le font ils pas ? Parce que de là où ils sont placés ils ne voient pas l’enfant, il y a me semble-t-il un mur dans l’axe, ils sont donc justes dans l’expectative de ce que Eastwood va faire. Oui mais alors s’ils ne voient pas l’enfant, ils ne voient pas les pommes, donc la démonstration de force d’Eastwood ne sert à rien ! Et combien de fois peut on couper un cheveu en quatre à propos d’une scène me direz vous ? Est-ce que chercher la petite bête à ce point ne gâche pas la force initiale ressentie à la première vision il y a vingt ans ? La réponse est non, mais en même temps vous avez raison : la scène est simplement magnifique.


Deux coups sur la porte
L’Indien ferme à clé la porte du débarras où il a placé le coffre. Pour être sûr de son coup, il frappe deux coups de poings dans la porte, histoire de vérifier qu’elle est vraiment fermée. Ça ne sert à rien, mais n’importe qui ferait ça, sachant qu’il y a un tas de dollars derrière la porte. L’Indien a encore quelques petits réflexes humains en réserve.


La mélancolie de la montre
L’Indien envoie ses hommes se faire éliminer par les deux chasseurs de primes. En attendant, il passe son ennui en maltraitant un cafard au son de la petite musique de sa montre (il a le cafard en somme). Cette scène est l’image même de la mélancolie. La tête posée sur son bras, la petite musique triste, les pensées voguant vers quelques souvenirs traumatisants, Gian Maria Volonte représente toute la détresse des écorchés vifs qui sont blessés à l’intérieur. On voit à nouveau le joint, que Leone et ses scénaristes avaient ajouté pour donner une explication au jeu exacerbé de l’acteur, qui venait du théâtre. Curieusement, ce jeu expansif de Volonte n’est pas toujours au rendez vous. Si dans Quien Sabe l’acteur cabotine effectivement à outrance, il est beaucoup plus sobre dans Le Dernier face à face, et dans ses films politiques ultérieurs, ainsi que dans Chronique d’une mort annoncée. Que s’est il passé dans la tête de l’acteur ? Leone s’était il trompé sur son compte ? Si vous savez, exprimez vous !


Le duel à la montre
Rien que l’idée du duel à la montre est magnifique. Mais je ne résiste pas à reproduire ici un autre découpage de cheveu en quatre lu sur le Spaghetti Web Board ou sur le Leone Web Board. La mécanique de la montre utilise un système de ressors. La mélodie ne s’arrête donc pas toujours sur la même note. La musique ralentit petit à petit avant de s’arrêter tout à fait. Alors comment savoir quand la musique s’arrête vraiment ? Il peut très bien y avoir une pause d’une seconde entre l’avant dernière note et la dernière, ce qui fait que l’un des deux opposants pourrait se tromper et croire que la musique s’arrête, alors qu’en fait il reste une note. Putain, la honte si Lee Van Cleef dégaine alors que la musique est pas finie, bouuu le mauvais joueur ! Mais alors quelle solution apporter ? Un des membres du board suggère d’attendre un temps raisonnablement long après la dernière note, avant de dégainer. Du genre « après la dernière note, on compte jusqu’à dix pour être sûr que c’est la dernière note, et on dégaine ». Pourquoi pas, mais on peut alors ne plus utiliser la montre du tout. Et puis « on compte jusqu’à dix et on dégaine, ou on dégaine au moment où on dit « dix » » ??? Il y a de quoi empêcher de dormir tout honnête homme qui sait se poser les questions vraiment existentielles de la vie !
D’autre part, on aura tous noté qu’au petit jeu de la montre, l’Indien est vachement avantagé sur ses adversaires, parce qu’il connaît sa montre par cœur, et il sait grosso modo quand la musique va s’arrêter. Jusqu’au jour où il rencontre le Colonel Mortimer qui connaît aussi sa montre par cœur…

2 commentaires:

  1. Hé ho, merveilleux article ! Félicitations !

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  2. J'ai fait quelques references a ton grand article dans mon propre text sur le SWDB:

    http://www.spaghetti-western.net/index.php/For_a_Few_Dollars_More_Review

    Scherpschutter

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